Le mythe de l’Etat s’effrite/ par Ahmed Bezeid ould Beyrouck

11 February, 2015 - 23:51

« Ne cachez pas votre témoignage. Quiconque le fait se rend coupable à l’égard de Dieu ». Saint Coran, sourate 2, « la Vache », verset 283. Je n’écris pas comme d’autres préparent des coups d’Etat. Je ne convoite ni pouvoir ni honneur, je veux seulement dire, devant mon pays, ce que j’ai vu et ce que je pense. Pour la petite histoire, j’ai raison : à bon entendeur, salut !

Roger-Gérard Schwartzenberg a publié « l’Etat Spectacle », un ouvrage dont le contenu est en phase avec ce qui se passe en Mauritanie, pays où l’Etat est devenu une institution  captive des caprices et des dérives. Sous la pression de la gestion solitaire du pouvoir, de la désinvolture libertaire et des sempiternels calculs politiciens, ainsi s’effrite le mythe gigantesque du socle de granite sur lequel repose l’autorité de l’Etat et sa forte responsabilité. Il est aujourd’hui, en Mauritanie, on ne peut moins douteux que l’Etat, soit totalement sorti de sa sphère, pour épouser les contours d’un groupe politiciens au-dessus  duquel trône un chef peu enclin aux normes républicaines. Sous le couvert d’un pouvoir discrétionnaire qui outrepasse le Droit, les vandales du régime sont absouts, les victorieux suspectés d’ambitions interdites et l’Etat directement utilisé pour solder des comptes ou ériger en règle ce qui n’est pas réglementaire. Sous  Moctar ould Daddah, sous Maaouya ould Taya, l’Etat fut toujours une force mythique, dotée d’une autorité républicaine qui en exerçait le commandement légitime. Les prédécesseurs d’Ould Abdel Aziz étaient entourés d’hommes d’Etat chevronnés. Mais les actuels ministres et autres politiciens, placés, au hasard, au sommet ou au cœur des institutions, sont plutôt l’incarnation absolue de la bouffonnerie et de l’inculture. Iconoclastes, inconnus du public, maniables comme des marionnettes, sans autonomie, politiciens jusqu’au bout des ongles, bavards comme des aras chloroptères, ils prennent le pouvoir comme une fin en soi. L’éthique n’a pas de place dans cet environnement-là. L’héritage que l’actuel président laissera sera, entre autres, un Etat en dégénérescence, à cause de la pipolisation et de l’inculture des politiciens qui en tiennent insidieusement les leviers de commande. Où va un pays, quand son chef est incapable de constituer une équipe gouvernementale composée d’hommes et de femmes légitimes, animés d’un esprit loyal et patriotique ? La politique est devenue un show et une parade de gens du pouvoir où haine, jalousie, fétichisme, conspiration, menace et chantage se mêlent dans une confusion totale qui prend, in fine, l’Etat en otage. La République est bien menacée. L’Etat devient un espace où le spectacle s’unit à la parade, pour transformer les citoyens non pas en acteurs de développement mais en spectateurs d’un pouvoir discrédité, en permanente représentation théâtrale.

 

Ahmed Bezeid ould Beyrouck

Je ne suis ni l’opposition,

ni de la majorité présidentielle.

Je suis ailleurs.

A bon entendeur, salut !