Question et guerre du Sahara mauritanien

16 October, 2014 - 01:34

(Suite des publications de documents diplomatiques français,

voir Le Calame des 14 & 28 Décembre 2010 – 4 & 25 Janvier, 8 & 22 Février 2011 – 22 Juillet & 12 Août 2014)

                                                                                                                                            

 

 

Apparition du Front Polisario

dans la correspondance diplomatique française

 

 

 

                        Les origines du Front populaire de libération de la Seguiet-el-Hamra et du Rio de Oro ne sont pas encore complètement connues ni étudiées. Elles sont depuis trente-cinq ans occultées  par la rivalité de deux Etats maghrébins ayant chacun par une revendication ou un soutien à l’une ou l’autre des parties de l’ensemble mauritanien que s’étaient partagés en 1900-1902 l’Espagne et la France : le Maroc dès la fin du protectorat revendiquant cet ensemble et l’Algérie s’opposant à toute intégration de la possession espagnole.

 

Il apparaît cependant que le mouvement est initialement mauritanien – quoiqu’indépendant des autorités de Nouakchott – et qu’il supplantera très vite toutes autres fondations, dont celle du « Morehob » qui lui était antérieure d’un an, visait aussi les présides : ce mouvement, né à Rabat en Juillet 1972, émigre à Alger juste quand se crée le Polisario, à Nouakchott.

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Plusieurs évolutions très différentes en ont déterminé la naissance : celle propre au territoire administré à l’Espagne marquée par les manifestations du 17 Juin 1970 dont, le tout premier, le président Moktar Ould Daddah fit reproche au gouvernement espagnol de les avoir réprimées si excessivement. Celle des prises de conscience en Afrique et aux Nations Unies de ce que la décolonisation était encore loin d’être achevée. Celle enfin de la vie politique mauritanienne, caractérisée à l’époque par l’intégration progressive de la centrtale syndicale dans le système du Parti unique de l’Etat. Aux Nations Unies, l’ancien secrétaire général de la Nahda, Ahmed Baba Ould Ahmed Miské, représentant permanent de la République Islamique de Mauritanie, obtient un succès marquant, à partir de 1965, en faisant comprendre que la revendication du Maroc sur la possession espagnole n’est que le développement de l’appartenance de cet territoire à l’ensemble mauritanien. Opposant d’origine, puis rallié pour quelques années, au préssident Moktar Ould Daddah et même premier chronologiquement à être chargé de la permanence du Parti, Ahmed Baba revenu à l’opposition rallie le Polisario, en devient l’un des propagandistes à Alger notamment. Le même parcours est celui de Cheikh Malainine dit Robert, dont le nom illustre évoque la lutte du nord-ouest saharien à la pénétration française dans les années 1910. Il préside la centrale unique quand, en Mai 1973, celle-ci adopte, la première dans l’officialité mauritanienne, une motion de soutien aux manifestations anti-espagnoles.

 

Ainsi, le Polisario naissant est-il à la fois un des thèmes de l’opposition intérieure au Parti du Peuple mauritanien, en coincidence avec la contestation syndicale, et l’illustration, par sa fondation-même à Nouakchott, de la « mauritanité » du Rio de Oro et de la Saguiet-el-Hamra. C’est la rencontre en 1973, quinze ans après, de deux prises de date à l’origine de la Mauritanie moderne. L’appel à l’unification de l’ensemble mauritanien, lancé à Atar en Juillet 1957 par Moktar Ould Daddah et le choix pour ses opposants, dont Ahmed Baba Ould Ahmed Miske fondant en Août 1958 la Nahda avec, entre autres, Bouyagui Ould Abidine, de ne pas démentir la revendication marocaine sur la Mauritanie, seule dialectique entrevue alors contre une indépendance-fiction concédée par la France. Cette même dialectique d’opposition intérieure et même de personnes amène en 1975 à préférer la guerre pour le Sahara mauritanien plutôt qu’une unification si partielle qu’elle soit à l’époque. On est donc loin, à l’origine du Front Polisario, d’un mouvement nationaliste et indépendantiste dont la Mauritanie et son régime seront les principales victimes. Initialement, il s’est plutôt agi d’une surenchère nationaliste de l’opposition intérieure mauritanienne que pouvait rallier Moktar Ould Daddah, ferme face à l’Espagne et incontournable par le Maroc. La rivalité algéro-marocaine que le fondateur de la Mauritanie pensait résoudre au profit d’un grand Maghreb uni et à l’occasion de la décolonisation saharienne, a ensuite complètement transformé le mouvement et l’a « externalisé ».

