L’AMDH plaide pour un allégement des procédures d’obtention de la carte de séjour

22 December, 2016 - 00:59

Préoccupée par la situation des migrants en Mauritanie, l’Association mauritanienne des droits de l’homme (AMDH) a profité de la journée mondiale des migrants, célébrée le 18 Décembre, à son siège, pour exhorter les autorités publiques mauritaniennes à « alléger les procédures d’obtention de la carte de séjour aux migrants, afin qu’ils puissent en disposer dignement ». Occasion aussi pour inviter les autorités chargées du contrôle des titres de séjour d’agir à respecter les droits fondamentaux des personnes migrantes et de leurs familles en Mauritanie, ainsi que leur dignité humaine. Après avoir dénoncer la violence policière, devenue quasiment systématique, à l’égard des migrants, l’AMDH rappelle que la libre circulation est un droit universel inviolable et tient, enfin, à marquer « toute sa solidarité avec les migrants expulsés d’Algérie et les familles des disparus en Méditerranée ».

Dressant son bilan, l’AMDH estime qu’en « Mauritanie, l’année 2016 a été particulièrement marquée, en Mauritanie, par l’acharnement à l’encontre des migrants ». Ce traitement assez particulier a provoqué, au mois de Mai dernier la mort de Mody Boubou Coulibaly, un migrant malien, dans une course-poursuite avec une patrouille à Cité-plage. Les contrôles intempestifs, l’arrestation de dizaines de migrants à Nouadhibou, leur transfert à Nouakchott puis leur reconduite à la frontière, ont été des épisodes dramatiques des graves violations des droits des migrants dans notre pays. Il faut ajouter, à ce sombre bilan, les détentions arbitraires et ciblées des migrants, femmes, voire enfants mineurs, au centre de détention de Bagdad, devenu désormais tristement célèbre. A plusieurs reprises, des migrants se sont plaints des contrôles au faciès, des chantages policiers et des rafles à domicile.

« Les difficiles conditions d’obtention du titre de séjour ont ouvert le boulevard à toutes formes de pratiques illégales, impliquant, parfois, des autorités publiques mauritaniennes. Toutefois, l’AMDH, se réjouit de constater l’arrêt provisoire des contrôles opérés par la police, à l’encontre des étrangers ». Brossant la dramatique situation des migrants, Ousmane Chérif Touré a ainsi noté la pause enregistrée dans les rafles, depuis quelques mois, même si les migrants restent toujours suspendus aux exigences des conditions inexistantes. Kalidou Ngaïdé, chef de l’antenne AMDH au Gorgol, a relaté, pour sa part, les vexations, humiliations et brimades que subissent les migrants débarquant à Kaédi et Boghé, souvent rackettés sur le chemin de Nouakchott, et appelle à leur protection systématique et accrue.

Pour rappel, en 2015, la Mauritanie a expulsé prés de 59% des ressortissants sénégalais et 1% de migrants tunisiens. Des chiffres éloquents qui incitent le sociologue Ousmane Wague à constater combien la liberté de circulation des migrants « peut être restreinte par des règlements administratifs mal dosés et, parfois, laconiquement appliqués ». Le calvaire que vivent les mauritaniens de France a été aussi dénoncé. Appel a été lancé pour une facilitation de la procédure d’octroi de la carte de séjour dans les préfectures françaises et de l’enrôlement des mauritaniens. Silèye Ba a révélé qu’un problème de talon retarde la délivrance des cartes de séjour, soulignant que le ministère de l’Intérieur s’achemine vers un retour à la procédure initiale, à savoir : « le demandeur doit impérativement justifier le motif de son séjour en Mauritanie, fournir un certificat de résidence, un extrait de casier judiciaire, un certificat médical, présenter carte d’identité ou passeport de son pays d’origine ». Il y a quelques semaines un scandale a défrayé la chronique, entraînant le « retrait de la police nationale dans les contrôles des étrangers à Nouakchott, jusqu’à nouvel ordre ». C’est, selon une source policière, l’ordre du nouveau patron de la Direction de la Sûreté Territoriale (DST), El Ghacem ould Sidi Mohamed. Tous les véhicules de la police destinés aux patrouilles de contrôles sont immobilisés dans les locaux de la Direction Générale de la Sureté Nationale (DGSN).

A l’origine de cette décision, un vaste scandale de corruption découvert au centre de rétention des étrangers du Commissariat de Bagdad. Dès sa prise de fonctions, le commissaire principal a diligenté une enquête impliquant deux hauts fonctionnaires de la police. Un autre réseau de trafic d’influence est en cours de démantèlement. « Une longue enquête de la DGSN […] a permis de découvrir une affaire de corruption et de contrôles à domicile des migrants non-autorisés », commente un membre de l’AMDH. Et de rappeler : « La journée des migrants est une occasion, pour nous, défenseurs des droits humains, d’attirer l’attention de la Communauté internationale et, en particulier, l’opinion nationale, pour prendre davantage en compte la question des migrations qui sont devenues aujourd’hui une réalité incontournable. Les raisons qui militent en faveur de cette mobilité des populations du Sud vers le Nord sont compréhensibles. Les gens quittent leurs pays pour rejoindre leur famille, chercher une stabilité ou en quête d’un avenir meilleur ».

 

Synthèse Thiam