M. Messaoud Ould Boulkheir, président de l’Alliance Populaire Progressiste (APP), du Conseil Economique, social et environnemental (CESE): ‘’La seule issue encore possible est un dialogue inclusif dont l’objectif serait la refondation de la République’’

8 September, 2022 - 00:47

Le Calame : Commençons par cette question d’une actualité brûlante : Aucun quartier de Nouakchott n’est épargné par les eaux de pluie qui ont occasionné aussi de  nombreux dégâts à l’intérieur du pays. Comment trouvez-vous la réaction des autorités pour soulager les sinistrés?

-Messaoud Boulkheir : En vérité, il n’y a pas eu de réaction du tout… ni en amont, ni en aval, ni en le moment, malgré les alertes lancées des années auparavant et jusque dans les semaines d’avant les catastrophes.

Le sentiment général est l’absence totale d’Etat et la preuve absolue de son impuissance, voire de son incapacité à  faire face aux multiples problèmes qui font prendre l’eau de toutes parts au frêle navire Mauritanien.

 

-Au cours d’un point de presse, l’Inspecteur général d’Etat (IGE) a laissé entendre qu’après plusieurs missions d’inspections auprès des institutions publiques, elle a relevé plusieurs irrégularités dans la gestion, que certains que des responsables ont été sommés de restituer les montants détournés – ce qu’ils auraient fait, que d’autres ont été renvoyés devant la Cour des Comptes etc. Quels commentaires vous inspirent ces déclarations ? Partagez-vous l’avis de ceux qui considèrent cette sortie comme étant un aveu d’échec en dépit de la volonté politique affichée, de l’arsenal juridique existant et du précédent qu’a été le dossier dit de la décennie ?

 - Je n’ai pas suivi personnellement le point de presse en question mais tous les commentaires que j’ai pu entendre à ce sujet sont dans l’ensemble très mitigés.

 

-Le président Ghazwani a bouclé, le 1er août 22, trois ans à la tête du pays. Quelle évaluation de sa gouvernance ? Quel est l’état de vos relations depuis son élection ?

- Mon évaluation personnelle n’est un secret pour personne et pas en tout cas pour Le Calame ; quant à mes relations avec Monsieur le Président, elles ont connu des hauts et des bas comme toutes relations humaines. Je lui reconnais néanmoins, dans les deux cas, une très grande faculté d’écoute, même si les résultats attendus sont souvent en deçà des espérances. Est-il besoin de rappeler qu’il faut beaucoup plus que la patience et la tolérance pour construire un Etat ?

 

-Célébré par le parti INSAF et ses alliés de la majorité, cet anniversaire est intervenu après deux faits marquants. D’abord l’augmentation du prix du carburant et ceux du transport mais également les huées à  l’endroit du président de la République au stade de la capitale. Quelle lecture vous avez faites de ces évènements?  

- Ces épisodes que vous évoquez et qui caractérisent plus que ne le feraient les mots une situation que je regrette profondément plus que tout, synthétisent ensemble et, chacun, pris séparément, l’improvisation,  (donc l’imprévoyance), la patience, la tolérance et l’absence de réactivité  rapide et appropriée  qui alimentent toutes les critiques.

 

Votre parti APP a pris part à la réunion organisée par le  ministère de l’intérieur  avec  les partis politiques et dont l’objectif était de préparer les prochaines élections municipales, législatives et régionales. Quelle appréciation vous faites de cette rencontre ? Qu’a-t-elle produit comme résultat ?

- Pour chaque Parti politique, les élections, toutes les élections sont, avec le Projet de Société dont ils sont porteurs, les seuls atouts dont ils disposent. Puisque le Parti a été convié à une réunion pour débattre d’élections, j’ai choisi d’y participer personnellement pour :

-          A) savoir dans les détails de quoi il sera question,

-          B) donner mon point de vue sur le sujet et

-          C) faire des propositions, s’il y a lieu.