 

C’est du moins ce qu’à la réflexion, je crois le plus explicatif.

 

Bertrand Fessard de Foucault - Ould Kaïge

 

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Nouakchott, le 12 Mars 1973                                    n° 151/152

A/S. La Mauritanie et le Sahara espagnol

 

Je me réfère à mon télégramme nr 144/145 du 7 Mars 1973 pour Alger nr 17/18 – Rabat nr 12/13 – Madrid nr 8/9 – Dakar nr 13/14

Un communiqué du ministère des Affaires étrangères publié ce matin annonce que le ministre algérien des Affaires étrangères, répondant à l’invitation de M. Mouknass, « vient de donner son accord pour participer à la prochaine réunion de Nouakchott » sur le problème du Sahara sous administration espagnole.

Au moment-même où le nouvel ambassadeur d’Espagne, M. Andrada-Vanderwilde présente ses lettres de créance au président Moktar Ould Daddah, une résolution syndicale inspirée par le gouvernement et adoptée en présence du ministre de l’Information, confirme le durcissement de l’attitude mauritanienne dans cette affaire.

Ce document évoque notamment « le caractère mauritanien du peuple du Sahara sous domination espagnole, victime des massacres répressifs de Juin 1970 et de Mars 1972 » et « la grossière manœuvre du gouvernement de Madrid, annoncée ces tout derniers jours ». Le syndicat qui l’a approuvé « soutient le peuple frère du Sahara sous domination espagnole dans sa juste lutte de libération. Il condamne énergiquement les tentatives du gouvernement madrilène de faire tomber le peuple du Sahara dans le piège d’une autodétermination qui est vide de tout contenu pour un peuple dominé ». /.

                                                                                          Oddos

 

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Alger, le 13 Avril 1973     n° 918/920

objet : Sahara espagnol

 

L’un de mes collaborateurs a recueilli auprès de l’ambassade d’Espagne les indications suivantes :

Le Mouvement de libération du Sahara espagnol, dit MOREHOB, qui vient de rendre publique son installation à Alger, a été créé il y a un peu plus d’un an à Rabat avec le soutien financier des autorités marocaines. Ses effectifs sont faibles. Des trois dirigeants qu’on lui connaît, M. Moha, arrivé à Alger au début de Mars, était depuis quelque temps déjà le plus en vue. On ignore si ses deux compagnons le suivront ici ou non. Les responsables algériens se félicitent certainement de l’installation du mouvement chez eux, peut-être même l’ont-ils suscitée. On ignore le montant et la nature de l’aide qu’ils vont lui apporter

Madrid s’est abstenu de toute démarche auprès du gouvernement algérien. Mais contrairement à ce qu’écrit le correspondant du Monde dans un article publié le 11 Avril, l’Espagne n’a pas accordé récemment un prêt de plus de 150 millions de francs à l’Algérie. Elle lui a consenti, en juin 1972, un crédit de 40 millions de dollars, qui représente déjà pour elle un effort très important.

