L’émigration est un phénomène universel qui se perd dans la nuit des temps. Il est historiquement prouvé que l’espace terrestre a été peuplé à partir de l’Afrique, notre Afrique. L’instinct de survie pousse toute espèce vivante à un perpétuel mouvement à la recherche de meilleurs conditions de vie et d’existence.
Nos propres populations sont des populations en perpétuelle mouvement migratoire, aussi bien au niveau des pays de la sous-région que du monde entier. Le mouvement est réciproque.
Nous avons certainement l’équivalent du double, voire du triple ou quadruple, sinon plus, de notre population actuelle, de migrants ayant quitté notre pays pour vivre ailleurs. De même nous avons actuellement près d’un million de migrants venus d’ailleurs, fuyant souvent des situations d’insécurité dans leurs pays d’origine.
Dupuis la visite dans notre pays d’une délégation européenne de haut rang, il y a à peine quelques deux semaines, une pluie de rumeurs s’abat sur notre pays. Les rumeurs sont souvent sciemment entretenues par des esprits délibérément mal intentionnés pour induire en erreur d’innocentes personnes.
Pas de divergences là-dessus, cette délégation européenne était venue discuter avec les autorités mauritaniennes des questions d’émigration.
Selon le communiqué officiel, les discussions avaient tourné exclusivement autour des problèmes d’émigration comme ceux posés aux réfugiés maliens sur les frontières Est de notre pays, ainsi que ceux, plus ardus des émigrés africains en transit par la Mauritanie en direction de l’Europe. Un accord fut signé le jeudi passé sur ces questions entre la partie mauritanienne et la partie européenne.
Marchands de rumeur
Les problèmes posés par ces variétés de migration ne sont pas nouveaux. Ils traînent ici depuis plus de deux décennies. Ils se compliquent avec le temps. Ce genre d’émigration pose effectivement des problèmes d’hébergement provisoire notamment à Nouadhibou, le temps de régler leurs sorts avec leurs pays d’origine et ceux de destination. Difficile de leur imaginer une existence permanente dans notre pays. Non seulement ils ne seraient pas disponibles pour un tel statut mais aussi leurs pays d’origine ne seraient pas si désintéressés à leur sort au point de ne pas leur venir au secours et leur éviter la vie dans des situations de ghettos dans un pays étranger au climat peu accueillant.
Les mêmes questions seraient aussi logiquement posées à des masses plus importantes de migrants retournés éventuellement de force d’Europe et d’ailleurs. Même si on leur promet des situations paradisiaques en Mauritanie, non seulement il serait particulièrement difficile, voire impossible, de le leur faire accepter pour les faire renoncer à leur objectif idéal premier pour lequel ils étaient prêts à sacrifier leur vie.
À supposer que les marchands de rumeurs avaient parfaitement raison quand ils affirment avec une certitude religieuse que l’accord Mauritanie-Europe prévoit une sorte de Kaaba universelle en Mauritanie pour y accueillir les migrants du monde, notamment européens et que les européens seraient prêts à les entretenir indéfiniment pour l’éternité. À moins d’une décennie, nous aurions des dizaines de millions d’étrangers nécessairement détenus dans des ghettos gigantesques et en constante augmentation puisque les raisons qui alimentent le mouvement migratoire partout restent inchangées ou plus probablement en augmentation. Cette situation relève plutôt de l’imaginaire pour la simple raison qu’elle serait intenable pour tous notamment les européens, ses financiers obligés.
Si la Mauritanie, ne serait pas désertique, ne serait pas saharienne, ne serait pas sahélienne….. ne se débattait pas dans de multiples problèmes de survie et d’existence, elle ne laisserait pas des milliers de ses propres jeunes émigrer récemment aux USA!
En réalité l’intérêt européen pour la Mauritanie serait surtout motivé par une inexplicable exception mauritanienne: la providence épargne jusque-là à notre pays la contagion d’instabilité et d’insécurité qui balaie l’ensemble de notre sous-région. Ils nous revient à tous de faire preuve de vigilance et surtout de mesure dans le traitement de toute rumeur susceptible de faire déborder le vase d’une façon irrémédiable, à moins que nous éprouvions une certaine jalousie inexpliquée d’un nombre en constante augmentation de pays africains aux situations catastrophiques et souvent sans perspectives de solutions.
A S Elmoctar