L’impact des mauvaises élections sur la gouvernance dans notre pays/par Djibah

19 May, 2022 - 02:46

Nous avons vu à travers le monde, et sur notre propre continent, combien de pays, initialement stables, plus ou moins bien lotis (démographie, niveau d’éducation, ressources économiques), sont partis à la dérive lorsque leurs dirigeants ont décidé de s’approprier les institutions au détriment de l’intérêt général et du droit universel des citoyens.

Aucun de ces Etats n’a pu préserver ne serait-ce qu’un minimum du legs colonial, souvent modeste, mais institutionnellement valable comme cadre d’organisation et d’administration pour avancer, même lentement, sur la voie du développement.

Notre pays, comme bien d’autres, encore que moins bien loti, a vécu et continue de vivre cette amère expérience. En effet, depuis plusieurs décennies, nous subissons, impuissants, les effets de ce désordre institutionnel systématique que nous savons mortel à long terme. Mais certains dirigeants politiques et certains acteurs essentiels (souvent officiers supérieurs, cadres de l’administration publique, hommes d’affaires, notables sociaux…) semblent pouvoir bien s’en accommoder tant que les dividendes qu’ils en tirent leur paraissent satisfaisants.

Et comme ils tiennent l’ensemble des leviers de la décision publique, le gouvernement mauritanien navigue à vue, avec, pour seul objectifs, la préservation de quelques privilèges économiques (parfois durables), politiques ou sociaux (plutôt éphémères ou dérisoires) au profit d’un nombre très restreint de groupes ou de personnes.

L’état de délabrement général du pays (cohésion nationale, institutions, infrastructures, secteurs économiques et financiers, secteurs sociaux, sécurité… etc.) en constitue une parfaite illustration.

Depuis le début des années 1990 et l’introduction de ce qu’on a appelé « Processus Démocratique » (nom affectueux que mon très cher ami, Feu Habib, dans un état d’inspiration prémonitoire digne de lui, donna à un chien qui l’accueillait familièrement au siège du journal, et qui était déjà très affecté, malgré son jeune âge, par les effets de la malnutrition et du manque d’hygiène), nos dirigeants ont dû naturellement se soumettre au simulacre d’élections que nous connaissons depuis.

Fraude massive

Mais dès la première élection présidentielle, ils découvrent, non sans surprise, que malgré tous les atouts qu’ils s’étaient offerts et la fraude massive dont ils avaient abusé, le jeu n’était très pas facile et  les exposait d’ailleurs à des risques bien réels...

Alors, incapable de gagner une élection, ne voulant pas quitter le pouvoir et ne pouvant pas reculer sur les engagements de «démocratisation » pris auprès d’une puissance étrangère semble-t-il, mais qui permettaient surtout de discipliner une contestation interne menaçante, nos braves dirigeants n’avaient d’autre choix que le contrôle permanent des scrutins.

Pour ce faire il fallait, sans complexe ni pudeur, commencer à monnayer ouvertement la rente publique dans le but de soumettre suffisamment d’agents tribaux, villageois et communautaires prêts à tout pour satisfaire leurs maitres et gagner leurs pitances.

On connait la suite…

A mon humble avis, maintenant que le pouvoir en place peut se permettre d’organiser des élections crédibles et sereines, nous pourrons sortir définitivement de cette crise de légitimité, consacrer nos ressources à notre développement, laisser nos citoyens envisager librement leur survie et nous doter enfin d’institutions capables de nous organiser et de nous protéger.

Ayant acquis une expérience relative et peu glorieuse de notre façon de « faire » les élections, j’ai pensé apporter, ci-dessous, une petite contribution que j’espère susceptible d’aider certains participants à la concertation politique en cours.

Djibah

Le 24/04/2022