La conférence algéro-maroco-mauritanienne sur le Sahara espagnol, dont la réunion avait été proposée par Nouakchott pour la fin de Mars à la suite d’une suggestion de M. Bouteflika, n’a pas eu lieu. Mais l’ambassade d’Espagne n’exclut pas qu’elle se tienne tôt ou tard bien que personne n’ignore que les objectifs des trois pays sont très différents. Pour Madrid, la position algérienne peut être ainsi résumée  « tout sauf l’intégration au Maroc ». /.

                                                                             Soutou

 

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Nouakchott, le 7 Juin 1973          n° 269/270

A/S : Sahara espagnol

 

Référence : synthèse n° 7/73 du 19 Avril 1973

Le 12 Avril, dans sa motion sur le Sahara occidental dont j’ai transmis le texte au Département (bordereau n° 137/DAM du 3 Mai 1973), l’Union des travailleurs mauritaniens – intégrée au Parti officiel – faisait état de « massacres barbares organisés par la soldatesque du général Franco », et saluait « la naissance du Mouvement de libération dit avant-garde du Saguiet-el-Hamra et du Rio de Oro ».

L’outrance de ces props et les faits qu’ils révèlent, ont entrainé une protestation de l’ambassadeur d’Espagne auprès du ministre des Affaires étrangères. M. Vanderwilde aurait fait comprendre à ce dernier que les Mauritaniens ne demeureraient  pour Madrid des interlocuteurs valables que dans la mesure où ils observeraient une certaine discrétion dans leurs revendications. M. Mouknass aurait alors présenté ses excuses au diplomate espagnol.

Le président Moktar, saisi de l’incident, se serait déclaré disposé à adresser une lettre au général Franco pour dissiper ce « malentendu », imputé à l’inexpérience du secrétaire général de l’U.T.M., M. Cheikh Malainine Robert, qui, en l’absence du ministre des Affaires étrangères, en visite au Moyen-Orient, aurait agi de sa propre initiative.

M. Malainine semble tenu en particulière suspicion par la mission espagtnole qui le désigne comme l’organisateur de quelques groupes armés installés depuis peu à la frontière du Rio-de-Oro. On imagine mal, dans un tel cas, que son action soit restée ignorée des autorités mauritaniennes et qu’elle n’ait pas bénéficié de leur soutien. /.

                                                                        Oddos

 

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Nouakchott, le 18 Juin 1973       n° 337/38

A/S : manifestation anti-espagnole

 

Au cri de « Sahara mauritanien », plusieurs dizaines de jeunes gens ont manifesté hier devant l’ambassade d’Espagne. Après avoir lancé des projectiles sur les bâtiments, les assaillants se sont rapidement dispersés sans attendre l’arrivée de la police.

Dans les quelques tracts manuscrits rédigés en arabe et abandonnés sur place, on pouvait lire : « 17 Juin = 29 Mai, immortalité aux martyrs sahariens, vive la solidarité des peuples arabes ».

Un incident identique s’était produit l’année dernière à la même date (ma dépêche n° 217/DAM du 26 Juin 1972). Il s’agit sans doute pour ces jeunes manifestants de commémorer les incidents d’El Aïoun où, le 17 Juin 1970, la troupe avait tiré sur des manifestants sahraouis, faisant quelques dizaines de morts.

Les auteurs de cette démonstration sont, semble-t-il, ceux-là même qui animent périodiquement les manifestations anti-gouvernementales. Le rapprochement effectué dans les tracts entre l’attitude des forces espagnoles à El Aïoun et celle de la gendarmerie mauritanienne à Zouérate (29 Mai 1968) ne laisse en tout cas aucun doute sur leur position à l’égard du pouvoir.

Cette action contre des locaux diplomatiques est la seconde en un mois à Nouakchott où, le 15 Mai dernier, un groupe semblable s’attaquait à l’agence consulaire de Grande-Bretagne pour marquer l’anniversaire de la déclaration Balfour.

