Éviter d’ignorer des réalités têtues

8 August, 2024 - 01:38

Depuis l’annonce non officielle des résultats des dernières présidentielles, notre pays sombre dans une sorte de cauchemar indescriptible. Les vainqueurs déclarés, loin de fêter leur victoire annoncée, sans tambour ni trompettes, comme au « bon vieux temps », font défiler des témoins plus que partiaux, défendant le point de vue officiel sur les élections. La plupart des candidats amateurs, déclarés vaincus, appuient, sans beaucoup d’efforts de convaincre, l’opinion officielle sur le résultat des élections, élections qu’ils nous avaient promis de gagner à l’aide d’arguments et de programmes incohérents et décousus. Un seul d’entre eux, l’inamovible Biram Dah Abeid, se distingue par son habituelle capacité de défier l’autorité en place. Son opinion, vraie ou fausse, bonne ou mauvaise, est manifestement censurée. Même les médias qui assistent à ses conférences de presse, n’en informent pas. On continue à se faire croire qu’on peut inculquer aux autres ce qu’on pense ou ce qu’on prétend penser de lui. Lui, à son tour (et probablement à tort) se plait dans cette opinion (vraie ou fausse) que certains se tracassent à donner de lui.
Pourtant, lors des présidentielles de 2019, ce même BDA s’était pressé pour collaborer avec le candidat à l’époque Ghazouani pour barrer la route à des manœuvres de l’ex-président Aziz visant à troubler l’eau pour y pêcher une nouvelle occasion qui lui permettrait de revenir au pouvoir. Bizarrement, presque le même contexte se répète! Pourquoi ne pas répéter aussi le même remède?!
Les médias officiels et non officiellement officiels (radios et TVs) se relaient, à leur tour, pour défendre « la vérité officielle » à propos d’un scrutin dont le souvenir amer dérange bien des innocents esprits. La fermeture de l’internet nous prive de l’apport des réseaux sociaux en matière d’information et de confrontation des opinions sur une situation chargée d’incertitudes. Seul le débat contradictoire est en mesure à la fois, de cultiver et de convaincre.

 

Un clivage à caractère racial
Notre malheur est de vite oublier les diverses expériences que nous avons vécues sur le pouvoir du parti unique ou du parti dominant (PRDS) et à opinion unique. Heureusement, notre peuple n’a nullement oublié. Personne ne peut plus lui faire digérer une opinion, même vraie, mais à sens unique.
Personnellement, je n’appartiens à aucune institution partisane, officielle ou non officielle, pour me donner le culot de vouloir/pouvoir arbitrer entre des parties, qui apparemment, se plaisent, chacune, dans son retranchement.
Ma conviction est que, encore malheureusement, nous continuons, voire nous nous plaisons dans la fuite permanente de notre réalité. Rappelons que notre Processus Démocratique, fut déclenché dans le climat délétère hérité des événements sanglants et raciaux de 1989-1991. Depuis lors, nos élections, toutes nos élections, sont entachées et marquées par les stigmates de ce douloureux et regrettable moment. À titre d’exemple, et à l’aide d’une machine de fraude à ciel ouvert et une armada de soutiens sans bornes, et à aucun moment, le pouvoir autoritaire de Ould Taya n’a réussi à gagner des élections dans la capitale Nouakchott, sans citer ses sérieuses difficultés rencontrées à chaque fois dans les principales capitales régionales. Un clivage à caractère nettement racial se fait voir à chaque fois.
Malheureusement cette situation persiste jusqu’à nos jours. En persistant à vouloir forcer des solutions sans jamais s’attaquer au fond du problème, on risque de faire pourrir une situation jusqu’à un point de débordement qui nous ferait perdre tout contrôle sur elle. Les mêmes causes produisent les mêmes effets, comme dit la règle scientifique. On aurait pu s’inspirer des exemples des pays amis voisins. Intrinsèquement, on n’a absolument rien de différent, sauf que nos fragilités sont si criantes (du moment qu’elles ont des couleurs) au point que leurs effets pourraient causer plus de dégâts et de situations irrémédiables. Les tsunamis d’instabilité  sur fond de crise politique, surtout sur fond social, ethnique ou religieux, emportent tout sur leur passage: riches et pauvres, cols blancs et cols noirs, clans au pouvoir et d’autres à sa désespérée conquête… Et si nous méditons un peu plus sereinement la dégénérescence de situations pareilles aux: Mali, Burkina, Somalie, Liban, Soudan, …..
En conséquence nous avons tout intérêt à regarder nos réalités en face et à agir en conséquence avant qu’il soit trop tard !

N’est-ce pas pas?!

A S Elmoctar