Promouvoir l'agroécologie pour une agriculture durable en Mauritanie

8 May, 2024 - 13:11

La malnutrition et l’insécurité alimentaire demeurent un problème majeur pour la Mauritanie où l’on estime que près d’un enfant sur cinq souffre d’un retard de croissance. La majorité de la population vit en zone rurale et le pays doit lutter contre les défis du changement climatique et la désertification. Dans ce contexte, l'agroécologie émerge comme une agriculture qui prend en compte les personnes et l'environnement.

Grâce au financement, entre autres, du gouvernement de Valence, la transition agroécologique, une approche en faveur de la souveraineté alimentaire et d'un développement rural à la base paysanne, est un pilier des actions AMAD/CERAI en Mauritanie promouvant l'utilisation durable des ressources naturelles et l'amélioration des compétences des agro-éleveurs et agro-éleveuses familiaux. Les systèmes alimentaires paysans locaux fondés sur l’agroécologie se révèlent très résistants face aux chocs, procurant des moyens innovants pour y faire face. Dans toutes les régions, l’agroécologie soutenue par la communauté suscite un intérêt croissant et de nouveaux réseaux sont en train de se tisser entre les communautés rurales et urbaines. L'agroécologie se révèle ainsi une approche holistique pour relever les défis contemporains en offrant un changement de paradigme vers une production durable à l’échelle familiale. Un formidable potentiel pour nourrir le monde d’une manière durable.

 

Initiatives soutenues par AMAD et CERAI en Mauritanie

Les ONG CERAI et AMAD travaillent en collaboration avec les communautés locales depuis quinze ans à promouvoir un processus de transition agroécologique le long de la vallée du fleuve Sénégal dans les régions du Trarza et du Gorgol. Il s’agit concrètement de développer des systèmes alimentaires plus sains, durables et équitables, et atteindre la souveraineté alimentaire en Mauritanie. Nous travaillons au niveau des exploitations familiales, en promouvant des pratiques agroécologiques, en renforçant les capacités des agriculteurs et agricultrices et en les accompagnant selon les principes de la méthodologie « paysan à paysan ».

L'adoption de pratiques agroécologiques en Mauritanie présente de nombreux avantages qu’AMAD et CERAI n’ont cessé de présenter aux agriculteurs depuis des années. Plusieurs approches et techniques ont été mises en place par ces organisations afin de contribuer aux changements de mentalité vers une agriculture respectueuse de son environnement, améliorant les productions et diversifiant des systèmes alimentaires locaux. La récupération et la promotion de la biodiversité cultivée, comme la multiplication et la conservation de semences locales adaptées à la climatologie locale, la promotion des haies vives et la plantation d’arbres sont essentielles pour contenir les ravageurs et mieux conserver l’eau.  

En ce qui concerne l’amélioration de la production, plusieurs techniques ont été expérimentées avec les exploitants afin d’assurer la transition vers l’agroécologie par des approches simples et faciles à répliquer au niveau local. Ces formations étaient un point de départ vers une production tenant compte de la personne qui produit, de son environnement et de la qualité de ses produits pour les consommateurs. Les fertilisants organiques comme le fumier hygiénisé, le bostol oú le bokashi ont démontré leur efficacité dans l’amélioration de la production et la réduction des intrants. Une approche de chaîne productive et innovante est aussi soutenue, permettant un développement endogène. Cela fut notamment le cas de la chaîne de production laitière locale. À partir d'entreprises dirigées par des femmes – les mini-laiteries – le lait produit localement est transformé et vendu localement, un produit du terroir et sain.

 

Une efficace méthode

La méthode « paysan à paysan » est à un processus participatif de promotion et d'amélioration des systèmes de production ruraux, basés sur le principe de la participation, l’innovation et l’appropriation. Elle favorise l'autonomie des paysans et l'échange de connaissances entre les agriculteurs, génère des capacités et initiatives qui perpétuent le développement des connaissances et des pratiques, une fois l'intervention terminée, et fonctionne très bien dans le cadre des organisations à la base paysanne. La Vallée dispose ainsi d’une vingtaine de promoteurs agroécologiques, agriculteurs et agricultrices familiales qui pratiquent et communiquent avec ses voisins, avec l’appui de dix animateurs et animatrices qui accompagnent le processus de transition agroécologique. 

 

Des défis encore à relever

Malgré ses avantages, l'adoption généralisée de l'agroécologie en Mauritanie est confrontée à plusieurs défis, notamment la faible gouvernance de la composante sociale et surtout la fragilité du tissu associatif local. L’une et l’autre sont essentielles et doivent être soutenues pour amplifier la transition. Il est nécessaire que les agro-éleveurs et agro-éleveuses partagent et se rassemblent autour des principes de justice sociale et d'économie sociale et solidaire. C'est en ce but qu’AMAD et CERAI accompagnent les organisations et communautés locales pour défendre la production et consommation des produits locaux.

Principalement basés sur des pratiques agro-écologiques et des circuits à petite échelle, les systèmes alimentaires locaux sont les soutiens actuels du pays et ceux de demain, lorsque la crise climatique augmentera sa pression. Il s'agit d'un défi difficile mais pas insurmontable et de nombreuses initiatives sont déjà mises en œuvre à cette fin. Une chose est cependant certaine : toute politique ou programme entendant traiter efficacement les effets combinés du changement climatique et de l'alimentation doit s'appuyer sur une approche intégrée, concentrée sur les principaux acteurs du système alimentaire africain, en grande majorité des femmes et des jeunes.

AMAD/CERAI