                                                             Oddos

 

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AFP 114

Une lutte armée aurait débuté au Sahara espagnol

Nouakchott 20 Juillet 1973 (AFP)

 

Le Front populaire pour la libération du Saguiat El Hamra et Rio de Oro (Sahara espagnol), créé le 10 Mai dernier, a déclenché le 20 Mai ses premières opérations militaires contre les forces espagnoles, annonce un communiqué du comité exécutif de ce Front, transmis au bureau de l’AFP à Nouakchott. Le communniqué fait état d’affrontements et d ‘opérations lancées contre des postes militaires espagnols dans la région nord du Sahara, notaamment à Khanga (le 20 Mai), Tifarity, BirLaghla (le 10 Juin). Avant de quitter ce poste, occupé pendant une heure et quart, les révolutionnaires du Front ont écrit sur les murs des slogans tels que : « liberté avec le sang », « liberté par la violence et le fusil », précise le communiqué.

Le Front populaire indique par ailleurs que les « autorités colonialistes ont déclenché à leur tour plusieurs opérations contre-révolutionnaires, niant d’abord l’existence des opérations, accusant ensuite les pays limitrophes ».

Cependant, poursuit le communiqué, les autorités colonialistes ont reconnu la responsabilité du Front populaire, procédé à trente-deux arrestations dans les agglomérations contre « des citoyens sans armes » et renvoyé les « cheikhs » nouvellement élus, bien que précise le communiqué, « ils représentent la seule issue pour couvrir leurs manœuvres barbares ». Par ailleurs, le Front populaire fait état de bombardements effectués par les forces espagnoles contre diverses positions dans le nord du territoire, montagnes de Karb Elhawa et Affam El Nian, Amgala et Rghhaina, où, selon le communiqué, les bombardements se sont poursuivis fin Juin pendant sept jours consécutifs.

Enfin, le Front lance un appel à l’opinion internationale et à toutes les forces libres et anti-colonialistes », y compris le peuple espagnol ami, à soutenir le peuple sahraoui dans sa juste et légitime lutte ».

Par ailleurs, dans une letre ouverte, le Front populaire pour la libération de Saguiat El Hamra et Rio de Oro, lance un appel aux chefs d’Etat marocain, mauritanien et algérien qui vont se réunir à Agadir, pour leur soutien à la juste lutte du peuple sahraoui, et leur demande de prendre « une position ferme, constructive et courageuse ».

Dans cette lettre, le Front met l’accent sur les « liens historiques qui lient le Sahara et la nation arabe » et dénonce « ‘obstination des autorités colonialistes à ne pas vouloir appliquer les résolutions des Nations Unies et leurs manœuvres visant à séparer ce territoire de ses alliés authentiques, par la création d’ennemis imaginaires dans les pays limitrophes. « Votre soutien est indispensable, souligne le Front, en ce moment où va se tenir votre sommet historique ».

Il paraît difficile actuellement d’évaluer les forces que représente précisément ce nouveau Front populaire de libération et qui regroupe, selon ses partisans, tous les courants du mouvement né de la répression du 17 Juin 1970 à El Aïoun (principale ville du Sahara).

On rappelle à ce propos qu’au mois de Mars dernier, le gouvernement espagnol, avait proposé, sous son contrôle, un referendum sur l’avenir du Sahara, à partir d’une déclaration dite de « l’assemblée générale des Saharouis ». Cette proposotion avait été refusée par les trois gouvernements marocain, mauritanien et algérien, à qui l’on prête l’intention de porter la question devant l’Assemblée générale des Nations Unies lors de sa prochaine sessiion au mois de Septembre. AFP/MIG%22   15.25

 

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AFP 21

A propos de la création d’un … signé Jean Noël Gillet

Nouakchott, 21 Juillet 1973 (AFP)

 

Le communiqué militaire rendu public le vendredi matin à Nouakchott mentionne pour la première fois officiellement l’existence d’un Front populaire pour la libération du Saguiat El Hamra et Rio de Oro mais diverses rumeurs en avaient fait état ces derniers temps à Nouakchott.