S’agissant de A et B, j’ai considéré que le sujet aurait mieux gagné à être traité dans un cadre plus global tel un DIALOGUE, plutôt que séparément comme cela avait été le cas s’agissant de l’ENSEIGNEMENT et même du DECOUPAGE ELECTORAL (Administratif.)

            Face à la Majorité écrasante des positions contraires dont le principal argument a été le refus de tout report des échéances électorales en vue, je me suis joint au point de vue général et souhaitant toutefois que tous les autres problèmes soient soumis préalablement à une étude au sein de chaque Parti. C’est ce qui me fera répondre en C qu’en terme de résultat, nous sommes toujours dans l’attente de la Réunion générale des Partis qui se tiendra autour de la synthèse des positions des uns et des autres promise par le Ministère de l’Intérieur et de la Décentralisation.

-Selon  le  ministère de l’intérieur, la rencontre a porté sur la refonte de  la  CENI,  les questions de  l’état civil et le vote de la diaspora... A votre avis, un consensus autour de ces questions suffirait-il  pour la tenue d’un scrutin inclusif, crédible  et transparent ?

- La crédibilité et la transparence des élections dépendront toujours de la conjugaison de multiples efforts dont la garantie restera toujours aléatoire dans les pays tels que le nôtre. Il faut surtout implorer le Secours d’Allah.

                                                       

 

-Beaucoup se demandent pourquoi le président Messaoud Boulkheir qui fait a capoter le processus de dialogue par son refus d’y participer, a accepté de répondre positivement à l’invitation du ministre de l’intérieur ?

- Il faut apprendre à dépasser les choses qui ne sont plus d’actualité. Ce n’est pas moi, qui ai boudé mais ceux qui avaient mis un point d’honneur à mon exclusion des « concertations » entre les Partis politiques. Je n’ai pas de problèmes avec aucun d’eux pour me concerter avec lui. Je considère que se « concerter » ou  « dialoguer » c’est avec le Pouvoir et je reste dans cette position, n’en déplaise à mes détracteurs ou mes ennemis. Si les concertations devaient reprendre dans les mêmes conditions qui ont conduit à leur humiliant arrêt, je n’y participerais pas.

Cette réunion au ministère de l’intérieur a été boycottée  par l’absence du  RFD, de l’UFP et de l’AJD/MR. Votre commentaire ?

- C’est à eux qu’il faut poser cette question.

-Quelles sont selon vous, les problèmes que le dialogue devrait régler ? Que faire après l’interruption du processus de dialogue ? 

- La seule issue encore possible c’est UN DIALOGUE INCLUSIF dont l’objectif serait la REFONDATION de la REPUBLIQUE.

 

Le Parlement a adopté, il y a quelques semaines le projet de loi portant la réforme de notre système éducatif. Quelle appréciation vous faites de ce texte dont certains articles sont mis en cause par des  associations pour la promotion des langues  nationales Pulaar, Soninké et Ouolof  et intellectuels négro-africains?

- Je vous renvoie aux réponses des  questions n° 5 et n° 10.

 

-Pensez-vous que ce texte est de nature à renforcer et à consolider l’unité nationale du pays ?

- Le Vivre Ensemble implique une VOLONTE COMMUNE qui ne se réalisera jamais sans concessions mutuelles des acteurs, d’où la nécessité impérieuse du DIALOGUE en vue de la REFONDATION d’une REPUBLIQUE NOUVELLE, basée sur autre chose que l’Injustice, les privilèges indus, le tribalisme, le racisme, le communautarisme, le mensonge, la démagogie, l’Absence des Libertés et du Droit.

 

-Pensez-vous qu’il est possible que l’opposition mauritanienne puisse parvenir à un consensus autour de listes communes lors des prochaines élections locales ?

- Je n’en désespère jamais tout en espérant que les Alliances pour la recherche du meilleur n’accouchent pas du pire…comme cela s’est vérifié parfois.

 

                                          Propos recueillis par Dalay Lam