N’exagérons rien !

17 August, 2017 - 02:12

Mais n’exagérons rien ! Qui a dit que les amendements constitutionnels  ont été rejetés par le peuple ? Qui ose le dire ? C’est quand même trop  de négationnisme ! Les amendements de Monsieur le président de la République ont  été plébiscités à un taux très élevé, trop élevé même pour la conjoncture: 85% ! Il s’en est fallu de peu pour qu’on atteigne les scores de 98% prisé par les régimes autoritaires de la deuxième moitié du siècle dernier.                                                                            Pour qui prend-on alors  ceux à qui on dit  que le pouvoir a échoué ? Sachons faire la part des choses : qu’est ce qui s’est réellement passé le 5 août ? Ce jour là, le peuple a voté Oui, si bien massivement que tout le monde a voté : les présents ont voté Oui, les absents ont voté Oui, la majorité a voté Oui, l’opposition même a voté Oui. On dit même que des  morts qui ont ressuscité, se sont libérés des restes de leurs linceuls pour aller déposer leurs bulletins, OUI, dans les urnes. Le raz de marée «électoral» qu’il y a eu révèle une adhésion généralisée aux réformes proposées.

Mais tout ça, c’est le peuple et le peuple seul qui l’a fait. Pas le régime des généraux, pas le président Abdelaziz, pas le Premier ministre, ni même le président de l’UPR et les petits flagorneurs qui l’entourent. Non, non, Messieurs de l’opposition, n’exagérez pas !  N’allez pas dire que le peuple a rejeté cette réforme, que les bureaux de vote étaient déserts le 5 août 2017, qu’à l’intérieur du pays,  l’administration territoriale a procédé au bourrage systématique des urnes avec la complicité active de quelques potentats locaux stipendiés.                                                                                                     Ne dites pas non plus que mêmes les militaires n’ont pas été prompts à approuver les amendements ni que tous ces citoyens venus nombreux, le 3 août, ovationner le président Mohamed Abdelaziz dans l’espace de l’ancien aéroport, étaient là parce que les ministères et administrations publiques où ils émargent, leur ont fait l’injonction de se présenter sous peine d’être débarqués. Tout ça relève de l’exagération et puis, comme beaucoup se plaisent à le répéter à longueur de journée sur les chaines radio et télé, personne ne dispose de preuves qu’il y a eu de la fraude. Dans le pire des cas, il n’y a que des présomptions de votes multiples, de vote par procuration, de bourrage des urnes, de complicité flagrante de membres de bureaux de vote etc.. Il y a aussi, m’a-t-on dit, des bureaux dont le nombre de votants est supérieur à celui des inscrits ! Mais tout cela n’est pas un défaut rédhibitoire, la fraude étant, dit-on,  inhérente à toute élection en pays pas exagérément développé comme la Mauritanie. Et puis, bon, le pouvoir et son antique CENI ont, tous les deux, fait ce qu’ils peuvent mais n’ont pu voir aucun dépassement. Pour eux, le scrutin s’est bien déroulé et il n’y a pas grand-chose à signaler. Même son de cloche du côté de ceux qu’on appelle de façon emphatique  ’’les observateurs internationaux’’ et que personne n’a vus ou entendus. Ces derniers,  d’après la radio du pouvoir, ont  affirmé que  «le scrutin s’est déroulé dans la plus grande transparence et dans la plus grande équité». Que voulez-vous de plus ? Je suis sûr que certains comme le président Maouloud de l’UFP vont dire qu’il s’agit de simples ONG de pays, pour la plupart totalitaires, d’Afrique Centrale et qui ne disposent d’aucune expérience dans les domaines de la démocratie et des élections. Et puis, on ne peut même pas être très sûr qu’il s’agit de vraies ONG parce que nous avons eu à accueillir en grande pompe,  ici au palais présidentiel, un petit  bandit  qui se faisait passer pour un dirigeant d’ONG régionale !               Mais enfin, voyons, tout cela ne diminue en rien le mérite du pouvoir d’avoir invité  ces observateurs et peut-être même de leur avoir donné l’opportunité de voter, parce que, chez nous, vous savez, quand les électeurs boudent le vote, on trouve, par tous les moyens,  des votants pour les remplacer ! Et ça marche ! Vous allez voir, ce n’est pas le Conseil Constitutionnel qui dira le contraire. Avançons donc tout doucement pour atteindre le niveau de transparence et d’équité électorales où on était en…2007, il y a de cela dix ans. Mais tout de même, n’exagérons rien, les amendements sont passés et c’est cela qui importe !

Ely Abdellah