Etant donné les distances, les difficultés de communications et de pénétration en territoire espagnol, et compte tenu du secret dont tiennent à s’entourer les dirigeants du nouveau Front, il est difficile d’évaluer l’importance réelle du mouvement et des affrontements dont le communiqué fait état.

Quoi qu’il en soit, le Front de libération naissant ne semble pas encore avoir pu s’organiser suffisamment pour donner naissance à un mouvement de masse, difficile à créer dans un vaste territoire totalement déssertique dont la population nomade ‘estimée à cinquante mille habitants est éparpillée et où la présence espagnole paraît très forte. En outre, les observateurs mettent l’accent sur l’importance des forces espagnoles qui disposent d’avions et d’hélicoptères pour contrôler le pays, et sur la difficulté d’éventuelles opérations de guerilla, étant donné la configuration du terrain.

Les dirigeants du mouvement, qui pourraient venir essentiellement des zones frontalières, ne sont pas connus et il serait hasardeux de se prononcer sur ses effectifs militaires : peut-être une centaine.

Apparemment, le Front de libération des Sahraouis, mouvement purement nationaliste, est indépendant. Créé au Maroc, il est établi depuis quelques mois à Alger. Ces deux mouvements certes réclament la libération du Sahara sans préjuger de son statut futur mais tout au plus, semble-t-il, le nouveau Front pourrait compter sur un soutien extérieur de la part du « Morehib ». Un autre mouvement créé dans le sud marocain à Tarfaya réclame, lui, la libération du territoire saharien et son rattachement au Maroc.

Ainsi, outre la complexité de la question sur le plan international, les diverses parties en présence ayant des conceptions et des intérêts différents sur l’avenir politique du territoire, la multiplication de ces mouvements ne tend pas à clarifier la sityation. Les divers courants semblent d’accord sur la nécessité de libérer le Sahara mais les divergences restent grandes quand il s’agit de prononcer sur le futur statut du territoire : indépendance totale, partition, rattachement partiel ou global au Maroc ou à la Mauritanie.

En Mauritanie, deux courants semblent se dessiner, souhaitant l’un la seule application du principe de l’auto-détermination sous le contrôle de l’ONU, l’autre le rattachement à la Mauritanie.

Les obswervateurs pour leur part relèvent le regain d’activité politique autour de cette question alors qu’un certain nombre d’événements majeurs pour l’évolution de l’affaire vont se produire dans les semaines qui viennent : tenue dans quelques jours à Agadir du sommet tripartite Mauritanie-Maroc-Algérie, saisine par le Maroc du Comité de décolonisation de l’ONU, réunion de l’Assemblée générale de l’ONU à partir du mois de Septembre et éventuelle réponse du gouvernement espagnol aux propositions faites en Mars par la djemaa (assemblée générale des Sahraouis), réponse qui n’est toujours pas venue.

De source espagnole à Nouakchott, on se déclare surpris des informations contenues dans le communiqué militaire publié vendredi et l’on met l’accent sur les bonnes relations que l’Espagne entretient avec les pays limitrophes du territoire saharien.

 

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Rabat, le 21 Juillet 1973   n° 1540/1542

Objet : Sahara espagnol

 

La dépêche AFP Nouakchott n° 114, relative au communiqué du Front populaire pour la libération du Saguiet El Hamra et du Rio de Oro, fait aujourd’hui la une de tous les journaux.

Mais, alors que « Le Matin » et « L’Opinion » se bornent à reproduire sous le même titre « début de la lutte armée », « Maghreb Informations » l’assortit d’un commentaire intitulé » : « les prétentions sur notre Sahara se concrétisent », et la replace dans le contexte du sommet tripartite d’Agadir.

