Assises des assemblées générales FMI/Banque mondiale 2016 : La croissance toujours en berne

20 October, 2016 - 00:50

Plongée dans la fièvre d’une précampagne électorale, avec les coups et attaques sous la ceinture les plus tordus, entre les camps démocrate, incarné par Hillary Clinton, et républicain, aux couleurs portées par le fruste Donald Trump, Washington, la capitale fédérale américaine, a accueilli les assemblées générales du Fonds Monétaire International(FMI)/Groupe de la Banque Mondiale (BM), du 7 au 9 Octobre dernier.

Dans cette cité divisée en deux par le cours du Potomac, relativement calme en comparaison avec la démesurée New-York, la crème économique et financière de la planète s’est concertée sur les grands problèmes de l’heure. Pour en brosser, au final, un tableau en légère évolution mais toujours globalement difficile. Constat plutôt morose : « la faiblesse de la croissance et des taux d’intérêt a des répercussions sur la stabilité financière. Même si les risques à court terme ont diminué, les autorités et les banques doivent s’attaquer aux problèmes structurels ».

Le FMI précise : « les risques qui pesaient, clairement il y a six mois, sur la stabilité financière, parmi lesquels le Brexit et ses répercussions mondiales éventuelles, le niveau élevé de l’endettement des entreprises dans les pays émergeants et l’incertitude entourant la transition de la croissance chinoise, se sont atténués ». Cependant, la vigilance doit rester de mise, en dépit de cette timide embellie car, estime encore Pierre Dattels, directeur-adjoint du département des marchés monétaires et capitaux du FMI, « les risques à moyen terme augmentent, parce que nous rentrons dans une nouvelle ère, caractérisée par la faiblesse chronique de la croissance, la persistance des taux d’intérêt bas et la montée de l’incertitude, quant à la situation politique et à l’action des pouvoirs publics ».

         

Mauritanie, attention au boulet de la dette

Pour la Mauritanie, l’année 2016 sera marquée par une timide remontée du taux de croissance du Produit Intérieur Brut (PIB), qui ne devrait cependant pas dépasser les 3,2%, avec une perspective de 4,3% en 2017, selon le FMI. Une réalité imputable au contexte exogène, pour un pays « qui traverse une phase délicate, du fait de la baisse des cours mondiaux du minerai de fer et, dans une moindre mesure, du pétrole. On a, toutefois, noté une bonne réaction des autorités en 2015 et 2016, avec la mobilisation des financements extérieurs. Mais il reste encore un gros travail à fournir, pour le mettre sur une trajectoire de croissance et diversifier son économie ».

Naturellement, la conséquence immédiate de la mobilisation des ressources extérieures pour faire face à la chute drastique des recettes tirées de l’exportation des produits de la base, est le  gonflement de la dette. Celle-ci représente, actuellement, 93% du PIB, selon le FMI, alors que la moyenne africaine se situe légèrement en dessous de 50%, selon un chiffre de la BM. La Mauritanie serait alors un pays pauvre, traînant, comme un boulet, une dette de riche. Cette analyse est à prendre avec une certaine réserve. Car, sur ces 93%, la part du Koweït, 20%, représente une dette inactive. Ce qui ramène les engagements de la Mauritanie « à un niveau plus soutenable de 73% du PIB », estime le FMI.

Pour faire face à cette situation, l’institution financière internationale invite les autorités mauritaniennes à agir sur plusieurs leviers : « la balance des paiements, à travers une réforme du marché des changes, pour le rendre plus flexible ; le maintien de la dette publique à un niveau soutenable et l’amélioration du climat des affaires, dans un objectif de diversification de l’économie ».

            

L’Afrique subsaharienne, toujours au creux de la vague

Pour sa part, la région Afrique subsaharienne reste dans le ventre mou des performances avec un taux de croissance inférieur à 2%, en 2016, soit le plus mauvais depuis vingt ans. Une croissance en berne du fait « d’un environnement international difficile, marqué par la chute des prix du pétrole et des autres produits de base et la réalité des marchés financiers qui étouffe les opportunités de croissance », selon Abebe Sélassié, un cadre fraîchement promu directeur du département Afrique subsaharienne du FMI.

Les exemples les plus significatifs de cette réalité morose sont incarnés par le Nigeria, premier producteur de pétrole du continent, dont l’économie est en récession, et l’Afrique du Sud, grand exportateur de nombreux produits de base. Mais, aussi, plusieurs pays d’Afrique australe, confrontés à une terrible sécheresse. Pour relancer la croissance dans la région, le FMI préconise « des réformes portant sur la diversification de l’économie et des actions combinées, au niveau budgétaire, fiscal et monétaire, ainsi qu’une meilleure intégration dans le commerce sous-régional, régional et international ». 

Mais, à côté de cette multitude de pays avec un accroissement plombé du PIB, on retrouve des Etats dotés d’« une croissance robuste », à l’image de l’Ethiopie, de la Tanzanie, du Rwanda, de la Côte d’Ivoire et du Sénégal, dont les économies ont  titillé les 6% de points de croissance de PIB, en 2016, avec de très bonnes perspectives pour 2017. Un mouvement porté par le souffle des investissements dans les infrastructures, selon le nouveau directeur du département Afrique subsaharienne du FMI.

 

Amadou Seck, envoyé spécial à Washington