Depuis quelques jours, une rumeur insistante fait état d’un accord entre l’opposition regroupée au sein du FNDU et le pouvoir, pour décrisper une situation politique tendue depuis plus de six ans. Les négociations seraient à un stade avancé entre les deux camps. L’accord prévoirait une dissolution de l’Assemblée nationale, des élections législatives et municipales anticipées et un amendement constitutionnel visant la suppression d’un Sénat sur lequel personne ne verserait une larme, tant la chambre haute du Parlement paraît superflue, dans le contexte mauritanien où l’Assemblée suffit amplement à « applaudir » les lois. Vous aurez sans doute remarqué que tout le paragraphe est au conditionnel, puisque rien ne permet de dire, à l’heure qu’il est, qu’une éclaircie de quelque nature pointe à l’horizon. Qui a, d’ailleurs, la fâcheuse habitude de paraître de plus en plus bouché. Les exemples tunisien, égyptien, libyen et, plus récemment, burkinabé, n’ont apparemment pas fait réfléchir nos képis étoilés. « La Tunisie n’est pas la Libye », disait Kadhafi, après la Révolution de jasmin qui avait remporté Ben Ali. Quelques mois plus tard, c’était à son tour d’être emporté par une bourrasque dont les effets risquent, si l’on n’y prend garde, de déstabiliser, non seulement toute l’Afrique du Nord mais aussi tout le Sahara et le Sahel.
Ould Abdel Aziz ira-t-il jusqu’à paraphraser celui qui, alors président de l’Union Africaine, avait pris fait et cause pour le putsch mauritanien de 2008 ? Certes, le Burkina n’est pas la Mauritanie mais la ressemblance est quand même frappante. Aziz et Compaoré sont tous deux d’anciens militaires arrivés au pouvoir par coups d’Etat. Reconvertis en « démocrates », ils ont gagné des élections présidentielles taillées sur mesure, leur parti respectif régnant en maître sur la scène politique. Leurs clans ont fait main basse sur les maigres économies de leurs pauvres pays et ceux, parmi leurs opposants ou leur presse, qui refusent de courber l’échine n’ont pas voix au chapitre ; sont même diabolisés. Les deux pays caracolent en tête des nations les plus corrompues du monde et leur indice de développement humain ferait honte à la Somalie ou à la Syrie, pourtant en guerre.
Oui, la Mauritanie n’est pas le Burkina. Pas encore. Mais le vent souffle, ici et là. Que lui faut-il pour déraciner les arbres qu’on croit – ou qui se croient – les mieux enracinés ? Comment font ceux-là pour se prémunir, efficacement, contre ses bourrasques ? Voilà des questions très universellement saharo-sahéliennes, par les temps qui courent…
Ahmed Ould Cheikh