Brakna : Ghazouani, un militaire à l’épreuve du terrain politique

11 April, 2019 - 10:13

La veille de son arrivée dans la région du Brakna, les leaders politiques de la majorité présidentielle se sont manifestés, comme à leur habitude, pour s’agiter autour de l’accueil. Comme son mentor en 2009, il a emprunté lui aussi un hélicoptère de l’armée nationale. L’a-t-il loué ou pas, c’est une question à laquelle, nous n’avons pas encore trouvé de réponse. L’implication excessive, de façon indirecte, de l’administration locale dans son accueil, avec la mobilisation des forces de sécurité est une chose qu’on a constatée. Il est tout de même accompagné d’une délégation restreinte composée de l’ancien ministre, Bâ Ousmane ainsi que de Yahya Ould El Waghf, leader du parti ADIL, de Ethmane O Cheikh Ebi El MAALI, président d’El Vadila entre autres.

Boghé, une ville rebelle         

Les notables de la majorité, UPR notamment, ont dégagé des moyens modestes, si l’on peut dire, pour assurer une présence visible des masses à la réception du dauphin du Raîss, Mohamed O Cheikh Mohamed Ahmed O Ghazouani, un général à l’épreuve du terrain politique. Des militants et sympathisants mobilisés des localités des quatre communes du département, que sont Darel Barka, Darel Avia, Ould Birome et Boghé ont répondu à l’appel l’UPR. L’enceinte de la gare routière de Boghé a été le lieu où s’est déroulé ce rassemblement politique préélectoral. Après l’atterrissage de son hélicoptère sur la piste d’atterrissage d’Abaye, à 13 Km de la ville vers 11 H 20 mn, l’ancien chef d’Etat Major a été reçu par le maire de Boghé, Adama Moussa BA, des députés, des généraux, N’Diaga, Dia et Félix Négri ainsi que les anciens ministres, YALL Zakaria, DIA El Hadj Abderrahmane ainsi que de plusieurs hauts cadres. Il ne tarda pas à regagner la gare routière après s’être arrêté au carrefour de M’Balladji pour saluer les partisans de l’ancien ministre, Mohamed Abdallahi O Oudaa et celui de Mohamed o Ahmed Challa, maire d’Aleg, son rival. Sur le chemin menant à Boghé Dow, le cortège dépasse une géante banderole sur laquelle, on pouvait lire : « les villages de Daghveg, Roti, Dar El Ghadra, El Jedida, Carrefour et Nioly souhaitent la bienvenue à Ghazouani avec l’Ambassadeur Jarr Ould Inalla ». Sous les tentes, le candidat écoute religieusement la lecture du coran entonnée par l’érudit, Ahmed Tidjane Daouda DIA. Lui succédant, la maire de Boghé, Adama Moussa BA a exprimé les doléances des populations au nom des quatre communes. Enrôlement, agriculture, élevage, chômage des jeunes, eau, éducation et formation ont été les principaux points soulevés par l’édile de la ville. Quant au candidat, il a fait l’éloge des cadres de Boghé qui, dit-il, ont contribué à la construction de l’Etat Mauritanien, regrettant de ne pas maîtriser les langues nationales pour s’adresser aux populations. Boghé, a-t-il affirmé, représente la Mauritanie en miniature et exhortant tous à consolider l’unité nationale. Il a promis s’il est élu de se focaliser sur la consolidation de l’unité nationale et de la justice sociale.  Aucune audience n’a été accordée à l’auberge. Au moment de quitter l’auberge Hawo Mokhtar, les employés ont été enfermés dans la cuisine, le temps que Ghazouani s’engouffre dans sa voiture.       

