Répression croissante des abolitionnistes: «Une épée au-dessus de nos têtes»

23 March, 2018 - 13:46

« L’esclavage et la discrimination raciale sont toujours d’actualité en Mauritanie », a déclaré jeudi à Dakar, au cours d’une conférence de presse de lancement du rapport intitulé « Une épée au-dessus de nos têtes », M.Alioune Tine, directeur régional  d’Amnesty International pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre, en présence de l’équipe de recherche et de campagne sur la Mauritanie.
Selon M. Tine, la machine de répression contre les défenseurs des droits de l’homme est en branle en Mauritanie. La torture des militants anti-escalvagistes et la répression des défenseurs des droits humains sont monnaie courante dans le pays.
Dans ce document, l’organisation expose la répression croissante à l’égard des personnes et des organisations qui osent dénoncer l’esclavage et la discrimination, ainsi que le refus des autorités de reconnaître le phénomène. Le rapport   présente aussi  les différentes tactiques utilisées par les autorités mauritaniennes pour faire taire les défenseurs des droits humains et les autres militants, notamment l’interdiction de manifestations pacifiques, le recours à une force excessive contre des manifestants, l’interdiction d’organisations militantes et l’ingérence dans leurs activités.
« Les autorités mauritaniennes font preuve d’un mépris honteux pour les droits humains, alors qu’elles ont aboli l’esclavage il y a près de 40 ans, en continuant non seulement de tolérer cette pratique mais aussi réprimer les personnes qui la dénoncent », a déclaré Alioune Tine, directeur du bureau régional pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale à Amnesty International.
 
 Persistance généralisée de l’esclavage et de la discrimination
 D’après les estimations d’organisations internationales antiesclavagistes, jusqu’à 43 000 personnes étaient réduites en esclavage en Mauritanie en 2016, soit environ 1% de la population totale.
Amnesty International a constaté que la police, les procureurs et l’appareil judiciaire ne répondaient pas de façon appropriée aux cas d’exploitation signalés, qu’il s’agisse d’identifier les victimes ou de punir les responsables présumés. En 2016, seulement deux personnes ont été condamnées par les tribunaux du pays compétents pour connaître des affaires d’esclavage, alors que ces juridictions avaient été saisies de 47 dossiers, dans lesquels 53 suspects étaient impliqués.
Le rapport révèle également que les pratiques discriminatoires touchent particulièrement les membres des communautés haratine et afro-mauritanienne. Ceux-ci sont absents de pratiquement toutes les positions de pouvoir et rencontrent des difficultés pour se faire enregistrer sur les registres de l’état civil, ce qui limite notamment leur accès à des services essentiels.
Alioune Tine a également dénoncé le mutisme des Etats-Unis et certaines organisations internationales sur la situation des esclaves en Mauritanie.
Selon lui, le fait qu’Ould Abdel Aziz soit «perçu comme quelqu’un qui combat le terrorisme » ne doit pas être une raison pour fermer les yeux sur les exactions que subissent les défenseurs des droits de l’Homme en Mauritanie.
« À l’approche d’élections cruciales cette année et l’an prochain, le risque de troubles sociaux est élevé si toutes les voix – même les plus critiques – ne sont pas respectées. Les autorités doivent cesser cette attaque contre les défenseurs des droits humains et prendre des mesures concrètes et efficaces pour mettre fin à l’esclavage et à la discrimination. »