Comme à son habitude tous les soirs, il est sorti de chez lui vers 21 heures pour aller prier à la mosquée du quartier où les fidèles l’apprécient à sa juste valeur. Sur le chemin du retour, il achète du couscous pour le diner de sa famille et, tenant le sachet dans une main, égrenant son chapelet dans l’autre, le voici à marcher d’un pas lent, tranquille. Probablement à mille milles de seulement imaginer qu’il puisse rencontrer, sur son chemin, trois lascars empiffrés de substances psychotropes… qui abrégeront sa vie pour quelques centaines d’ouguiyas et un petit téléphone.
Le meurtre, perpétré de sang froid à Toujounine dans la soirée du jeudi 3 Juin dernier, du professeur Mohamed Salem ould Elouma, par une bande de jeunes voyous repose encore une fois le problème de l’insécurité à Nouakchott. Depuis quelques semaines, il ne se passe pratiquement aucun jour sans que des agressions à main armée, viols et/ou meurtres ne soient déplorés dans les différents quartiers de notre capitale. Malgré la multiplication des commissariats de police, les rondes des gardes et des gendarmes, la situation n’a cessé d’empirer. Inquiets, les citoyens exigent plus de rigueur dans la traque des bandits et une application beaucoup plus stricte des sentences judiciaires. C’est en effet secret de Polichinelle que la justice fait parfois preuve de laxisme et que nos prisons, au lieu d’être des centres de réhabilitation comme on en voit partout dans le monde, sont devenues des lieux d’endurcissement criminel où, confronté à une réalité sans pitié, le délinquant s’aguerrit, pour devenir plus dangereux encore une fois dehors. D’autres n’hésitent plus à réclamer ouvertement le retour à la peine de mort, conformément à la Chari’a. Oui, il y a quelque chose de pourri en notre république islamique. Mais ce n’est pas en éliminant l’effet qu’on supprime la cause. Il va nous falloir critiquer en profondeur et très lucidement nos schémas d’intégration dans la modernité…
Ahmed ould Cheikh