Mohamed Mahmoud Ould Mah est parti. Sa disparition m’a beaucoup attristé connaissant l’homme depuis cinquante ans. La première fois que je l’ai rencontré c’était en 1971, alors jeune étudiant et militant du mouvement étudiant à Paris. Il m’a tout de suite impressionné par sa détermination et sa forte opposition à notre mouvement de l’époque, le Mouvement National Démocratique. Il défendait le PPM et des idées plutôt nationalistes arabes et combattait nos thèses et positions. Pour nous étudiants, c’était l’adversaire le plus actif à Paris. Mais il marquait par sa force de caractère et sa présence partout. Notre mouvement, qui était majoritaire, le considérait l’adversaire le plus résolu vu ses relations avec le régime, ses thèses et son activisme. Mais nos rapports étaient distants.
Les choses évoluent et c’est à partir de 1974 comme Président de l’Union Générale des Etudiants et Stagiaires Mauritaniens que j’ai eu à me confronter à lui directement. Mais cette confrontation s’est ensuite apaisée tendant vers une espèce d’entente tacite où chacun de nous respectait les positions de l’autre. Avec les appréciables réformes entreprises par le Président Mokhtar, les divergences se réduisaient. Même si elles demeuraient sur des questions importantes.
À partir de 1976, le rapprochement s’accélère. On commençait à se voir fréquemment et même à coordonner et ce jusqu’à la tenue Congrès de la Jeunesse où il nous apportait un appui important à l’élection du Conseil Supérieur des Jeunes.
Après le coup d’état de 1978, nos positions se rapprochent davantage. On
s’est revu fin 1983 après mon retour de détention.
Une autre divergence apparait fin 1986 après la constitution des listes municipales de la ville de Nouakchott. Quand je suis devenu directeur de la campagne de la Liste bleue et que lui a présenté sa propre liste : la Liste blanche. Je me rappelle, un matin, au tout début de la campagne,on se rencontra par hasard dans les bureaux du District de Nouakchott venant régler des questions liées à l’organisation des marches. Il me taquina, disant : « je te félicite pour ton appartenance au FIT ». Je n’avais pas compris le terme. Il me dit : « la Liste Bleue est un Front Inter-Tribal ».Je commençais à lui expliquer que c’est plutôt « une liste unitaire, consensuelle regroupant toutes les entités ». Il me dit : « vous êtes un vrai FIT : un Front inter-tropical, donc du vent.Je vais vous battre. Je répliquais mais déjà il a quitté.De fait malgré sa victoire, la Liste bleue ne put élire un Maire.
Durant ces dernières décennies, on était toujours en contact régulier partageant beaucoup de positions communes surtout durant les douze dernièresannées. On se rendait des visites réciproques.
Je retiens de Mohamed Mahmoud Ould Mah l’image d’un homme de foi, attaché à ses positions claires et sans équivoques. Ce qui est rare parmi notre élite, une élite aux positions souvent fluctuantes. C’était un homme de convictions mais un homme ouvert, toujours prêt aux débats et aux échanges.
Je ne peux qu’exprimer ma tristesse pour la disparition d’une personnalité que j’ai puapprécier avec le temps.
Qu’Allah l’accueille dans son Paradis.
Je saisis l’occasion pour présenter mes condoléancesattristées à sa famille et à tous ses proches.
Tijani Mohamed El Kerim