Orchestration et mauvaise foi

2 June, 2016 - 19:12

Depuis le discours de Néma du 3 juin, la polémique ne cesse d’enfler autour de la problématique Harratine. Chacun y allant de son interprétation selon son positionnement politique. Aziz aurait insulté les Harratines pour les uns. Aziz les aurait cajolés pour les autres. Toutes choses totalement inutiles qui n’avancent en rien la problématique que pose, en termes de revendications sociales, politiques et économiques, un emblématique Manifeste depuis 2013. Mais, autant ces revendications sont totalement légitimes, autant les incompréhensions et les tiraillements dont les entourent les Harratines eux-mêmes sont insensés  voire suspicieux. Les sorties médiatiques qui se suivent ces derniers jours sont éloquentes et dénotent de cette tension qui prévaut entre clans Harratines toutes tendances confondues. Le choix des invités aux émissions de télévisions publique et privées démontre l’orchestration et la banalisation que certains milieux rétrogrades et réfractaires essaient de faire véhiculer. La communauté Harratine regorge de grands militants de cette cause et de cadres très valables capables de développer avec responsabilité et clairvoyance les termes de référence autour desquels toute l’approche de l’émancipation de cette importante communauté nationale est fondée. Plus de la moitié des fondateurs du mouvement El Hor sont encore vivants et ne cherchent qu’à se faire inviter pour expliquer l’histoire. Les contourner pour aller se faire raconter des balivernes et des contrevérités participe de la malveillance et de la mauvaise foi. Tout simplement. Mais personne n’est dupe. Les manipulations des services de renseignements via la Direction Générale de la Sureté Nationale (DGSN) ou le Bureau d’Etudes et de Documentation (BED) sont un secret de Polichinelle. Ceux qui y entrent et en sortent sont connus de tous. Depuis la naissance de leur premier mouvement le 5 mars 1978, les Harratines de toutes les régions et de toutes les catégories professionnelles luttent pour leur émancipation. Certains sont morts et d’autres attendent encore. Personne ne doit se prévaloir d’avoir le monopole de cette lutte. Surtout quand beaucoup n’ont fait que se servir du combat sans jamais l’avoir servi. Peu de gens connaissent feu Sidi Ould Jaber, éminent mathématicien Harratine décédé dans des circonstances non encore élucidées en 1981 à Tunis et l’un des précurseurs de ce combat. Tout comme peu de gens connaissent le modeste professeur El Keihel Ould Mohamed El Abd qui fut l’un des membres fondateurs les plus emblématiques de ce mouvement. Il est impossible de passer sous silence ou d’amoindrir le rôle de personnalités comme Boydiel Ould Houmeid ou Boubacar Ould Messoud tous deux impliqués dans le procès de Rosso de 1980 pour répondre de charges liées aux revendications de l’émancipation des Harratines. Des hommes de l’envergure d’Oumar Ould Yali et autre Béchir Demba ont joué des rôles très importants. C’est la somme de tous ces efforts de personnalités connues et d’autres anonymes qui ont permis aujourd’hui qu’il n’est plus ni possible ni admissible que quelque chose se fasse sans les Harratines. Qui, paradoxalement, à cause de leurs divergences attisées par la malhonnêteté des uns et  la perfidie des  autres constituent le principal problème qui les empêche de prendre définitivement leur place à côté des autres communautés nationales. Allah ne change ce qui est en un groupe tant que celui-ci n’ait pas changé ce qui est en lui. Or, tant que les Harratines s’entremangent et se nient, ils resteront toujours au fond de la nasse.  Tant que ceux de la majorité continuent à croire que leur petite situation compte plus que la cause. Et que ceux de l’opposition tergiversent sur leur position. Alors que les comportements de certains symboles historiques du combat attestent de la démission et du fourvoiement. L’émancipation des Harratines est compromise. Personne n’est aussi mieux servi que par soi-même. Certains peuvent continuer à mentir pour se maintenir. D’autres à surveiller le moindre corridor pour s’engouffrer. Ou encore se compromettre et snober les autres pour se faire paraître le centre de l’univers en espérant assurer une retraite paisible. L’histoire rattrapera tout le monde.

 

El Kory Sneiba.