Affaire Ould M’khaitir : Le gouvernement tergiverse

16 November, 2017 - 09:04

Le verdict de la Cour d’appel de Nouadhibou est tombé, jeudi dernier : relaxe d’ Ould M’khaitir, après l’avoir condamné à deux ans fermes, alors qu’il en a passé  plus de trois en prison. Une  libération qui a froissé une partie, très remontée contre le jeune blogueur, de la rue mauritanienne  qui espérait une autre tournure des évènements, en dépit de la requalification des charges, passées d’apostasie à la mécréance. La relaxe  pure et simple du tribunal, voire amnistie, pariaient certains, paraissait pourtant prévisible.

Dès la veille du verdict, la rue a donc commencé à bouger. La Nousra du Prophète Mohamed (PBL)  tente d’occuper la place de la mosquée Ibn Abass de Nouakchott, dénonçant la probable clémence du tribunal, mais c’est sans compter avec les forces de l’ordre qui envahissent, tôt le matin, les principales artères menant au rendez-vous et à la présidence de la République.  Dans l’impossibilité de manifester, Nousra reporte le rendez-vous au lendemain vendredi, après la prière. Les forces de l’ordre y seront, avec force grenades lacrymogènes, pour disperser les manifestants. On note également des manifestations à l’intérieur du pays.

Face à l’apparente détermination des  partisans de l’exécution du jeune blogueur, le pouvoir et/ou sa justice hésite, avant d’interjeter appel. Le jeune prisonnier est alors conduit de Nouadhibou à Nouakchott où il serait gardé à l’état-major de la gendarmerie. Le verdict de la Cour d’appel a mis à nu les tergiversations  du pouvoir qui se trouve, aujourd’hui, placé entre une  partie  de l’opinion nationale qui réclame, à cor et à cri, le respect du premier verdict qui condamna le présumé à la peine capitale – autrement dit,  l’exécution, pure et simple, du blogueur qu’elle accuse de « blasphème » – et l’opinion internationale, appuyée par l’autre partie des Mauritaniens, unanimement hostiles à cette radicalité. Voici près de quatre ans que la justice et le gouvernement cherchent à en finir, avec cette embarrassante affaire.

 

Et le G8 charge !

Pendant que le gouvernement se démène avec  le dossier du jeune blogueur, le G8, regroupement de coalition et de partis politiques de l’opposition qu’on semblait avoir oublié, refait surface et charge la baraque. Dans un long communiqué, le rassemblement entend accabler le pouvoir qu’il accuse d’avoir appauvri les  Mauritaniens, tandis qu’une infime partie, proche de celui-ci, s’en est, elle, copieusement engraissée.

Le G8  passe en revue les secteurs du pays dont les voyants sont tous au rouge : de l’éducation à la santé, en passant par le retour en force de la gabegie, du clientélisme et du favoritisme, tandis que l’unité nationale est ébranlée et que persiste l’esclavage et/ou ses séquelles... Au plan politique, le G8 parle, non seulement, de blocage mais, aussi  et surtout, de la mutilation des symboles nationaux, suite à la décision du pouvoir de changer les couleurs du drapeau et les paroles de l’hymne (conformément, certes, aux recommandations d’un dialogue politique de 2016… boycotté par l’opposition dite radicale). Le G8 accuse encore le pouvoir de régler des comptes à ses opposants, comme le sénateur Ould Ghadda,  en les envoyant  au bagne.

Au plan social, il dénonce la flambée continue des prix des produits de première nécessité – alimentation, carburant… – et, au-delà de l’incapacité du pouvoir à enrayer cette spirale, son pressurage des hommes d’affaires et du petit  peuple, via impôts et taxes. Le pouvoir s’acharne à sucer le peuple, clame le G8, afin de le réduire au silence. Et de crier à la déchéance nationale, pleurant le pays en danger, pris en otage par un régime prédateur. « Halte, faisons barrage aux visées du gouvernement d’Ould Abdel Aziz ! », semble clamer l’opposition dite radicale qui en appelle au sursaut national, invitant les citoyens mauritaniens à prendre leur responsabilités et à dire non, en répondant, massivement, au meeting  prévu le 25 Novembre prochain ; soit quelque trois jours avant la célébration du 57ème anniversaire de l’indépendance du pays, programmée à Kaédi, capitale du Gorgol.  Un évènement qui accapare toute l’énergie du pouvoir, alors que, selon le G8, il devrait plutôt se préoccuper, préférentiellement et en urgence, de la sécheresse qui s’abat sur le pays.

Le meeting du 25 Novembre, grande rentrée politique pour l’opposition dite radicale ? Occasion, pour son nouveau président, de décliner les grands axes de son mandat ?  L’opinion attend la première sortie d’Ould  Maouloud.

DL