L'Afrique vidée de sa richesse et de sa jeunesse/Mohamed Ahmed Cheikh -Ingénieur de pêche

9 March, 2023 - 08:25

La fin de la deuxième Guerre mondiale marqua la naissance de l’actuel Système des Nations Unies (SNU), acté par la signature de la Charte des Nations unies par les cinq membres permanents du Conseil de sécurité. Objectifs affichés : maintenir la paix et la sécurité internationale, protéger les droits de l'Homme, fournir de l'aide humanitaire et promouvoir le développement, taxé cinquante ans plus tard de durable. La réalisation de ces projets dans l'harmonie s'est heurtée à une farouche concurrence entre l'Est et l'Ouest poussant à l'extrême une effrayante course aux armements, avec ses corollaires de tensions entretenues partout pour écouler la production des industries militaires, épine dorsale de l'économie de certains.

Quant aux droits de l'Homme, ils se sont progressivement dégondés vers la protection des droits des acculturés et des dépravés, auparavant passibles de sanctions religieuses ou plus généralement légales. Une « libération » des mœurs au détriment des droits humains les plus élémentaires, quitte à encourager sciemment la criminalité et porter préjudice aux valeurs religieuses et culturelles d’autrui. En ce qui concerne le développement durable, il est lourdement grevé par l'ampleur de la pollution industrielle qui ne cesse de dégrader et de menacer la durabilité biologique et environnementale. Les limites de ce géant aux pieds d'argile – le SNU inféodé à l'Occident en termes d'orientations stratégiques et de mécanismes d'interventions – apparaissent au grand jour.

Si l'existence de deux blocs idéologiquement apparemment opposés: l’occidental, dirigé par les USA et militairement affilé à l'OTAN, et celui de l'Est, dirigé par l'URSS et militairement affilé au pacte de Varsovie, garantit, quelques décennies durant, l'équilibre de la terreur, celui-ci s’est effondré sous la poussée unipolaire de l'Occident, après la dislocation du pacte de Varsovie et l'adhésion de la plupart de ses membres à l'OTAN qui commande aujourd’hui quasiment sans partage la « sécurité » internationale. Composé de puissances coloniales entretenant avec leurs anciennes colonies des liens culturels, surtout linguistiques, mais plus encore de vassalité économique, le bloc occidental les considère, a contrario de son alter ego de l’Est, en zone d'influence et base arrière de son euphorie économique et de sa suprématie. À ses yeux, l'Afrique n’est qu’un réservoir de richesses où puiser ad libitum, avec ou sans le consentement de ses dirigeants, puisque l'ingérence dans les affaires des pays est devenue pratique récurrente. Les chefs d’État s’y font et défont, de gré ou de force, à la seule volonté de l'unipolarité. Combien de dirigeants africains ont-ils ainsi été physiquement liquidés ou évincés du pouvoir et leur pays respectif plongé dans le chaos, sans que la justice internationale et les droits de l'Homme n’en dénoncent ou condamnent le processus ! Ah, qu’il est assourdissant, le silence des organisations internationales face au déversement des déchets toxiques en Afrique et à l'expérimentation de tout nouveau vaccin sur ses populations !

 

Statu quo méprisant

L'unipolarité dominante a mis fin à toute notion de décence et de tact pour céder place à la « diplomatie » musclée qui justifie toute agression d’un pays par son fameux slogan : « qui n'est pas avec nous est contre nous » ; pour faire régner la peur et troubler les esprits afin qu’ils cèdent au statu quo méprisant fragilisant les pays et pérennisant leur dépendance. Toute négociation avec une autre partie ou un changement de cap dans les relations est jugé rébellion à mater. En Afrique, rares sont les pays maîtres d'eux-mêmes. L'Occident a la main mise sur la destinée de quasiment tous, décide de leurs choix stratégiques et économiques, passant outre et de façon délibérée la question primordiale de l'industrialisation africaine susceptible de produire de la richesse et offrir les opportunités d'emploi à la jeunesse.

Cette emprise rend l'Afrique en panne de décideurs politiques, dignes et engagés à faire profiter les peuples de leurs richesses naturelles détournées par l'extérieur, tandis que ce qu’il en reste à l'intérieur est pillé par les protégés locaux de l’Occident. Voilà comment l'Afrique se retrouve privée d'importantes opportunités de développement et ses jeunes confinés dans la misère et la déception, les forçant à mettre leur vie en péril en fuyant par vagues le Continent à la recherche d'un gagne-pain quelque part en un Occident de plus en plus fermé et hostile.

Le pire est à craindre, dans la mesure où, à l'apogée de son développement technique, celui-là multiplie les laboratoires microbiologiques en certains de ses pays. La tentation de réduire la population mondiale – à commencer en Afrique – pour permettre à l'homme blanc de vivre dans l'opulence, malgré la raréfaction des ressources de la planète, est tout-à-fait à portée de sa main. La menace est bien réelle, sous le couvert des incessants ballets diplomatiques –guerre en Ukraine oblige –qui accapare la scène médiatique. Une chose est en tout cas certaine : ce qui n'a pas été fait en Afrique depuis la fondation du SNU ne sera pas fait en période de guerre. Les bouleversements profonds de la scène internationale minée par des divergences risquent faire basculer l'humanité vers une fin tragique, à moins que la sagesse et la diplomatie constructive ne prennent le dessus sur la violence et la diplomatie agressive actuellement en vogue.