
La reprise de l’initiative
Des jeunes de bonne volonté
Retournons à notre « Cercle ». Celui-ci était composé d’une dizaine de jeunes, tous anciens militants du MND. Pour les militants organisés encore dans les structures de ce qui restait du MND, ces « anciens camarades » étaient désormais considérés comme des « aplatis » ou des « déserteurs » de la cause révolutionnaire. Dans les détails, j’ignorais complètement les véritables raisons qui avaient amené les uns et les autres à décrocher du MND. Je savais seulement qu’ils exprimaient tous, au moment où je me mis à les organiser, un grand enthousiasme et beaucoup de disponibilité à militer dans le nouveau cadre que je leur ai proposé: « le Cercle ». Parmi eux, je retiens: en plus de moi, Kaber Ould Hamoudi, Gaye Elhaj,Cheikh Ahmed Ould Zehaf, Wane Birane, Sidi Ould Taleb, Khallihinna Ould Tolba et feu Boubakar Ould Mohamed.
L’embarras des chefs d’Etat africains
La première tâche qu’on s’était fixée était d’œuvrer pour rapprocher les élites des différentes communautés. A l’époque, il était beaucoup question de « conférence nationale ». Elle figurait en tête des revendications des différents mouvements réclamant la démocratie un peu partout et surtout en Afrique. Elle était considérée comme étant l’une des revendications les plus embarrassantes pour les gouvernants des pays aux chefs d’Etat inamovibles. Plus tard, ces derniers finiront par s’y adapter après l’avoir vidée de sa substance.
Palabre à l’africaine
A notre manière, nous avions décrété notre « conférence nationale ». Tous étaient invités dans des lieux choisis et préparés d’avance, généralement dans des maisons d’amis qui acceptaient notre complicité. Tout indiquait que ça arrangeait tout le monde. Même les autorités du pays de l’époque ne voyaient pas d’un mauvais œil un moyen qui leur permettrait de dépasser une situation qui en fait devenait indésirable, puisqu’intenable. A aucun moment, elles n’avaient cherché à déranger notre action.
Donc, notre « conférence nationale », sous forme de grandes assemblées générales, voire parfois de meeting, devenait un lieu de pèlerinage pour tous. Pendant plusieurs semaines, la situation générale dans notre pays et l’unité nationale en particulier, furent l’objet d’un déballage à bâtons rompus sans précédent. Progressivement la confiance intercommunautaire fut restaurée. Nous avons bénéficié du soutien actif des militants organisés encore au sein des structures du MND, soutien qui nous avait beaucoup facilité la tâche.
Ne pas compter sur une opposition plutôt myope
Reprenons le chemin de Toujounine. En route, au début, j’avais les idées complètement confuses. Pour moi, incontestablement, Ould Taya venait d’arracher l’initiative politique à ceux qui se positionnaient déjà comme un début d’opposition légale. L’hétérogénéité de celle-ci et la myopie politique de la plupart de ses chefs ne me confortaient nullement dans ma situation. En cours de route, avant d’arriver chez mon ami Khallihinna, dans ma petite cervelle, la guerre de propositions et contre-propositions accoucha de la proposition de solution suivante: il faudra déployer tous les moyens pour amener les signataires des lettres ouvertes à s’ériger aussitôt en regroupement politique déclaré.
Condoléances
Ce jour de fête, mon ami Khallihinna n’aura aucun moment pour prendre la moindre mesure afin d’habiller ses enfants, surtout notre petite bien-aimée, la mignonne Ghalla, 5 ans à peine, et son petit chiot « Ramsès ». Pour l’occasion suite au décès la semaine dernière de leur bien aimée maman Mendou, je présente ici mes condoléances les plus attristées à tous les membres de cette honorable famille qui m’a adopté comme un papa bis pour ne pas dire un deuxième.
En compagnie de papa Khallihinna
Khallihinna, Papa, comme l’appelaient ses enfants, et comme je l’appelais moi aussi, va m’accompagner sur le champ jusqu’au-delà de minuit. Sans interruption, nous avions entrepris une campagne de contacts tous azimuts. Dans un premier temps, la stratégie de ma proposition a ciblé deux ténors de l’opposition : feu Mohamed Elmoustafa Ould Bedreddine et Messaoud Ould Boulkheir. Il s’agissait d’abord de prendre contact avec le premier. Nous lui exposerons sans détour notre proposition. Comptant sur sa lucidité, on s’attendait à ce qu’il l’accepte sur le champ et dans son intégralité. La deuxième personnalité ciblée par notre proposition n’était autre que Messaoud Ould Boulkheir.
Avec Bedreddine, les choses s’étaient déroulées comme prévu. Il a aussitôt fait sienne notre proposition. Il déclara qu’il nous accompagnera jusqu’à son aboutissement.
Découverte du phénomène Messaoud
Concernant Messaoud, la tâche s’annonça difficile. Il n’a jamais cessé de nous répéter qu’il ne se laissera jamais manipuler par ce qu’il appelle « les grands manipulateurs du MND » ou du « MDN», comme il a l’habitude de l’appeler. Le problème de Messaoud résidait dans le fait qu’il s’était embourbé très tôt dans le commandement administratif. Le temps lui avait donc manqué pour se familiariser d’une façon indépendante avec l’action politique. Les membres de notre « Cercle » l’avaient surtout connu lors des dernières municipales de 1990. Après un court séjour à la tête du ministère du développement rural, il connaitra une période pas très longue de traversée du désert. C’était probablement son unique pause dans le travail administratif avant son départ à la retraite.
(À suivre)