Pour le rédacteur, les trois mouvements de libération symbilisent les positions différentes des trois pays : le « Morehob » dont les « positions se sont nuancées au point de ne refléter, depuis son transfert à Alger, que les thèses algériennes », le « Front populaire » d’obédience mauritanienne, le « mouvement du 21 Août » seule oreganisation à réclamer le retour du territoire au Maroc.

Il poursuit en soulignant que l’évolution enregistrée à Alger et Nouakchtt, depuis Nouadhibou, a fait son œuvre et en affirmant que « les prétentions sur notre Sahara sont désormais précises ». Pour lui, le retour de ce territoire au Maroc est la seule solution, toute tentative des deux pays voisins pour « se soustraire à ce devoir de solidarité », ne peut constituer, pour le peuple marocain, qu’une « atteinte à la fois contre son unité et contre l’édification du Maghreb arabe ».

Cet article est dans la même ligne que ceux déjà parus dans le journal de l’UMT et dans celui de l’Istiqlal (mes communications 1161 et 1445). S’il reflète parfaitement les positions en présence, il n’est pas de nature, encore une fois, à détendre l’atmosphère à la veille de la réunion d’Agadir.

                                                                                            Lebel

 

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Nouakchott, le 26 Juillet 1973   n° 221 DAM  

A/S. Sahara espgnol

 

A la veille de la Conférence d’Agadir, des représentants d’un nouveau mouvement de libération du Sahara – le Front pour la libération de la Saguiet-el-Hamra et du Rio de Oro –, ont  frappé à la porte du correspondant de l’AFP à Nouakchott, assurant ainsi d’emblée une large publicité au « premier communiqué militaire » de leur organisation. Seule la presse mauritanienne – sous contrôle gouvernemental – continue d’ignorer l’existence et les hauts faits des patriotes du « Front ».

Si l’on en croit l’Ambassadeur d’Espagne, les dépêches de l’Agence France-Presse ont irrité le Ministre des Affaires Etrangères, soucieux de sauvegarder, avant tout, les bonnes relations de son pays avec Madrid. M. Mouknass aurait même évoqué avec son collègue de l’Intérieur la possibilité d’instituer une censure des articles d’agences, destinée à prévenir désormais la diffusion de nouvelles préjudiciables aux intérêts de l’Etat.

Et pourtant, le cinquième congrès de l’UTM (l’Union des Travailleurs Mauritaniens, qui regroupe les syndicats officiels, contrôlés par le Parti avait, dès le mois d’Avril dernier, « salué la naissance du mouvement dit Avant-Garde de la Saguiet-el-Hamra et du Rio de Oro », l’assurant de sa « solidarité dans la lutte qu’il mène contre l’occupation » » (ma transmission n° 137/DAM du 3 Mai 1973). Les organes d’information avaient alors, il est vrai, comme aujourd’hui, observé sur le sujet un silence pudique.

Des officiers mauritaniens sont en relations avec le « Front », qui pourrait, lors de sa création, le 10 Mai dernier, avoir absorbé l’»avant-garde » et dont, selon l’Ambassade d’Espagne, une douzaine de membres se trouveraient actuellement à Nouakchott. L’un d’entre eux – leur leader, semble-t-il, aurait purgé un an de prison à El Aïoun, pour activité politique. Il aurait remis, lui-même, au correspondant de l’A.F.P. la « lettre aux chefs d’Etat » et le « communiqué militaire », documents dont j’adresse ci-joint la photocopie au Département.

On sait que de petits groupes armés circulent sur la frontière orientale du Rio de Oro, avec le consentement des autorités de Nouakchott et d’Alger (ma communication du 7 Mai 1973). Celles-ci auraient néammoins intercepté, il y a deux mois, une douzaine d’hommes, pourvus d’un armement hétéroclite, qui tentaient de s’infiltrer en « territroire occupé ».

