Le duel médiatique et judiciaire né du placement en détention préventive il y a une semaine, des anciens actionnaires de la Nouvelle Banque de Mauritanie (NBM), Abdel Baghy Ahmed Bouha et Limam Ahmed Benne, continue.
Une affaire dans laquelle la Banque Centrale de Mauritanie (BCM) formule de graves accusations contre les personnes incarcérées, alors que le collectif des avocats de la défense dénonce un jeu d’ombre de l’institution nationale, un écran de fumée visant à cacher le « scandale » des graves irrégularités qui ont caractérisé l’opération de cession de la NBM au groupe canadien « Westbridge » avec l’implication des dirigeants de la BCM.
Dans une mise point publiée il y a quelques jours, la banque centrale a énoncé les infractions qui motivent la plainte contre les anciens actionnaires de la NBM, notamment « la création de sociétés fictives».
Le collectif des avocats de la défense réfute cette dernière accusation et parle de « sociétés de portage, qui relèvent d’une pratique parfaitement légale » nécessaire à «aux montages financiers dans le cadre de certaines opérations complexes.
La BCM était au courant de l’existence de ces sociétés de portage et elles figurent dans le rapport signé par la Direction Générale du Contrôle des Banques en date du 20 avril 2020 ».
Au-delà du rejet des accusations de la BCM, le collectif des avocats de la défense des anciens actionnaires de la NBM contre-attaque en rappelant que le contrat de cession de la banque, négociée de bout en bout par la BCM «impose aux acheteurs de payer 4 milliards de MRO dès le premier mois de la signature et les 8 milliards de MRO restants au plus tard en décembre 2020.
Malgré plusieurs moratoires et reports d’échéances de paiement, les acheteurs n’ont toujours payé aucune ouguiya de leur engagement, tout en continuant à être les propriétaires légaux de la NBM… en dépit de ce défaut de paiement gravissime».
En réalité « le contrat par lequel les actionnaires de la NBM ont cédé la totalité de leur banque à une entité qui s’affirme un établissement bancaire de droit canadien (WEstbridge) a été de bout en bout une affaire des dirigeants de la BCM, contrairement à ce qu’affirment ses avocats. Ce sont les dirigeants de la BCM qui ont été seuls en contact avec les supposés dirigeants de Westbridge, avec lesquels ils ont négocié. C’est à la BCM qu’ils ont soumis un plan de redressem ent en tant qu’acheteurs, le 05 février 2020».
Ainsi « l’implication de la BCM dans cette ténébreuse affaire est telle que ce sont ses propres agents qui ont rédigé le contrat avec les acheteurs- lesquels ne se sont même pas présentés à Nouakchott pour la signature. C’est la BCM qui s’est chargée de transmettre à Westbridge le contrat de cession et c’est son ancien directeur de la supervision qui en fera le dépôt par devant le notaire ».
Une banque cédée sans aucune garantie de l’acheteur, autre que sa parole, voilà ce qui explique aujourd’hui «le harcèlement » judiciaire contre les anciens actionnaires de la NBM, concluent les avocats.
La prévarication et la gabegie ont-elles encore de beaux jours devant elles ? Jusqu’à quand le détournement des deniers publics restera-t-il le sport favori de nos (ir)responsables ? La lutte contre de telles pratiques que tout gouvernement chante à tue-tête ne serait-elle qu’un vain mot ?