Homme de lettres, intellectuel éclairé et politicien engagé, Ahmed Ould Sidi Baba, fervent défenseur de la diversité culturelle, de la démocratie et de l’État de droit, a publié ‘’L’Homme mondialisé’’ en 2013, un ouvrage de 115 pages édité chez L’Harmattan. Ce livre, préfacé par Sidi Mohamed Ould Cheikh Abdellahi, ancien président de la République islamique de Mauritanie, est un véritable cri d’alarme face aux dérives de la mondialisation et aux déséquilibres qu’elle impose.
Une biographie marquée par l’engagement et l’excellence académique
Ancien élève de la Sorbonne, où il a poursuivi ses études après une préparation au concours de l’École normale supérieure, Ahmed Ould Sidi Baba a occupé plusieurs hautes fonctions dans l’appareil d’État mauritanien. Directeur de l’École nationale d’administration (ENA), ministre à plusieurs reprises, et premier maire de la ville d’Atar après les premières élections municipales pluralistes du pays, il a également été président du Conseil économique et social et dirigeant du Rassemblement pour la Démocratie et l’Unité (RDU), un parti d’opposition. Cette riche carrière lui a permis d’acquérir une expérience nationale et internationale unique, tout en restant un militant infatigable de la démocratie et de l’État de droit.
Une critique de la domination du Nord sur le Sud
Dans L’Homme mondialisé, Ahmed Ould Sidi Baba explore les conséquences négatives de la révolution scientifique issue du Siècle des Lumières. Bien que cette révolution ait permis des avancées considérables, elle a également favorisé la domination du Nord sur le Sud, instaurant un ordre international inéquitable. L’auteur revisite les grandes théories philosophiques qui ont façonné la civilisation humaine pour analyser les origines du désordre mondial actuel.
S’inspirant d’une citation de Jacques Chirac, il dénonce l’arrogance culturelle des nations occidentales : « Je ne suis pas fanatique du bouddhisme, du taoïsme, de l’islam ou d’autre chose. Mais je ne supporte pas le rejet des autres cultures par la civilisation occidentale. […] Ils croient tout savoir, mais ils ne font que perpétuer une tradition qui nous a amenés à écraser et détruire tant de civilisations […]. Si l’on veut se respecter soi-même, il faut d’abord respecter les autres. C’est par la tolérance que l’on enracinera la paix dans le cœur de l’humanité. »
Un plaidoyer pour un nouvel ordre international humaniste
En homme de dialogue et de réflexion, Ahmed Ould Sidi Baba milite pour l’émergence d’un nouvel ordre international humaniste, capable de contrer une mondialisation multiforme, souvent imposée par le Nord au détriment du Sud. Cet idéal s’inscrit dans une volonté d’équité, de respect mutuel et de promotion des valeurs démocratiques.
Un engagement ancien pour la culture et la démocratie
L’ouvrage est enrichi de deux annexes éclairantes :
1. Une proposition de politique culturelle présentée par l’auteur en 1974, alors qu’il était ministre de la Culture.
2. Un rapport sur le Forum des valeurs diplomatiques et de la citoyenneté, organisé en 2005 sous l’égide du Rassemblement pour la Démocratie et l’Unité (RDU), parti qu’il présidait.
Ce forum avait pour objectif de promouvoir un débat national élargi, impliquant la presse et la société civile. Il visait à dégager des recommandations consensuelles pour renforcer la démocratie en Mauritanie et éradiquer les vestiges de l’esprit monolithique. Ahmed Ould Sidi Baba aspirait ainsi à ancrer dans la conscience collective des valeurs démocratiques authentiques, condition essentielle pour garantir une stabilité politique durable.
Une ouverture entravée par les bouleversements politiques
Dans un contexte marqué par une impasse politique, des tentatives de putschs avortées et leurs dérives — notamment des abus et l’emprisonnement de plusieurs acteurs politiques et militaires —, le président Maaouiya Ould Sid’Ahmed Taya avait amorcé une volonté présumée d’ouverture envers l’opposition. Ce processus, bien que fragile, semblait ouvrir une perspective de dialogue politique. Cette volonté a été confirmée par Mohamed Ould Maouloud, président de l’Union des Forces de Progrès (UFP), qui, au cours de plusieurs interviews, a souligné que ce début d’ouverture aurait pu constituer une avancée significative pour sortir de l’impasse. Cependant, ce processus a été brutalement interrompu par le renversement du régime de Maaouiya le 3 août 2005.
Ce coup d’État, mené par le Conseil Militaire pour la Justice et la Démocratie, a marqué une réorientation politique majeure pour le pays. Bien que cette nouvelle étape ait apporté certains mérites, elle a également imposé des limites, freinant notamment l’application des recommandations issues des concertations nationales initiées par Ahmed Ould Sidi Baba et d’autres acteurs réformateurs.
Un héritage intellectuel et politique inspirant
Malgré ces bouleversements, l’héritage intellectuel et politique d’Ahmed Ould Sidi Baba demeure une source d’inspiration pour tous ceux qui aspirent à une Mauritanie plus juste et démocratique. Avec L’Homme mondialisé, il s’affirme comme une figure majeure de la réflexion sur les enjeux de la mondialisation, rappelant que la construction d’un monde plus humain et équilibré passe par le respect de la diversité culturelle et des valeurs universelles de justice et de tolérance.
Ahmed Mahmoud Ould Mohamed dit Gemal