Une certaine coopération semble donc exister entre les services algériens, mauritaniens et espagnols qui cherchent à éviter, pour l’instant, tout incident sérieux. La Mauritanie, si elle intervient pour empêcher le déclenchement d’opérations offensives à partir de son territoire, se refuse cependant à entraver les autres activités des mouvements de libération qu’elle estime justifiées dans leur principe et qu’elle affecte de juger négligeables.

Au moment où les participants au sommet d’Agadir, tout en rappelant leur attachement au principe d’autodétermination des populations sahariennes, laissent transparaître – et la discrétion du communiqué sanctionnant la rencontre, comme le laconisme des commentaires officiels le confirment –, l’échec de la politique de concertation mise en œuvre à la Conférence de Nouadhibou, le gouvernement de Nouakchott ne peut se résigner à laisser les mouvements d’obédience algérienne et marocaine apparaître comme les seuls interlocuteurs valables, aux yeux de l’ONU, de l’OUA… et du colonisateur. Il faudrait donc que le « Front », basé en Mauritanie, se fasse connaître par quelque action d’éclat, s’il veur éclipser ses concurrents d’Alger et de Rabat.

Sans que la Mauritanie se départisse officiellement de sa politique pacifique – et M. Mouknass s’en fait inlassablement l’interprète devant les représentants de Madrid –, la porte s’ouvre ainsi à une surenchère entre les diverses organisations de libération.

Si, sur le terrain, la présence militaire espagnole semble devoir empêcher, dans l’immédiat, toute action de quelque envergure de la part des nationalistes, les états-majors, en revanche, vont pouvoir faire assaut de communiqués en relatant les prouesses des patriotes ralliés à leur cause. Dans cette atmosphère de « mobilisation », on attend avec intérêt la réponse de l’Espagne aux « revendications » de la Djemaa, et la réaction qu’elle ne manquera pas de susciter parmi les champions de la décolonisation, ou de l’indépendance du Sahara occidental./.

 

pièces jointes à la dépêche : communications manuscrites du Polisario

 

FRONT POPULAIRE pour la libération du Saguiat El Hamra et Rio de Oro

Majesté, Excellences, les Chefs d’Etats africains réunis au sommet tripartite d’Agadir

 

Nous avons le grand honneur de vous exprimer dans cette lettre, le salut militant du peuple saharien, traduisant ainsi les liens historiques qui lient ce territoire au Maghreb et à la nation arabe.

Nous avons toute la conviction  que vous soutiendrez la lutte armée considérée aujourd’hui comme une condition essentielle dans la détermination du destin de ce territoire, vues les obstinations des autorités colonialistes à la non-applicatoion des résolutions des Nations-Unies et les manœuvres destinées à séparer ce territroire de ces alliés authentiques, par la création d’ennemis imaginaires : les pays limitrophes, qui sont les seuls amis et particulièrement après le déclenchement de la lutte armée par les Saharouis.

Nous vous demandons donc de prendre une position ferme, constructive et courageuse, vis-à-vis de cette question légitime.

Nous vous lançons un appel sincère à nous soutenir dans notre lutte légitime pour constituer ainsi une seule main contre le colonialisme. Ce soutien est indispensable et particulièrement en ce moment où se tient votre congrès au sommet historique, constituant ainsi des alliés historiques assumant toutes les responsabilités dans ce contexte évitant toute considération secondaire.

Veuillez agréer, Majesté, Excellences, notre salut fraternel de destin commun.

                                                    Comité exécutif

 

version arabe suivant la française

 

FRONT POPULAIRE pour la libération du Saguiat El Hamra et Rio de Oro

COMMUNIQUE MILITAIRE

 

A la suite de l’annonce de la constitution du Front Populaire pour la libération du Saguiat El Hamra et Rio de Oro, le 10 Mai 1973, comme dépassement des mouvements qui ont débuté depuis 1965 et qui ont abouti à lka tuerie du 17 Juin 1970, les premières opérations militaires ont été déclencheés, le 20 Mai 1973.

