La COFACE tire la sonnette d’alarme : Une économie mauritanienne vulnérable aux chocs externes

17 March, 2016 - 01:01

« L’inflation devrait augmenter en 2016 en Mauritanie, sous l’effet de la légère hausse des prix du gaz et des produits alimentaires », selon une étude de la Compagnie Française d’Assurance pour le Commerce Extérieur (COFACE), une institution spécialisée dans l’assurance- crédit et la prévention des risques, au niveau international. En Mauritanie, poursuit cette étude, « la croissance dynamique est tributaire des ressources naturelles, l’économie vulnérable aux chocs externes et, quoique la situation politique soit normalisée, l’environnement sécuritaire reste fragile ».

Le décryptage de la compagnie expose « les points forts de l’économie mauritanienne : soutien des bailleurs de fonds et des organisations internationales, richesses minérales et halieutiques abondantes, bonnes perspectives énergétiques (pétrole, gaz et énergies renouvelables) ». Mais, aussi des « points faibles : environnement sous-régional marqué par une instabilité politique et sécuritaire persistante,  économie peu diversifiée et vulnérable aux fluctuations des cours des minerais (fer, cuivre, or, quartz, phosphates) et des hydrocarbures, ainsi que des prix des denrées et alimentaires ».

 

Forte dépendance à l’égard des exportations minières

Cette étude fait donc remarquer que « malgré le maintien d’une croissance vigoureuse, l’économie mauritanienne demeure vulnérable aux chocs extérieurs. En cause, sa forte dépendance à l’égard des exportations minières qui occupent une place prépondérante, dans le total des exportations. Ainsi, le solde courant devrait pâtir de la détérioration des termes de l’échange causée par la chute des cours des minerais, de la fermeture momentanée de la Société Nationale Industrielle et Minière (SNIM) et du déclin de la demande chinoise. La détérioration de la balance commerciale et du compte financier ne serait pas compensée par la hausse des transferts courants et des revenus. Quant aux réserves de change, elles devraient rester élevées avec près de sept mois d’importations. La préservation d’un tel niveau de réserves est imputable à l’orientation flexible du taux de change ».

Après s’être amélioré en 2015, grâce à une meilleure gestion de la collecte fiscale, le déficit budgétaire du pays devrait, prédit  la COFACE, se creuser en 2016, en raison de l’effondrement des recettes non fiscales, principalement lié à la chute des revenus issus de l’exploitation minière et du secteur pétrolier. Enfin, le niveau de la dette publique mauritanienne demeurerait élevé, malgré les annulations de dette dont le pays a bénéficié. La dette publique mauritanienne est essentiellement une extérieure contractée et garantie par l’Etat. Le pays est fortement endetté envers le fonds souverain koweitien (Kowait Investment Authority) et des accords d’allégement de la dette avec le Koweït sont en cours de négociation.

Selon les analystes de la COFACE, la Mauritanie doit composer avec une situation géopolitique fragile. La sécurité reste un enjeu essentiel pour le pays, au vu de la présence de groupes terroristes dans l’espace sahélien, comme Al-Qaida au Maghreb Islamique (AQMI). Ces groupuscules radicaux, actifs sur le territoire mauritanien, représentent la principale menace pour la stabilité interne du pays. Afin d’éviter leur retour sur son territoire, la Mauritanie a lancé, début 2014, un projet de coopération sécuritaire intitulé « G5 du Sahel ». Dans ce contexte, le climat des affaires est détérioré, en raison de l’insuffisance des infrastructures financières et bancaires et de la corruption. Le rapport Doing Business classe le pays 168ème sur 189 pays. Néanmoins, quelques améliorations portant, notamment, sur la création d’entreprises, sont à noter.

 

Une croissance tributaire des ressources naturelles

Après avoir fléchi en 2015, l’activité de la Mauritanie devrait, toujours selon les projections du COFACE, « accélérer en 2016. La croissance devrait être soutenue par la relance de la production de la pêche qui compenserait, partiellement, le ralentissement de l’industrie manufacturière et minière. Pilier majeur de l’économie, le secteur primaire reste cependant particulièrement vulnérable aux fluctuations pluviométriques ». Malgré le recul de la production manufacturière, le secteur secondaire reste lui aussi central et devrait être, de l’avis de cette étude, stimulé par les activités de construction et de travaux publics, dans le cadre d’un programme d’investissement structurant. S’agissant du secteur tertiaire (secteur financier et commerce), celui-ci devrait poursuivre son expansion, pour devenir le premier contributeur à la formation du PIB. L’activité dans le secteur manufacturier devrait ralentir, et le secteur minier, dominé par la production de cuivre mais, surtout, de minerai de fer, continuerait à souffrir d’une demande extérieure peu porteuse et de l’absence de rebond du prix de ces matières premières, après la baisse observée en 2015. Par ailleurs, la croissance devrait être portée par la consommation domestique, stimulée par un fort recours au crédit à la consommation. A l’inverse, l’investissement devrait se tasser, en raison du ralentissement de l’activité minière. Au final, la Mauritanie pâtit d’un manque de compétitivité et d’une économie formelle restreinte et peu diversifiée.

Synthèse Kaaw Thierno