
Ils étaient cinq marins dans la fleur de l’âge, partis de chez eux en quête de pitance. Ils ont investi le peu d’argent qu’ils avaient réussi à mettre de côté dans la location d’une pirogue pour pêcher : le projet de toute une vie. Ils n’imaginaient sans doute pas que leur destin basculera en la nuit fatidique du 10 Avril lorsqu’un bateau les percuta en haute mer, renversant leur embarcation et les jetant à l’eau. Aussitôt alertés, les garde-côtes se sont rendus sur le lieu de l’accident et ont commencé les recherches. En vain jusqu’à ce jour.
Dans une mer déchaînée, comme celle de ce soir-là, les chances de survie sont infimes. Surtout que les marins mauritaniens ne sont pas habitués à utiliser les gilets de sauvetage indispensables en cas d’accident ou d’intempéries. À l’heure qu’il est, l’embarcation a été repérée à trente-huit mètres de profondeur par les plongeurs des garde-côtes. Ce n’est pas la première fois que ce genre d’accident arrive. Les pirogues sont régulièrement victimes des gros chalutiers qui les percutent en mer, quand ceux-ci ne raflent pas les pots de poulpe que celles-là ont pris soin de placer dans des zones bien précises, avec des signes distinctifs.
En l’absence d’une surveillance efficace, nos côtes sont devenues une véritable jungle où le plus fort écrase le plus petit, où certains bateaux ne respectent plus rien, s’adonnant à un pillage systématique des ressources, y compris dans des zones de reproduction prétendument protégée, comme le banc d’Arguin, où les flottes chinoise et turque, protégées par des puissants lobbies, évoluent comme en terrain conquis, sans peur… mais certainement pas sans reproche.
Ahmed ould Cheikh