Bababé, Ghazouani découvre l’état chaotique de la route bitumée

Alors que son arrivée était annoncée dans un hélicoptère, le candidat fait son entrée dans la capitale du Lao par voix terrestre. Entre la localité de Abary et Hayré Golléré, tout de blanc vêtu, Abdoulaye Mamadou BA, le maire de la commune de Bababé lui serre la main, le premier  dès sa descente de voiture. Dans le rang, Moustapha O Mohamed Mahmoud, président du conseil régional qui a été au premier rang dans toutes les étapes, les maires d’Aéré M’Bar, SY Moussa alias Siguila, d’El Vor, Mohamed O Sambeîtt, transfuge d’El Wiam,  l’ancien ministre, Thiam Diombar, Dieng Adama Boubou (BCM), Abdarrahmane O Saîbott (ancien diplomate). Sur le chemin de Bababé, il s’est arrêté pour saluer les partisans du Wali du Gorgol, Yahya O Cheikh Mohamed Vall, devant son domicile. Partisans venus des localités de El Vor, Mragatt, Tadioukel etc…. Il effectuera également, un autre arrêt pour saluer les partisans du général, Mohamed Vall O Maayîf conduits par Ould Saîbott. Le candidat et son cortège foncent vers la tribune d’honneur. Lecture  du coran par l’ambassadeur au Yémen, Aîdahi. Vint ensuite l’allocution du maire de Bababé qui a osé parler de discrimination positive en faveur des exclus de façon générale. L’enrôlement, l’éducation, la santé, le désenclavement des localités rurales, l’agriculture, notamment le moyen périmètre  de 150 hectares aménagés de façon catastrophique dans le cadre du projet PRPB (managé par un étudiant) depuis plus d’une dizaine d’années et qui reste inexploité. En réponse, Ghazouani a indiqué devant l’assistance que les doléances exprimées se recoupent avec celles de Boghé. Il a loué le travail considérable mené par la commission nationale dirigée par Thiam Diombar à cet effet. Il a affirmé que la campagne électorale n’a pas encore commencé mais que les questions urgentes seront soumises à son excellence, Mohamed o Abdel Aziz dès son retour à Nouakchott et les autres questions seront traitées, s’il est élu, selon ses propres expressions.

M’Bagne : vive Birame, zéro Ghazouani

Avant que la population ne termine de s’installer à la tribune aménagée pour recevoir le candidat, la délégation débarque spontanément et prend au dépourvu les cadres et militants. Les partisans de Ghazouani, venus de la grande majorité des localités rurales ont passé la journée dans des sites réservés pour chaque délégation. Au moment de se rassembler, le candidat débarque. A l’entrée de la ville, l’accueil est perturbé par des jeunes sympathisants de Birame Dah qui ont scandé des slogans hostiles au candidat, qualifié de copie conforme de Mohamed O Abdel Aziz. Des jeunes très agités arborant des brassards rouges. Pris au dépourvu par cette entrée en scène inattendue de la jeunesse d’IRA, les cadres de la majorité s’affolent mais gardent leur sang froid tout de même. Les jeunes ont endommagé quelques véhicules par des jets de cailloux et la police procèdera à des arrestations suite à une plainte introduite par l’un des transporteurs.  Hassane Abdoulaye SECK, le maire de la ville a prononcé un discours devant Ghazouani dans lequel, il a soumis des doléances, telles que l’enrôlement, l’éducation, la santé, l’agriculture, le désenclavement etc…

Mghata Lahjar : Aucune doléance et beaucoup d’empoignades politiques   

Prévu à 11 H du matin, le candidat est descendu de son avion 5T MAG à 16 H 20 minutes sur la piste d’atterrissage de Maghta Lahjar, très bien aménagée. A cause des divergences politiques de tendances adverses, les cadres présents à l’accueil ont valsé à maintes reprises, changeant de place. La gendarmerie a eu d’énormes difficultés pour maitriser les cadres. Un militant a scandé publiquement, ‘nous sommes tous venus accueillir notre candidat, ces élus sont les nôtres’’ tandis qu’un autre lance, ‘’éloignez ces élus et leurs Chrawitt (morceaux de tissus) !’’ Un désordre sans commune mesure. Ba Ousmane l’accueille à sa descente d’avion. Bamba O Sidi Badi, homme d’affaires et PDG de la SOMACO TP, lui serre la main en cours de chemin. Il se dirige vers les cadres immobilisés dans une longue file d’attente pour les saluer un à un. Yacoub O Sidi Youssouf, le député de Maghta Lahjar avec d’autres élus est au 1er rang de l’accueil.  Là où la tribune est installée, prés de la préfecture, un grand désordre règne. Et le candidat a du mal à calmer la foule.  Mais il s’adresse à ses partisans dans une chaleur torride après le message élogieux délivré par le vieux maire de Maghta Lahjar, Baba O Moustapha qui n’a posé aucune doléance à son hôte. Pas plus de dix minutes et notre candidat se fraye un chemin avant de s’engouffrer dans sa voiture. Quelques instants plus tard, l’on aperçoit en l’air son avion survoler. 

Bref, cette première sortie du candidat Ghazouani à l’intérieur du pays a permis de mesurer la capacité de mobilisation du candidat de la majorité. Candidat qui aura beaucoup à faire avec les composantes négro-africaines et haratines qui restent très marquées par les politiques d’exclusion menées ces dernières années par les pouvoirs publics. Un candidat qui doit changer de stratégie pour se rapprocher beaucoup plus des citoyens et réduire sa méfiance à l’égard du peuple. Car Ghazouani n’a accordé aucune audience pendant toutes ces étapes.   

Brahim Ely Salem

CP Calame au Brakna