L’objet de mon propos était, en partant d’un constat( tous les enfants mauritaniens commencent leur aventure scolaire par l’apprentissage du Coran, donc de l’alphabet arabe!) de réfléchir sur les raisons pédagogiques de l’échec scolaire. Les considérations idéologiques ou les combats d’arrière-garde ou d’avant-garde ne m’intéressent point. Je m’appuie sur mon expérience de praticien des langues et de leur enseignement et sur la nécessité de faire preuve de pragmatisme pour le bien commun de nos chers enfants ou petits-enfants. Pourquoi l’alphabet arabe ? Parce qu’il est plus familier à nos jeunes têtes que le latin. Ce n’est pas parce que ( dans le cadre de l’UNESCO ), on a décidé à Bamako, en 1966, de transcrire les langues nationales en caractères latins que cela doit rester éternellement figé, tel quel. C’était une décision politique comme l’écriture d’une constitution ; ces choses changent, messieurs, ne nous enfermons pas dans le fétichisme et l’identitémania à l’instar de ceux qui ont écrit le Manifeste de 86 ou les commanditaires de la tentative de coup d’état de 1987 et souvenons-nous de l’aphorisme célèbre de Senghor « …l’émotion est négre comme la raison est hellène. »
D’autre part, si les enfants beydanes étaient obligés d’apprendre les langues nationales, ne seraient-ils pas plus judicieux de les leur enseigner en utilisant l’alphabet arabe? Parce que à l’horizon de mon idée pointe le vœu ardent d’une réconciliation nationale sur les fondements de des deux derniers dogmes de notre devise nationale « …fraternité et justice » qui sont d’ailleurs des concepts clefs de la philosophie morale et religieuse de l’Islam. Pour ceux qui s’étonnent que l’on ait convoqué le Coran dans le débat (outre le fait béant que ce dernier est un livre-langue nationale pour ces lecteurs assidus en arabe ou en traduction !), n’oublions pas que notre République est islamique dans son intention première et que notre culture quotidienne est largement arabo-islamique. C’est ce substrat commun qui a fait que les iraniens ont adopté le caractère arabe pour transcrire le persan, de même que les locuteurs urdu (Pakistanais et consorts !) D’ailleurs, personne ne dit que nos jeunes têtes ne retrouveraient pas le caractère latin au collège quand ils commenceront à apprendre les langues indo-européennes selon le schéma qui me trotte dans la tête. Beaucoup de mal a été fait en Mauritanie au nom d’idéologies scabreuses ! Il s’agit d’être dans le dépassement et non vivre dans le ressentiment, l’aigreur et la haine. L’exemple doit être Mandela et l’expérience sud-africaine, même si on est bien conscient que tout n’est pas parfait dans ce pays. Cette transcription latine qu’on chérit tant n’est effective nulle part du moment que ces langues sont exclusivement orales et leur écriture et enseignement demandent une volonté politique décisive qui tarde à se manifester. Nous attendons tous un Etat- nation Peulh , Soninko, Wolof, bambara… Ne vivons pas de chimères !"
Let’s be real! .
Moktar Sakho, Professeur des universités américaines
Il y a quelques semaines, un ancien fonctionnaire devenu conservateur de bibliothèque, Ahmed Mahmoud ould Mohamed, dit Gmal, publiait sur Facebook un post au titre évocateur : « La mémoire en décharge : quand les archives nationales finissent dans les ruelles de Nouakchott ».