Invité, comme chaque année, à la célébration du ‘ismou (1) à Maata Moulana, notre reporter y est allé de son petit mot, bien dans la note de l’actualité…
Bismillahi Rahmani Rahimi. Il est des évènements qui tendent à nous ramener à l’essentiel. Celui, annuel, du ‘ismou Mohammadi – Paix et Bénédictions sur Lui (PBL) – en est un évidemment de premier ordre et nous en profitons pour nous retrouver, tous ensemble, habitants et sympathisants de Maata Moulana, dans les louanges au Prophète béni de Dieu (PBL). Mais cette joie est ternie, cette année, par des évènements autrement plus malheureux et d’autant plus que le saint nom de Mohammed (PBL) y est étroitement associé.
Ici et là, en effet, c’est à la défense de celui-ci (PBL) qu’on condamne à mort ou exécute, de sang-froid, des gens désarmés qui ont eu le seul tort d’user de leur liberté, sans mesurer celui qu’ils infligeaient à une communauté de plus d’un milliard et demi de personnes (2), pour exprimer des idées contraires à celle que nous nous faisons du Prophète (PBL). N’avons-nous donc pas d’autres moyens, pour imposer le respect envers le plus respectable des hommes (PBL), que de couper la parole et la vie ?
Il est des évènements qui tendent à nous ramener à l’essentiel. Etait-elle meilleure que la nôtre, cette société polythéiste des Mecquois qui laissa, douze années, prêcher Mohammed (PBL), avant de se résoudre à l’éliminer ? Sont-ils si dangereux, ces détracteurs actuels du prophète (PBL) qui regardent le monde avec des verres déformants, par le petit bout de la lorgnette ? Leur vision étriquée doit-elle faire de nous des loups sanguinaires ? S’ils croient que la fin justifie les moyens (3), devons-nous adhérer à cette perversion si blessante au cœur du Prophète (PBL) ? Y perdre l’esprit même de notre religion ?
« Maintenant, ils vont réfléchir à deux fois, avant d’insulter notre foi », me confiait, ce matin, un membre même de la communauté de Maata Moulana. Oui, c’est vrai, nous faisons peur, aujourd’hui. Assez, en tout cas, pour que la moindre mosquée soit désormais perçue, en terre non-musulmane, comme un foyer potentiel de terreur, et notre douce Mauritanie, ravalée au rang de terre inhospitalière. Au point que des familles musulmanes résidant en France s’inquiètent même de voir leurs fils désireux de venir étudier à Maata Moulana. Un comble, assurément, pour qui connaît la célèbre cité éducative des Ehel Michri.
Il est des évènements qui tendent à nous ramener à l’essentiel. Comment le voisin juif du prophète (PBL) qui n’eut longtemps de cesse de déverser ses ordures sur le chemin de celui-ci (PBL) se convertit-il à l’islam ? Mohammed (PBL) refusa-t-il jamais de laisser s’exprimer le pire de ses ennemis ? N’a-t-il pas, au contraire, élevé le respect de la parole au plus haut point de l’humanité, conformément au don qu’en fit Dieu à Adama (PBL) et, par lui, à tous les hommes, croyants et incroyants ?
Il y a bien plus. Est-ce la force des armes qui plaça le prophète (PBL) à la direction de Médine ? Ou celle de son comportement, humainement exemplaire ? De quelles nobles missions le musulman se voit-il investi, envers son voisin incroyant (4) ? Qu’est-ce qui distinguera un ancien élève de Maata Moulana, aux yeux d’une assemblée de non-musulmans ? Saura-t-il, macha Allahou, réveiller, en eux, l’ardent désir de se souvenir de leur origine ; la nôtre à tous : « inna lillahi oua inna ileyhi raji’oune » (5) ? De s’y délivrer, enfin pacifié, de toutes leurs peurs ?
Oui, il est des évènements qui tendent à nous ramener à l’essentiel. Nous rappellent à cet ordre de priorités qui place le respect de la vie d’autrui, de sa différence, de sa capacité à changer, au cœur même de nos propres convictions. Tenus que nous sommes de porter celles-ci à leur plus haute expression, nous sommes obligés de répondre au mal par le bien. Si nous voulons réellement honorer notre Prophète (PBL), il nous faut vivre et faire vivre son esprit. Ce n’est pas un choix, mais le pivot même de notre foi. Et Dieu, certes, est Le Savant.
Tawfiq Mansour
NOTES
(1) : En islam, al ‘ismou, le nom, est donné, à l’enfant, sept jours après sa naissance. Une semaine après le Maouloud qui fête, chaque année, celle du Prophète (PBL), c’est l’occasion, à Maata Moulana, de joyeuses retrouvailles…
(2) : quasiment tous – mais si variablement… – meurtris par trois siècles de colonialisme occidental et les soubresauts mondialistes, voire néocoloniaux, des dernières cinquante années…
(3) : C’est probablement le pire des virus inoculés au monde.
(4) : Le droit du voisin, en islam, n’est défini que par le devoir du musulman envers lui : aide alimentaire et financière, soutien dans la maladie et le deuil, etc. Avec cette précision : « le polythéiste a au moins un droit, celui du voisin » ; particulièrement significative en ce qu’elle fut énoncée, par le prophète (PBL), en plein conflit avec les polythéistes…
(5) : « De Dieu nous venons et c’est à Lui que nous allons », Saint Coran II, 156.