Moi, je voudrais poser juste une question aux Mauritaniens. À tous les Mauritaniens. De l’Est. De l’Ouest. Du Nord. Du Sud. Et du Centre. Aux Mauritaniens qui ont sauté le mur, sinon rasé ou débroussaillé. À ceux qui sont partis depuis longtemps ou depuis peu. Depuis la décennie ou depuis le quinquennat. Pourquoi voulez-vous cracher dans la soupe ? Pourquoi êtes-vous si insolents ? Pas tous, bien sûr : ceux qui sont polis et bien éduqués servent juste à confirmer la règle générale. S’il avait plu à Allah, la Mauritanie disparaissait. Où iriez-vous ? Où irions-nous ? Où iraient-ils ? Aller vendre du thé de très mauvaise qualité au Sénégal ? Partir se confondre avec les gens de l’Azawad, du Polisario ; avec les Peuls du Mali, les Soninkés du Nigéria ou les Wolofs du Sénégal ? Nous étions, dit-on, le pays d’un million de poètes. Nous sommes devenus le pays de quatre millions de fossoyeurs de l’unité nationale, quatre millions de va-t’en guerre, quatre millions de promoteurs indélicats de maladives idées belliqueuses, sur fonds de mensonges grossiers et d’accusations infondées. Heureusement que la connexion est coupée. Vivement la déconnexion ! Pour de bon. Pour toujours. Des obséquiosités, des incivilités, des inconvenances, en veux-tu ? En voilà ! Un pays d’un million de poètes… Un pays qui revendique toutes les vertus possibles et imaginables... Un peuple dont les ancêtres auraient fait lever le monde et ne l’ont pas encore fait asseoir... Les gens du Bilad Chinguitt, du Bilad Tekrour, Walo ou de
je ne sais pas quoi encore qui font l’apologie de la gabegie ! Des milliards de milliards de milliards disparus de la fin des années 70 à maintenant… De la fraude, des milliards de bulletins frauduleusement enfouis en des milliards d’urnes de 1986 à maintenant, avec la bénédiction des commissions électorales, des Conseils constitutionnels, des Regardoirs/Observatoires ! De la tricherie organisée au cours des examens nationaux pour faire admettre au baccalauréat à la pelle et à la brouette ! Du mensonge, de l’hypocrisie, de l’infidélité ! Partout. C’est bien de nous faire retourner aux anciens temps : pas de télévision, pas d’ordinateurs, pas de rien. Au temps des lettres « trempées » envoyées d’une ville à une autre pour être lues sans discrétion. Au temps des mandats postés, au temps des cassettes enregistrées et expédiées aux parents au village, au campement ou à l’adebaye. Aux communiqués populaires diffusés la nuit par radio, pour informer d’une naissance, d’un décès, de l’envoi d’un montant à la famille ou de quelques bagages dont le transport requiert un chameau ou un âne… ou encore présenter des condoléances. Nous sommes nous-mêmes… au 22ème siècle avec les mentalités anachroniques de 1970. Les V6 ou V8, l’Internet ou les cartes visas, les vestes et les cravates de toutes les marques du monde,les billets électroniques pour aller partout sur la planète : rien à faire ! Le problème est dans la tête, les atavismes grégaires, les anachronismes inextricables, les hérédités ancrées : nous, c’est nous ! Nous ne ressemblons qu’à nous-mêmes. Et encore… Salut.
Sneiba El Kory