Le Calame : Vous venez d’effectuer une mission de quatre jours dans les capitales régionales des quatre régions Sud du pays. Quel était l’objet de ce déplacement ? Qu’en attend le Parlement ? Allez-vous effectuer des missions similaires dans les autres régions ?
Abderrahmane N’Gaidé : Permettez-moi d’abord de remercier la direction du journal « Le Calame » de m’avoir donné l’opportunité de m’exprimer dans ses colonnes. Je suis Abderrahmane Hamath N’Gaidé, député de la moughataa de Boghé et membre de la Coordination des députés de la Vallée (CDV) issus de différents partis politiques représentés au Parlement. Cette Coordination a décidé d’effectuer, du 24 au 29 Août 2020, une mission dans les quatre wilayas du fleuve : Trarza, Brakna, Gorgol et Guidimakha. L’objectif de ce déplacement était de s’enquérir des problèmes que vivent les populations, d’une part, mais aussi d’expliquer le rôle et le travail des députés, comme, entre autres, l’enquête parlementaire de six mois et les résultats auxquels elle a abouti, d’autre part.
Je rappelle que l’Assemblée nationale et ses groupes parlementaires encouragent les honorables députés à s’enquérir régulièrement des problèmes des populations de leur circonscription respective pour aider le gouvernement à y trouver des solutions. Il leur est demandé de mettre l’accent sur les grandes zones spécifiques de développement du territoire national, notamment celles du littoral, des oasis, du fleuve, de celles agro pastorale et minière.
- De telles missions pareilles sont mises à profit par les populations pour exposer leurs multiples préoccupations. Pouvez-vous nous dire succinctement sur quoi ont porté leurs interventions ?
- À l’arrivée en chaque wilaya, nous entamons une visite de courtoisie au wali, puis une réunion avec les maires de la région et le conseil régional, en plus bien sûr des députés. Nous consacrons l’après-midi à la Société civile et aux groupements professionnels, pour conclure par une ultime réunion avec les services techniques et le wali. Il faut souligner l’importance qu’ont accordée tous les acteurs et populations des régions visitées à la mission, avec des réunions parfois terminées à une heure du matin.
L’engouement était tel que certaines populations n’ont pas hésité à souligner le caractère totalement inédit, en Mauritanie, de ce que des parlementaires en viennent à se déplacer pour les écouter et s’enquérir de leurs conditions de vie. Nous pouvons signaler que les interventions ont porté essentiellement sur l’état-civil, le foncier, l’accès aux services de base (eau, électricité, éducation, crédits, etc.)
- Au cours des différentes réunions, il a donc été notamment question des problèmes d’enrôlement (état-civil), « confiscations » de terres (avec le cas récent de Dar El Barka), passif humanitaire, chômage des jeunes, double nationalité pour leur diaspora, rapports peu cordiaux avec l’administration territoriale... Quelles réponses la mission leur a-t-elle donné sur ces sujets ?
- Comme je l’ai dit tantôt, la mission avait pour but d’écouter les populations et de relayer leurs doléances au gouvernement. Nous en ferons l’économie aux autres parlementaires avant de porter le message à celui-ci. Nous en discuterons avec le Premier ministre et les autres membres de son gouvernement afin d’y apporter des solutions. La Coordination mettra l’accent sur l’identification, l’amélioration des procédures d’enrôlement et le fonctionnement matériel des centres, pour l’état-civil ; la révision de la loi foncière et domaniale de 1983, afin de l’adapter au nouveau contexte mondial et local, en préservant le patrimoine vital des villageois, en aménageant leur potentiel de terres à leur profit selon leur consentement ; et en protégeant l’environnement, tout en s’inspirant de certaines propositions appliquées dans les pays voisins, Elle œuvrera également à l’amélioration de la fonction de maire et du conseil municipal : c’est extrêmement important dans un pays qui met en œuvre une politique de décentralisation.
- Pour régler les questions de l’enrôlement, une commission avait été mise en place depuis quelques années. Présidée par un chargé de mission à la présidence de la République, elle avait fait quelques propositions au Palais mais il reste que peu de dossiers ont été « solutionnés ». Qu’entendent faire les représentants du peuple pour les faire avancer et en finir avec cet enrôlement lancé il y a près d’une décennie ?
- L’état-civil et ses prestations aux populations ont été décriés partout dans les wilayas visitées. Parmi les problèmes évoqués, les acteurs régionaux ont déploré le manque d’informations des populations au sujet des documents à fournir, notamment celles en situation d’enclavement et donc obligées à des voyages coûteux, parfois inutiles, vers les centres d’enrôlement. Sur ce point précis, la Coordination ne ménagera aucun effort pour proposer des solutions à des questions aussi fondamentales que l’identification des personnes et l’amélioration des procédures d’enrôlement, pour le bon fonctionnement des centres d’état-civil.
- On imagine que vous allez concocter un rapport de mission qui pourrait être remis au gouvernement. Pouvez-vous assurer les populations que leurs doléances, si souvent dormant en tiroirs, vont en sortir et connaître enfin un début de solutions ?
- La CDV s’engage à porter les doléances des populations aux secteurs concernés du Gouvernement et à plaider pour leurs solutions. C’est un engagement que nous avons pris et nous osons compter sur la disposition du président de la République et du gouvernement à l’honorer.
Propos recueillis par Dalay Lam