Élection du Dr Sidi ould Tah à la BAD : La manière en plus !

5 June, 2025 - 14:31

Le candidat Sidi ould Tah vient d’être élu à la tête de la BAD ; « avec la manière ! », dirait l’autre. Et, certes, plus de 70% des suffrages, ce n’est pas peu. Deux raisons justifient cette éclatante victoire. D’abord, le parcours de l’homme. Économiste de formation, Sidi ould Tah a occupé le poste de ministre de l’Économie et des finances de son pays pendant des années, ce qui lui a permis de connaître et de maîtriser les rouages de l’économie mauritanienne mais, aussi et surtout, de côtoyer les institutions de Breton’s Wood et autres grands argentiers du Monde, s’y illustrant par ses compétences et talents de négociateur.  Les diplomates qui l’ont côtoyé décrivent en lui un homme affable et courtois. Son image passe bien auprès de tous ceux qu’il a eu à rencontrer. Une image bien « vendable », tel était donc son premier atout qui lui a permis de se constituer rapidement un premier carnet d’adresses qu’il n’a cessé d’étoffer avec son élection à la tête de la BADEA où il put élargir son expérience de gestion des institutions économiques et de finances et fut introduit auprès des chefs d’État, rois, princes et dirigeants d’institutions similaires, s’acquérant ainsi une bonne réputation. Ces dix années passées à la BADEA ont donc jeté les projecteurs sur ce mauritanien apprécié dans son pays pour sa discrétion et sa retenue. Une période au cours de laquelle il fit, de cette banque à l’activité marginale jusqu’à son élection à sa tête, un monstre financier dont les investissements ont atteint un record de de 2,2 milliards de dollars en 2023 contre une moyenne de seulement 250 millions de dollars auparavant. Le capital de la banque a, lui été multiplié par cinq, passant de 4,2  à 20 milliards de dollars.

 

Un président impliqué à fond

 

Le deuxième atout de Sidi ould Tah fut l’implication du président de la République Mohamed Cheikh Ghazwani en personne, dans la campagne électorale du candidat soutenu par un comité composé d’hommes aguerris sous la houlette d’Ould Bouh, le ministre de l’Économie et des finances. Parallèlement audit comité, le président de la République aurait activé tous les leviers à sa disposition, ne cessant, dit-on, de téléphoner à ses homologues et autres décideurs influents pour leur demander de soutenir son candidat. Certains affirment même qu’il n’aurait pas dormi la veille du scrutin et qu’il suivit le déroulement de celui-ci toute la journée. Le résultat fut flamboyant. Les institutions partenaires dont les votes pèsent fortement et même certains pays qui penchaient plutôt pour les concurrents de Sidi ont apporté leur soutien au mauritanien dont le profil et les compétences, l’expérience et le programme avaient fini de convaincre. Avec un résultat ad hoc : alors que notre distingué économiste était placé en tête dès le deuxième tour du scrutin, c’est au troisième de celui-là que la messe fut dite.

L’équipe mauritanienne dépêchée à Abidjan n’a pas non plus chômé, jouant de fine diplomatie jusqu’à la sortie de la fumée blanche. Notons ici que la forte implication du président de la République, et surtout son succès, forment quasiment une Première, tant notre diplomatie s’était illustrée, les décennies passées, par des échecs retentissants de ses candidats dans les institutions internationales. Qu’est-ce qui a donc changé ? Le choix de nos candidats était très décrié et la récente bagarre entre deux d’entre eux à l’étranger donnait raison à ceux qui doutaient de leurs capacités et de leur sens de responsabilité. L’élection de Sidi ould Tah vient effacer cette mauvaise image et jette une lueur d’espoir sur notre diplomatie qui vient de conférer au nouveau président de la BAD sa deuxième étoile.  L’homme doit maintenant faire face un gros défi, dans un contexte marqué par le retrait – à tout le moins, la suspension… – des financements des États Unis d’Amérique, un des gros contributeurs de la BAD. Le mauritanien ne doit donc pas lambiner à convaincre les pays du Golfe – qu’il connaît certes bien… – de renflouer les caisses de son institution afin de lui permettre de tenir ses engagements à trouver de nouvelles ressources pour financer les micro-entreprises et l’emploi des jeunes…

 

Dalay Lam