Jeune-Afrique se rappelle à nos mauvais souvenirs.

24 August, 2017 - 09:33

Pour expliquer le boycott- après avoir envisagé un moment la participation- par l’opposition démocratique du scrutin référendaire du 05 août dernier, un article imputé à Jeune Afrique- choisi sans doute pour son audience internationale- mis en ligne sur Cridem et dont le tire, « Mauritanie : Pourquoi l’opposition a opté pour le boycott du référendum constitutionnel », me parait s’être-intentionnellement - engagé, non dans une investigation journalistique normale et neutre, auprès des principaux concernés, mais dans des extrapolations, des allégations et des rapprochements, visiblement  produits par un esprit dont l’imagination n’a d’égale que sa volonté de travestir la réalité.

     En effet, Jeune Afrique, en restituant le contexte, nous apprend que ce « changement de pied est dû, indirectement, à la rupture des relations diplomatiques de la Mauritanie avec le Qatar, que Mohamed Ould Abdel Aziz a décidé le 06 juin, emboîtant le pas aux monarchies du Golfe. » Dès lors, enchaîne le journal, « la rumeur d’une interdiction de Tawassoul, dirigé par Jemil Mansour que l’on dit, précise l’article, lié financièrement à Doha, avait alors enflé. » Donc et en toute logique, poursuit l’auteur, « de peur d’être dissoute, cette formation islamiste, jusque-là membre du camp des « nonistes », a choisi une solution qui lui a semblé moins tranchante : le boycott. » C’est ainsi, d’après l’article et suivant un fantomatique membre de l’opposition que « Tawassoul, étant la principale composante (70.000 membres revendiqués) de notre coalition, nous ne pouvons maintenir notre appel à voter « non » sans risquer de faire un score ridicule. »

Au fond, Jeune-Afrique n’a pas toujours été objectif et équilibré dans le traitement de la politique de certains Etats africains ou arabes. En Mauritanie, on se rappelle en tout cas des fréquents séjours de François Soudan, rédacteur en chef de ce journal, du temps où Maaouya Ould Sid’Ahmed Taya régnait en maître absolu, dans notre pays d’où il repartait, nous dit-on, avec des chèques et de nombreux cadeaux, en guise de « remerciements » pour ses commentaires parfaitement alignés sur les thèses défendues par le gouvernement à cette époque. Il avait d’ailleurs mérité le sobriquet de « François Ould Soudani » de la part du talentueux journaliste et écrivain, feu Habib Ould Mahfoudh, en raison de sa proximité et de sa « parenté idéologique », dit Abdoulaye Ciré Ba, avec le régime du dictateur.

     En réalité, les discussions autour du boycott ou de la participation au référendum étaient, au départ, menées au sein du FNDU (forum national pour la démocratie et l’unité), coalition de partis politiques, d’Ongs et de personnalités indépendantes de la société civile. Très tôt la ligne participationniste semblait l’emporter et il fut demandé aux militants et sympathisants de ce regroupement de s’inscrire massivement sur les listes électorales, pendant ce temps, les dirigeants en demanderont la révision. Mais l’arrivée du RFD, rassemblement des forces démocratiques, avait quelque peu modifié les rapports de force entre les deux camps, au sein de cette nouvelle coalition élargie, car il était plutôt convaincu- à juste raison- que toute participation dans une élection organisée par une CNI et une administration, aux ordres d’un pouvoir dont la transparence n’a jamais était une des caractéristiques majeures, n’aboutirait qu’à la légitimation de résultats issus d’un scrutin référendaire anticonstitutionnel et illégal et dont les résultats sont déjà connus. Il ne reste plus qu’à entériner le boycottage du scrutin envisagé, puisqu’il a, en plus, l’avantage de ne pas augmenter inutilement le taux de participation et de révéler toutes les manipulations à cet égard, comme cela est effectivement arrivé.

     Pourquoi donc la version précédemment mentionnée doit-elle être considérée comme imposée aux faits et quel est le message idéologique qu’elle véhicule en réalité ?

     Il me semble que ce texte s’efforce clairement de faire passer- aux yeux de l’Occident démocratique- l’opposition démocratique mauritanienne pour un assemblage de petits partis hétéroclites commandés, coordonnés et financés en fait par un puissant parti islamiste, lui-même à la solde du Qatar, lequel, on le sait est accusé d’être le financier occulte de tous les mouvements terroristes islamistes.

      Ce discours, adressé à l’extérieur, relaye celui du président de la République-destiné, lui, à la consommation intérieure- dans ses meetings populaires et selon lequel l’opposition, lorsqu’elle accède au pouvoir, va installer le désordre, la violence et le chaos, précisément parce que, dans l’imaginaire des populations arabes, depuis l’échec des printemps arabes- notamment en Egypte, en Tunisie, en Libye et probablement en Syrie- les régimes déchus n’ont laissé place qu’à des troubles et à un déchaînement de violence pires que les situations qui prévalaient auparavant.

                                                                                                                            

 

R’chid Ould Mohamed