Il y a quelques jours, une octogénaire, pieuse et peu intéressée à la vie d’ici-bas décédait à Nouakchott puis inhumée le même jour à 111 kilomètres de là, à Tin Ghadej son lieu de naissance. Malheureusement, ni les habitants de Tin Ghadej ni ceux de Nouakchott ne peuvent apprécier la défunte à sa juste valeur. Ce sont les Méderdrois qui sont les plus touchés par la disparition de cette grande dame qui leur consacra sa carrière et sa vie…
L’enfant que j’étais à la fin des années soixante au beau village de Mederdra n’a jamais oublié la belle mauresque qui approchait la quarantaine, assise à son bureau de la PMI qui consultait des dizaines de femmes et d’enfants tout au long de la journée. Fait rare à l’époque, elle parlait et rédigeait un français métropolitain. Elle plaisantait avec tout le monde. Elle se donnait à son travail toujours à cœur de joie, avec compétence et responsabilité. Femmes et les enfants de la ville et ses environs se ruaient à la PMI pour être consultés et soignés par « Maman » comme on l’appelait. Ses subordonnées, feues Zeinabou Baba Samaké, Fatimetou mint Breihim, Naha mint Chedad, notamment, avaient, elles aussi, le sens de la responsabilité et de la rigueur, comme tout le reste du personnel du dispensaire, tels feus Sidi Niang et Jiddou Ould Yargueit. C’était la belle époque en ce cher bled. Ces infirmiers et femmes de salles passaient leurs journées à panser les plaies, injecter et accoucher en douceur les femmes.
Maman, feue Khadaja mint Maouloud, se déplaçait de campement en campement et restait éveillée des nuits entières pour sauver des vies. Elle distribuait de grandes quantités de médicaments aux pauvres et nécessiteux. On pouvait la déranger à n’importe quel moment pour une urgence ou n’importe quel mal, sans qu’elle n’en parût jamais indisposée. Ouverte à de nombreux hôtes et visiteurs, sa maison était le lieu de rencontre des importantes personnalités de la zone.
Feue Khadaja faisait partie de la première promotion de filles qui composa les bancs de Boutilimitt au début des années cinquante. Une fois son certificat d’études primaires en main, elle partit les compléter au Sénégal pour en revenir avec un diplôme de sage-femme et se retrouver postée à Mederdra en 1962. Les Iguidiens l’adoptèrent aussitôt bien que leur culture intègre difficilement les intrus qu’on appelle localement « Itiegui » Elle y resta jusqu'à l’année précédant sa mort, sa fille El Amiriya jugeant préférable de l’emmener à Nouakchott. Son souvenir restera gravé dans les mémoires.
À Mrabih Rabbou, Tourad, Mouleika, El Amiriya, à tous les Méderdrois et à tous ceux qui connurent Maman, nous adressons nos sincères condoléances. Nous prions Allah de l’accepter en Son saint paradis, amine.
Mosy