Dialogue politique : Vers la méthode Kagamé ?

3 September, 2015 - 11:47

Le nouveau dialogue politique que le pouvoir s’apprête à organiser, aux alentours du 7 Septembre,  pourrait plutôt ressembler à de nouvelles journées de concertation. En effet, si l’on s’en tenait à la stricte dimension politique, le refus du FNDU et les  réserves émises par la CUPAD semblent réduire à peau de chagrin la décrispation d’une situation fort enrhumée depuis Août 2008. Cherchant à expliquer le brutal changement d’approche du gouvernement, les deux pôles de l’opposition s’interrogent et tous de redouter le recours à la méthode Kagamé,  pour  modifier la Constitution  ou le régime.

Interrogés, les acteurs divergent sur l’analyse. Selon certains, Ould Abdel Aziz poursuit, depuis son arrivée au pouvoir en 2008, une même logique d’exclusion, s’attachant surtout à conserver le trône, malgré une Constitution qui limite le mandat présidentiel à deux. L’opposition qui reproche, au gouvernement, de manquer de cohérence et, surtout, de « sincérité », dans la recherche du dialogue qu’il n’arrête de prôner, croit, dur comme fer, que le pouvoir ne tente que de « rouler », une fois de plus, ses adversaires dans la farine. Les responsables du FNDU disent avoir compris le piège et refusent  d’y tomber.

Pour certains de la majorité, si le gouvernement a décidé de passer en force, c’est, justement, parce que l’opposition, essentiellement le FNDU, n’arrive pas à harmoniser les positions de ses différentes pôles, qu’elle freine le dialogue. Estimant avoir trop longtemps attendu la fin des « tergiversations » du forum, le pouvoir aurait donc décidé de faire monter les enchères,  en décrétant le 7 Septembre date-butoir pour démarrer le dialogue. Mais avec qui ? A moins d’une semaine de l’échéance, la question demeure sans réponse.

Mais, à en croire d’autres confidences, le pouvoir de Mohamed ould Abdel Aziz aurait décidé de changer d’approche parce qu’il se serait rendu compte de l’erreur commise, en dévoilant, trop tôt, les points à discuter, selon lui, ouvrant ainsi la brèche au FNDU qui a profité de l’occasion pour décliner sa propre vision de la Mauritanie. Ne pouvant accepter la feuille de route du Front, surtout par écrit, le pouvoir aurait donc décidé de faire machine arrière, en conviant, unilatéralement et par correspondance, les partis politiques à un dialogue dont la date devait impérativement se situer autour du 7 Septembre.  Une décision irrecevable, pour le FNDU ; tandis que la CUPAD demande plus de temps. A en croire cette source proche du pouvoir, le dialogue pourrait être ouvert à l’ensemble des partis politiques, diverses ONG-cartables et autres organisations de la Société civile. On imagine alors le résultat : un plébiscite pour la tenue d’un référendum ; qui aurait à se prononcer, soit sur la modification de l’article 26 de la Constitution, soit sur un changement de régime ; le second terme de l’alternative paraissant, de l’avis de nombreux  observateurs, plus jouable que le premier.

 

Un 3ème mandat en ligne de mire ?

Se rendrait-on, ainsi, à la méthode Kagamé  qui, délaissant ses collègues  NKurunziza  ou Compaoré, fait appel aux citoyens, pour briguer un troisième mandat ? En fin manœuvrier, Kagamé fait recours à une consultation « populaire », le Parlement  étant ensuite amené à « entériner »  le choix du peuple  « souverain », comme l’a si bien lancé Donatilla Mukabalisa, la présidente de l’institution rwandaise : « Je veux remercier tous les membres du Parlement pour leur soutien aux souhaits du peuple ».

Quelques semaines avant le vote des parlementaires, plus de 3,7 millions de Rwandais, sur un corps électoral de quelque six millions, ont, en effet, signé des pétitions demandant, au Parlement, de modifier l’article 101 de la Constitution, limitant à deux le nombre de mandats présidentiels successifs.

Chez nous, c’est de la nature des participants au dialogue que dépendra l’issue du dialogue décrété par le pouvoir. Les prémisses commencent à éclore. Timidement. Lors des tournées à l’intérieur du pays, on n’a guère entendu de voix appelant le Président à réclamer un troisième mandat. Les chefs de tribus et les élus auraient-ils préféré n’y faire allusion que lors des audiences que le  Rais leur a accordées en comité restreint, sinon privé ?  

DL