Autour d'un thé

6 August, 2015 - 11:38

Nous réapparaissons le 5 Août. Cinq, c’est juste avant six. Un, deux, trois, quatre, cinq et six. Après deux bonnes semaines de repos. Mérité ou pas. En Août. Le mois au cours duquel la fourmi a promis à la cigale de lui restituer un certain quelque chose. Foi d’animal, lui dit-elle. Août, c’est pas n’importe quel mois ! Ce mois est un mois, comme disait l’ancien charlatan. Tant qu’il n’est pas fini, ce mois, tant qu’il n’est pas mort, on le suit. On le regarde. On l’attend. Le mois d’Août. En tout cas, voilà, nous, les trois Nouakchott, baignons dans l’eau. Nos trois capitales nagent. Si au moins elles baignaient dans l’huile ! Comme des beignets. Ah, les fameuses infrastructures ! Chaque fois rudement mises à l’épreuve. C’est vrai que les goudrons, c’est pas pour retenir l’eau. Un goudron, c’est pour que les automobilistes roulent à très vive allure. A gauche. A droite. Dans les trois Nouakchott. D’ailleurs, les goudrons sont goudronnés. C'est-à-dire qu’ils sont imperméables. Impossible, à nos goudrons, d’absorber l’eau. Les goudrons ne boivent pas l’eau. Les goudrons ne mangent pas. Ne se mangent pas on plus. Il y a sept ans, depuis Août 2008, c'est-à-dire, vers le début de la Rectification Bénie, les eaux de pluie, quand elles venaient, envahissaient honteusement le seul Nouakchott de l’époque. Les goudrons n’étaient pas si nombreux qu’aujourd’hui. Y avait même pas encore d’UPR. Tout était encore en place. Les députés des partis de l’opposition (APP, RFD) n’avaient pas encore rejoint l’autre côté. Ils avaient frondé. S’étaient militarisés. Et, même, généralisés. Mais, ils n’étaient pas encore totalement transformés. Leurs masques n’étaient pas encore tombés. Les caniveaux des Chinois, les camions citernes de l’ONAS : flambant neufs. Les Japonais qui promettent de reconstruire les Nouakchott. Les eaux sont rebelles. Quand ça pleut, ça nage. Ça déborde. La pluie, c’est la pluie. « Jamais elle ne gâte ce qu’elle ne répare ». Vieil adage des cultivateurs et des éleveurs. Pourquoi cet hymne à la sécheresse ? Il faut se mouiller un peu. Le sec ne nuit pas au sec. L’eau, c’est la vie. Ça fait quoi, d’avoir de petits fleuves dans nos Nouakchott ? La Seine, c’est en plein dans la ville. Le Rhin, le Tigre, l’Euphrate, le Nil, le Zambèze, le Mississipi. Mais c’est enrichissant, ces petites mares qui luisent au soleil, entre les banques, les ministères, les hôtels ! Juste devant la BCM, à quelques mètres de la Présidence. Des flaques d’eau démocratiques. Respectueuses des droits humains. Du genre. De la majorité comme de l’opposition. Elles sont devant les ambassades. Devant les sièges de tous les partis. Même des plus petits. Pas de distinction. Séparés mais égaux dans les mares, les flaques, les senteurs désagréables. Tevragh Zeïna. Kouva ou Basra. Neteg. Carrefour Bamako au PK ou virage Ould Badou à Dar Naim. Carrefour Yéro Sar au 6ème. Les boutiques 10 ou carrefour M’sid Ennour. Legreïgué ou Dubaï, vers la sortie de la Route de l’espoir, c’est tout comme. Bon, c’est pas de maintenant, comme vous savez. Les présidents qui sont venus avant n’aimaient pas la Mauritanie. Du temps où il n’y avait qu’un seul Nouakchott, c’était plus facile de gérer la pluie. Soixante années de gabegie, ce n’est pas en sept ou huit ans qu’on peut régler ça. Ce sont des héritages de laisser-aller qui ont engendré des « tarakoumatt ». C’est pas nous. Nous, c’est qui ? C’est eux. Il faut procéder par étape. De 2008  à 2015, c’était l’armée. Il fallait avoir une armée. Maintenant qu’on l’a, bon, on va penser à avoir une capitale ou trois capitales qui ne se mouillent plus à n’importe quel crachat. C’est le projet de 2015 à 2019. Après, on va avoir une école. C’est de 2019 à 2028. Puis une nation. Puis une équipe de football. Puis une presse. Puis une démocratie. Puis une opposition qui va concocter un bon programme, afin qu’il y ait une alternance au pouvoir à l’horizon 2056, après un dialogue inclusif, sans conditions ni préalables. Mais il n’y a que la mort qui vient en même temps. Salut.