Trois questions à Oumar Ould Yali, mandataire du candidat Birame Dah Abeid: «Notre candidat a préféré le dialogue à la confrontation»

11 July, 2019 - 16:37

Le Calame: Le candidat Birame vient de rencontrer une délégation de l’UPR. Dans quel cadre entre cette démarche ?

Oumar Ould Yali : Merci pour le Calame. Avant de répondre, je voudrais quand même rappeler le contexte de cette démarche qui intervient en moment de crise politique accentuée par l’annonce irrégulière des résultats de la dernière présidentielle en ce sens que l’un des candidats, en totale inadéquation avec la loi, a annoncé sa victoire alors que la CENI n’a même pas encore fini le dépouillement de plusieurs bureaux électoraux et que toutes les tendances et les rassemblements populaires organisés au cours de la campagne démontraient l’impossibilité d’éviter un second tour. La validation du conseil constitutionnel de ces résultats a davantage mouillé l’argile et a conduit aux manifestations populaires contestant ces fameux résultats. C’est dans ce cadre que le candidat Birame Dah Abeid a pris l’initiative d’appeler à l’apaisement et de demander l’engagement de concertations autour de certains problèmes qui sont pendants depuis les indépendances à nos jours puisque tous les pouvoirs et toutes les oppositions ont été incapables de les résoudre préférant la confrontation à un dialogue véritablement inclusif qui prenne en compte les préoccupations et les attentes de tous les Mauritaniens. La rencontre avec Birame Dah doit être suivie d’autres avec les trois autres candidats et des préalables pour assainir la situation et calmer les esprits doivent être envisagés comme le retrait des troupes militaires des quartiers populaires, la libération de tous les détenus arrêtés entre autres mesures d’apaisement.

 

Pensez vous que le gouvernement est de bonne foi ou que c’est juste une énième manœuvre pour vous neutraliser ?

 Nous n’avons aucun préjugé sur quiconque. Ce que nous savons est que le pays vit une situation particulièrement grave où il évolue depuis quelques temps. Il est temps de cesser de faire du surplace. Il ya des problèmes, il faut les régler et cela d’autant plus que dans le discours du président déclaré vainqueur certains ressentent un espoir et une volonté de régler ces problèmes pendants comme la question des inégalités sociales, du passif humanitaire, de l’école, de la santé, de la bonne gouvernance, de la justice, de l’ancrage de la démocratie et de son enracinement, du chômage, du partage équitable des ressources nationales et de leur bonne gestion, du respect des libertés individuelles et collectives, de la promotion des droits de l’homme. Bref, beaucoup du pain sur la planche pour le nouveau président qui nécessite un environnement apaisé et une synergie de tous les efforts pour commencer rapidement les chantiers. On n’a pas le droit de douter de la bonne foi de personne ni de considérer ses promesses de campagne comme des discours démagogiques. Il faut attendre et voir. Ce qui est certain est qu’avec l’initiative du président Birame et de ses pairs (les autres candidats) et leur disposition à dialoguer, la balle est dans le camp du pouvoir.

 

En cas de dialogue, quels sont selon vous les thématiques de celui-ci ?

Le dialogue ne doit pas être que politique. Mais il doit aussi être social, économique, culturel et même autour de la cohabitation et sur les droits de l’homme. Tous ces aspects doivent être pris en compte. Il ya urgence que toutes les populations puissent accéder à des services de base comme l’eau, les soins et les prestations scolaires de qualité. Il faut que tous les Mauritaniens se concertent autour des voies et moyens d’assurer cela. Il ya urgence que le processus démocratique marche normalement à travers l’organisation d’élections transparentes et justes. Pour cela, il faut l’établissement d’un fichier électoral fiable et la mise en place de structures d’arbitrage et de pilotage neutres et indépendantes consensuelles en plus d’autres aménagements qui garantissent la promotion de la démocratie comme l’interdiction formelle de l’usage des moyens de l’Etat en politique et l’application de la loi de l’incompatibilité pour ‘’assagir’’ et tenir à l’écart les hauts responsables de l’Etat en période électorale. Il ya urgence que les mauritaniens se réconcilient et apaisent leur cœur. Il ya urgence de promouvoir la justice sociale. Il ya urgence d’assainir l’économie nationale et de procéder aux audits nécessaires des grandes sociétés nationales. Il ya urgence de se concerter sur comment vont être gérer les énormes potentialités et richesses dont dispose le pays pour que tous les citoyens en profitent égalitairement en termes de revenus et en termes d’administration. Il ya urgence de se concerter autour de notre diversité culturelle qui devrait constituer une grande richesse. Il ya urgence de respecter les conventions, les traités, les chartes et les lois nationales que nous avons sciemment ratifiées d’une part et promulguées, d’autre part. Tout cela pour dire que le dialogue s’il doit être organisé doit vraiment prendre en compte les problématiques de fond dont souffre le pays depuis des décennies.  

Propos recueillis par Sneiba El Kory