Ainsi le 20 Mai 1973, occupation du poste militaire (illisible)  … le programme politique du Front, et ont quitté ce poste avec des armes, munitions et 5 prisonniers libérés plus tard.

A la suite de cette opération, il y a eu un affrontement entre les révolutionnaires du Front et une patrouille ennemie près de « Tifarity » sur la frontière sud qui a duré 15 minutes, après quoi les patriotes se sont enfuis sans recenser les pertes de l’ennemi.

Le 10  Juin 1973, une opération militaire est lancée contre le poste militaire de Bir Lahla à 50 kms des frontières sud-est et  l’ont occupé de 21 heures à 22 heures 15 après la fuite des soldats qui l’occupaient. Les révolutionnaires du Front ont écrit avant de quitter le poste, sur les murs : – liberté  avec le sang – liberté par la violence et le fusil.

Ceci a entrainé différentes réactions cherz les autorités colonialistes qui ont déclenché plusieurs opérations contre-révolutionnaires dans presque tout le territoire, niant les opérations d’abord, en accusant les pays limitrophes ensuite.

Mais les autorités colonialistes ont reconnu la responsabilité du Front Populaire et ont usé de moyens destructeurs, en lançant des bombes dans plusieurs régions, ainsi l’aviation a bombardé « Karb ElHawa », montagne au nord du territoire et « Affam El Widan » au centre ; en installant l’artillerie lourde et bombardant « Rghaïwa » durant 7 jours successifs depuis le 27 Juin 1973. L’artillerie et l’aviation ont bombardé « Amgala » aussi.

Ces campagnes colonialistes ont buté contre la résistance courageuse des contre-révolutionnaires. Leur désarroi se déchaîne contre les citoyens sans armes dans les agglomérations : 32 arrestations.

Il est notable cependant que le but escompté par les colonialistes n’a pas été atteint, ce qui les a entrainés à geler toutes les activités civiles, en renvoyant les nouveauwx cheikhs (malgré la falsification des élections et leur désignation parmi leurs alliés) malgré qu’ils représentent la seule issue pour couvrir leurs manœuvres barbares.

Le colonialisme espagnol montre aujourd’hui plus que jamais sa véritable face colonialiste, c’est aujourd’hui une conviction de masses.

Nous incitons donc l’opinion internationale à beaucoup plus d’attention aux contradictions qui se jouent au Sahara et aux manœuvres colonialistes, comme nous invitons toutes les forces libres et anti-colonialistes, y compris le peuple espagnol ami, à soutenir le peuple sahraoui dans sa juste et légitime lutte.

              Vive la victoire des peuples

              La liberté ou le témoignage.

                                                                 COMITE EXECUTIF

 

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Nouakchott, le 7 Août 1973                                       n° 438

A/S : Front populaire de libération de la Saguiet El Hamra et du Rio de Oro

 

En l’absence du correspondant de l’Agence France presse, c’est son remplaçant, journaliste mauritanien de la Radiodiffusion nationale qui, sur la foi d’un communiqué du « Front pour la libération du Rio de Oro et de la Saguiet El Hamra », a fait hier état d’accrochages meurtiers au Sahara espagnol.

L’auteur de la dépêche est lié aux membres du « Front » résidant à Nouakchott, avec lesquels il partage son logement.

L’ambassade d’Espagne, qui nie la réalité des incidents, pourrait effectuer une démarche auprès du gouvernement mauritanien pour protester contre la diffusion de telles nouvelles./.

                                                                   Oddos

 

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Nouadhibou, le 17 Août 1973    n° 49. adressé à Ambafrance Nouakchott

 

J’apprends, de source digne de foi, que le Front populaire pour la libération du Sahara espagnol aurait recruté dans la région de Fort-Gouraud deux cents jeunes gens parmi les Regueibats. Au cours d’un prochain voyage à Fort-Gouraud, j’espère en apprendre davantage et vous tiendrai au courant.

                                                                 

                                                                     Bourris