Le Bâtonnier et doyen Brahim Ould Ebety intensifie ces jours-ci ses interventions après un an de silence, et prône de vieux points de vue qui n’ont rien à voir avec le droit, les faits ou le bon sens. Alors que s’est-il passé ?
Il semble qu’il y ait trois raisons principales derrière ses interventions et qui sont :
1. L’ampleur de la surprise provoquée par le recours en inconstitutionnalité contre l’article 2 de la loi n°2016/014 relative à la lutte contre la corruption derrière lequel se barricadaient les acteurs à l’origine de l’action vexatoire et mensongère pour corruption de la décennie, article sur la base duquel le tribunal a prononcé sa condamnation injuste contre l’ancien président.
Ce recours a semé la confusion dans toute l’arène et poussé le bâtonnier à affirmer tantôt que le pourvoi en inconstitutionnalité n’a lieu que devant la juridiction de fond, et tantôt à dire qu’il ne peut être soulevé qu’une seule fois durant toute la procédure, en perdant de vue les dispositions de la Constitution en son article 86 qui dispose que « le Conseil constitutionnel est compétent pour connaître d’une exception d’inconstitutionnalité soulevée au cours d’un procès, lorsqu’il est soutenu par l’une des parties que la loi dont dépend l’issue du litige porte atteinte aux droits et libertés garantis par la constitution », ainsi que celles de la loi organique n°013/2018, en son article 4 ainsi libellé : « Tout requérant peut soulever l’exception d’inconstitutionnalité d’une loi devant toute juridiction ».
Le Bâtonnier oublie également que sa qualité de représentant de la partie civile, ne l’autorise point à se prévaloir de moyens anticonstitutionnels pour défendre son client, comme son rôle doit se cantonner strictement à réclamer des dommages-intérêts, en prouvant le préjudice subi par son client.
2. L’intérêt de ce pourvoi est d’avoir révélé les intentions voilées et objectifs réels des auteurs de l’action vexatoire et dénuée de tout fondement contre l’ancien président de la République, comme il a suscité chez certains d’entre ceux-ci une forte crainte quant à la possibilité de sa recevabilité, non seulement en raison de sa pertinence et de son fondement légal, mais aussi parce que ceux qui s’accrochent à l’applicabilité de l’article 2 de la loi anti-corruption, visent à travers cette démarche, l’abrogation de facto de l’article 93 de la Constitution, occasionnant de la sorte un chaos général, pouvant favoriser une condamnation arbitraire de l’ancien président ; c’est dans ce sens que versent les propos du Bâtonnier quand il déclare qu’’’une tentative de ne pas appliquer la loi sur la corruption à l’ancien président n’est pas pertinente à la lumière de la responsabilité des présidents et des ministres du monde entier s’ils outrepassent leurs pouvoirs’’ comme s’il appartenait au Bâtonnier de cerner la notion d’excès de pouvoir. Quid de l’article 93 de la Constitution ? L’actuel président de la République acceptera-t-il de se voir dépouillé de la protection que lui assure l’article 93, pour n’être plus qu’un « agent public » que ses amis-ennemis pourraient conduire à la potence sous la seule pulsion d’une inquisition vengeresse ? Est-il imaginable que le président du conseil Constitutionnel, au terme de son mandat, et de sa riche carrière professionnelle, se fasse l’écho du désidérata du Bâtonnier Brahim ould Ebety, pour qualifier allègrement et clôturer sans coup férir, sa brillante carrière en qualifiant le président de la République d’ «agent public » dans un régime constitutionnel à caractère présidentiel ?
3. L’ampleur de la faillite de l’affaire de la corruption de la décennie, de l’échec et de la déception qui en ont résulté !
Tout le monde a pris conscience que le dossier de la corruption de la décennie n’est ni un dossier judiciaire ni un dossier juridique, mais plutôt un dossier politique créé par le Bâtonnier et ses amis sous un parapluie également politique, social, judiciaire et de propagande, le 25 octobre 2020 au Palais des Congrès, et qui l’ont fondé sur quatre piliers :
- Corruption, pillage et dilapidation des biens de l’Etat par l’ancien président et ses compagnons (au moins des milliers de milliards et des comptes garnis dans toutes les banques du monde). Ce pilier s’est effondré, car le bâtonnier qui l’a édifié ne l’a corroboré par aucune preuve, mais par des affabulations, dont le président a été acquitté par le tribunal.
- Le pilier selon lequel le président a commis des actes criminels détachables qui n’ont rien à voir avec ses pouvoirs et ses compétences, est également effondré puisqu’aucune preuve n’a été établie que le président aurait commis des actes criminels, et d’autre part, la théorie des actes détachables n’est pas consacrée par la constitution mauritanienne, ce qui ne peut se faire que par référendum, pouvant se prononcer sur l’adoption de cette théorie, ce qui n’a pas encore eu lieu à ce jour, alors que certains de nos juristes s’accrochent à cet argument, en vain.
- Le pilier selon lequel le président de la République dans le système présidentiel mauritanien est un agent public (et le bâtonnier le dit franchement, et sans aucune hésitation) dont le statut juridique et judiciaire est régi par l’article 2 de la loi anti-corruption ! C’est sur cet argument futile, dénué de tout fondement que s’est basée la décision chancelante du tribunal, argument sur le point d’être balayé sur le plan constitutionnel, juridique et jurisprudentiel.
- Le pilier de la fabrication, de la déformation, de la diabolisation et de la falsification.
Ces mensonges ont désormais été dévoilés dans tout le pays et plus personne n’y croit ! Surtout à la lumière de la corruption sans précédent qui s’est produite et se produit encore dans le pays !
Il est très difficile d’imaginer l’ampleur du sentiment de désespoir et de frustration d’un ingénieur qui a travaillé quatre ans à la construction de «la cité d’Iram » en banco, tout en faisant croire au maître d’ouvrage qu’il s’agissait d’un édifice en or qui, par sa beauté, son éternité et la noblesse de ses objectifs se compare au «Taj Mahal», que ses bontés et ses bénédictions couvriront les quatre coins du monde et qui voit soudain, sa structure et ses fondations s’écrouler, s’effondrer ! Et qui n’apporte que ruine et destruction à la patrie !
Nous autres, du barreau de Mauritanie, sommes exposés - sauf ceux qui sont touchés par la grâce du Seigneur - à l’obligation de fournir des rapports roses à nos clients, et d’acquiescer à leurs exigences impitoyables ! Ceci est vraiment dégoûtant !
Faites un petit tour à Nouakchott : allez de la plage des pêcheurs au Port de l’Amitié ou de cette infrastructure vers le carrefour dit Bamako ; partez d’Atak El Kheir 2 en direction de l’Est ; promenez-vous en divers quartiers de la capitale… Rassurez-vous, il ne s’agit pas de villégiature !