Solutions pour une politique équitable envers nos jeunes (A)

1 October, 2024 - 19:52

On s’attendait peut-être à ce que la mission « Autonomisation des jeunes pour le mandat 2024-2029 » fût confiée à un organisme de nature opérationnelle, comme la Délégation générale pour la solidarité nationale et la lutte contre l'exclusion (Taazour), en droit fil de ce qu’avait annoncé le président de la République, monsieur Mohamed ould Cheikh El Ghazouani, lors de sa dernière campagne présidentielle. Mais on a appris, depuis, qu’intégrée au ministère de l'Autonomisation des jeunes, des sports et du service civique, cette mission restera aux mains d'un secteur ministériel, comme d'habitude. Cela devrait obliger le ministre concerné à compenser l'absence d’un organisme opérationnel flexible en adoptant une plus dynamique et souple structuration de son portefeuille, afin de surmonter la bureaucratie inhérente aux structures publiques et leur lenteur à atteindre leurs objectifs.

Dans cette analyse en trois parties, nous proposerons dix solutions pour une politique nationale d'autonomisation équitable des jeunes en Mauritanie, sur la base d'un diagnostic préalable où nous aurons identifié dix défis pouvant entraver une telle entreprise. Nous aborderons, dans la première, les défis liés à l'absence d'un bon diagnostic de la situation des jeunes, ainsi qu'au manque d'un objectif stratégique vers leur autonomisation équitable.

 

Défi 1 : absence de diagnostic précis de la situation des jeunes

Partons de l’idée que le principal obstacle à l'autonomisation des jeunes est l'absence d'emploi. Un bon diagnostic commencera donc par obtenir des données précises, spécialisées et récentes sur la problématique de l'emploi et du chômage des jeunes, en particulier en Mauritanie. Il est nécessaire d’en connaître les causes directes et indirectes : manque de qualification et de financement, mentalités et environnement social ; et d'évaluer l'impact de ces causes dans leurs dimensions directe et indirecte.

Il est également crucial d'identifier les acteurs qui peuvent contribuer à la solution : secteurs public et privé, partenaires techniques et financiers internationaux, organes sociaux et civils. Une attention particulière doit être accordée aux catégories les plus touchées par le chômage et ses conséquences, notamment la croissance de la criminalité, la consommation de drogues et la migration.

On peut, à partir de ce diagnostic, définir des objectifs SMART. Considérons que la tranche d'âge des jeunes se situe entre 15 et 35 ans, et que cette tranche représente 60 % de la population du pays (environ 4 500 000 habitants). Le nombre actuel de jeunes en Mauritanie tourne donc autour de 2 700 000 jeunes hommes et filles. En appliquant le précédent diagnostic à cette estimation, nous devons établir le profil de chaque jeune, connaître son niveau d'éducation et de formation, ses loisirs, son environnement, son emploi ou absence d'emploi, ses centres d'intérêt, ainsi que sa condition physique et sociale, parmi d'autres informations qui seront très utiles lors des phases ultérieures du diagnostic. Cela permettra de les placer dans la catégorie adéquate pour une stratégie nationale efficace.

Ce diagnostic nous fournira une image claire des actions à mener pour résoudre le problème du chômage. Cela signifie que le nombre net de jeunes chômeurs, selon la définition de l'Organisation Internationale du Travail, sera l'indicateur statistique principal et constituera, au cours du mandat, le centre de l'activité du secteur de l'autonomisation des jeunes. Mais, encore une fois, soyons plus précis et transparents, en définissant le nombre de jeunes que nous pouvons réellement et concrètement sortir du chômage. Si nous arrivions à en extraire 30% d’ici 2029, voilà qui serait déjà une bonne chose. Certes, un tel objectif nous situe dans l’ordre du possible et pas dans celui de l’espoir du grand public mais il paraît en tout cas réaliste. L'essentiel est d'avoir une vision claire de nos engagements nationaux et de réussir à poser des bases solides et précises qui nous conduiront, en fin de compte, à atteindre nos objectifs, qui font partie intégrante des Objectifs de Développement Durable (ODD).

 

Défi 2 : absence d'objectif stratégique dans le domaine de l'autonomisation

On manque d’objectif national fermement tenu par des paramètres stratégiques ayant un impact tangible et durable sur l'éducation des jeunes, leur santé, leur bien-être, leur sentiment d'appartenance, leur mentalité, leur préparation, leurs talents, leur capacité à se faire une place dans l’un des chantiers de construction national, ou à y apporter une contribution mesurable selon les indicateurs de développement économique, culturel et scientifique du pays. Il s’agit donc de répondre aux deux questions suivantes : quel type de jeunes voulons-nous préparer pour l'avenir ? Quelles seront les mesures concrètes à prendre en ce sens d'ici 2029 ?

L'objectif doit prendre en compte divers aspects liés à la préparation de cette génération attendue. Ce pourrait être, par exemple et de manière générale, préparer à l’horizon 2035 un ensemble de jeunes dotés de connaissances, de valeurs d'appartenance à la nation, de compétences en leadership, d'esprit d'innovation et de valeurs de citoyenneté active, grâce à des programmes éducatifs et de formation complète visant à renforcer leur capacité à relever les défis futurs et à contribuer efficacement au développement du pays. En se concentrant spécifiquement sur l'emploi, l'objectif devrait être cependant formulé de manière plus pragmatique, en se basant sur les données statistiques extraites des estimations précédentes. (À suivre).

 

Rajel Oumar Boilil

Consultant en jeunesse