Analyse sommaire du scrutin électoral du 22 juin 2019/Par Lebatt Ould Eytah Directeur Général Radio Kobenni

2 July, 2019 - 10:08

La campagne électorale sur laquelle les rideaux viennent de tomber a été une campagne respectueuse des valeurs de la compétition démocratique et, à quelques détails près, pour être précis, pacifique.

L’utilisation ostentatoire des moyens, qui jette  souvent le doute sur la transparence des élections, n’a pas été remarquée chez les différents candidats. Seuls les soutiens des hommes d’affaires, des fonctionnaires et des notabilités tribales, ont été enregistrés, notamment au profit du candidat du pouvoir.

Ce scrutin a, cependant, introduit une donne d’autant plus inattendue qu’elle bouleverse bien des certitudes. Les certitudes qui fondaient justement les approches politiques, économiques et sécuritaires du pays et de ses partenaires au développement.

Le vote religieux n’était, en effet, pas au rendez-vous, ni là où on l’attendait.

Cette donne a démontré que le danger de l’Islamisme radical en Mauritanie n’est pas tel qu’on l’appréhendait et tel qu’on le craignait. Le vote tribal à Arafat, tenue par les Islamistes de Tawassoul en faveur de Ghazouani, au moment où le parti soutient officiellement Ould Boubacar, en est une preuve indiscutable, parmi tant d’autres éléments probants. 

Le vote ethnique soulevé, quant à lui par certains analystes afin d’entacher le déroulement du scrutin, n’est pas un vote raciste, ni communautaire au sens communautariste du terme. Il apparait, à la lumière d’un faisceau d’éléments concordants, que le vote ethnique dont il s’est agi, n’est qu’une réponse, somme toute naturelle, à la marginalisation et à l’exclusion de certaines franges de la population.

Le vote des pauvres, qui a profité à Biram et qui a été un pan important de ce scrutin, fut tout simplement une sanction du pouvoir qui a utilisé ce thème à des fins électoralistes sans renvoyer l’ascenseur à ceux au nom desquels le slogan porteur a été élaboré.

Ce scrutin, par ailleurs, a démontré que, sur la scène politique mauritanienne, il n’y a pas d’opposition et de majorité telles qu’elles existent dans les traditions républicaines. Ce que nous avons ici est un fonctionnement où les alliances se font et se défont sur fond de trames politiques et suivant des  intérêts parfois très ponctuels.

A la lumière de ces éléments, le président élu, Mohamed Ould Ghazouani, doit tenir compte du fait qu’il n’a été élu qu’à une majorité simple, un peu plus de 52 %.

Dans les grandes démocraties, la légitimité d’un élu est toujours proportionnelle au taux auquel il a été élu. Si ce taux est aux environs de 50 %, il ne lui donne pas le droit de s’isoler avec l’exercice du pouvoir.

Suivant cette règle, le président Ghazouani doit et gagnerait même, à tendre la main à toutes les forces en présence, y comprises celles de l’extérieur.

C’est, à mon avis, à ce prix et à lui seul, qu’il pourra fédérer autour de son programme, l’ensemble des forces vives de la nation pour refonder le pays et  jeter les bases d’une dynamique nouvelle de développement économique et social intégré.

Je crois personnellement à sa volonté, quant à ses aptitudes en la matière, elles sont déjà prouvées par les dossiers qu’il a eu à gérer sur des fronts sensibles et hautement stratégiques et dans lesquels il a brillé.

 

Nouakchott le  23 juin 2019