Alors que le ministre de l’Agriculture était en tournée, pour rencontrer les différents acteurs de son secteur dans la wilaya du Gorgol, le personnel et les élèves de l’École Nationale de Formation et de Vulgarisation Agricole (ENFVA) ont déclenché une grève, le 12 janvier, pour exprimer leur ras-le-bol, ont-ils déclaré, de la mauvaise gestion de cette structure qu’on croyait à tout le moins capable de mettre sur le marché national de l’emploi, des techniciens et vulgarisateurs bien formés.
Depuis quatre ans, l’école vit sous une dictature d’un autre temps, un temps qui pèse et lèse, lourdement, les formateurs, les élèves et le personnel qui, au-delà du manque d’appui, ne cessent de souffrir de l’attitude arrogante d’un directeur qui semble oublier que l’institution dont il a la gestion est une structure d’État, donc régie par les lois et règlements en vigueur. Dans son approche martiale, il impose des conditions draconiennes à ses employés, licencie qui il veut, comme il veut ; tout comme il recrute et invente des postes de responsabilité qui n’existent nulle part dans l’organigramme de la structure. Dans son entreprise de sape, il a limogé, manu militari, voici cinq mois, le docteur Seck, vétérinaire de son état, pour des motifs non encore élucidés, avant d’allonger la liste avec cinq autres membres du personnel.
Sans souci de redorer le blason de l’école, il s’arroge, comme en terrain conquis, le droit de priver le personnel des indemnités de logement, des primes d’incitation et, même, de leur congé de vacances. Comme des forçats dans une caserne, les formateurs sont obligés, même s’ils n’ont pas cours, de rester à l’école, pour ne pas être victimes de l’humeur versatile de son premier responsable. Dans la même foulée, les retards de salaire et le bannissement du personnel d’encadrement de toute la stratégie pédagogique en disent long sur la gestion déprimante de l’ENFVA. Avec quatre filières de vingt-quatre modules, qui ne sont assurées que par six formateurs, l’ENFVA peine à assurer toutes les missions pédagogiques et formatrices qui lui sont confiées. Si l’on y ajoute des conditions de travail plus qu’indésirables, la descente aux enfers n’est plus une illusion.
Les grévistes, qui ont remis leurs lettres de doléances aux autorités locales, poursuivront leur mouvement, disent-ils, tant que la situation demeurera en l’état. Entre autres revendications légitimes, figurent la résolution rapide des problèmes de transport, logement et tenues, pour les élèves qui éprouvent des difficultés à rallier l’école, avec seulement 5 000 UM par mois. Il faut noter que depuis la sortie de la première promotion, il y a de cela deux ans, les élèves n’ont obtenu ni attestation, ni diplôme encore moins de stratégie d’intégration, toutes choses qui démontrent, assez clairement, la manifeste mauvaise volonté à respecter les principes mêmes de la formation. Alors que dire des conditions de stage des uns, de recyclage des autres, une impasse voulue et entretenue par l’ancien directeur dont les faits et gestes évoluent, selon les grévistes, dans le sens contraire de la marche normale de l’école. D’ailleurs, quelle légitimité fonde ses actions et ses agissements improductifs ?
Les plaignants comptaient, dans un même élan de solidarité et de défense des droits, sur l’arbitrage du ministre de l’Agriculture qui reçut, tour à tour, les représentants du personnel, des formateurs et des élèves. Mais il a fallu reconnaître l’impuissance de la première autorité du Département, lorsqu’on a vu le directeur lui demander solennellement, avec un toupet inégalé et méprisant, de leur opposer une fin de non-recevoir et de le « débarrasser de tous ces gens », comme un roi- défiant toute la République et banalisant les questions essentielles, au profit de considérations non-dites. Voilà qui n’honore guère notre vaillant ministre, rentré tête basse à Nouakchott, sans aucune solution, laissant, derrière lui, un sentiment largement partagé d’impuissance.
Biry Diagana cp Gorgol