Autour d’un thé : Symbole, quand tu nous tiens !

12 November, 2020 - 00:36

Nous sommes un monde qui aime les futilités. Ce n’est pas que je n’aime pas les symboles. Qui d’ailleurs de ma génération n’éprouve pas un peu d’appréhension quand il entend parler de symbole ? Attention : futilité et symbole, ça fait deux, voire trois ! Justement, pour bien apprendre le français à leurs petits élèves – Et ça, j’aimerais bien que Macron l’entende de sa bonne oreille…  – les instituteurs usaient et parfois abusaient de petites techniques et stratégies pédagogiques qui obligeaient les petits « zinzins »  – entendez « enfants », comme disait un vieux cuisinier colonial guinéen installé depuis des décennies chez nous – à s’exprimer dans toute la nuance du vocabulaire. Un président-symbole. Il ya un an, le tout nouveau nôtre de la République ouvrait l’année scolaire à partir de Tarhil. Un quartier populaire aux confins de la capitale. Au ban du lieu. Les ministres, les hommes d’affaires, les partis politiques, leur président et directoire respectifs, les organisations de la Société civile, les media officiels et officieux, les troubadours et les curieux, les désœuvrés et les clowns : pour tout dire que tout le monde est venu dans cette école pour voir symboliquement le président de la république donner le coup d’envoi symbolique de sa première année scolaire. Exactement, comme il avait invité, à l’occasion de sa première fête de l’Indépendance, les anciens présidents et les gens de l’opposition avec leur chef de file. Et été, tout aussi symboliquement, très poli en les recevant et les raccompagnant. En les faisant asseoir aux premières loges, comme les membres du gouvernement et les grands chefs militaires et de sécurité. Vraiment, c’est très symbolique, tout ça. Si Kant a dit que l’habitude guide le monde, moi, je vous dis que les symboles éclairent les lanternes et suscitent les espoirs. Même pas un an que le président de la République a réglé symboliquement le problème des deux journalistes de l’AMI. N’est-ce pas là un symbole ? Et encore : qu’il est symbolique cet envoi de quelques illustres personnalités se soigner à l’étranger  sur le compte de l’État ! Qui ne décrypte pas les symboles ne peut pas apprécier les choses à leur juste valeur. Nous allons célébrer dans quelques semaines le soixantième anniversaire de notre indépendance nationale. Quel autre président a-t-il jamais pensé à donner autant de signaux et émettre autant de symboles ? Vive le symbolisme ! La ville de M’bout, c’est quoi ? Une citadelle de la vulnérabilité (pour s’exprimer dans le jargon approprié de Taa’zour et des agences internationales). Des gens là-bas auxquels personne ne pense, à commencer par leurs honorables députés. Un point de repère de ce triangle de je ne sais quel espoir, naguère appelé du désespoir ou de la pauvreté. Et voilà que comme ça, mine de rien, cadeau-bonus, les Mauritaniens t – tous les Mauritaniens : du plus haut au plus bas, du plus grand au plus petit, les ministres, les présidents des conseils régionaux, les maires, les hommes  et les femmes d’affaires, les membres du patronat, les cadres de la Vallée, les jeunes entrepreneurs, les ressortissants et descendants d’El Hadj Oumar Al Foutiyou, les fils des chérifs installés depuis des lustres, avec en renfort leurs cousins de Oualata, Tichit et même Nior –  tous les Mauritaniens donc, vont à Tichit où symboliquement un certain président de la République va donner le coup d’envoi de sa seconde année de son école républicaine. Ainsi les symboles se suivent et se ressemblent. Charretier-bachelier ou bachelier-charretier ! Quelle appellation serait-elle la plus symbolique ? On dit que les sujets sont sur la religion du Roi… Avalanche de millions au point de faire des jaloux et des contestataires, sur fond de n’importe quoi, soit dit en passant aux parents et soutiens du prétendu premier du baccalauréat. Votre fils a eu le bac. Il était major mais il n’avait pas de charrette. Alors, ne gâtez pas nos symboles, s’il vous plaît ! Sinon, moi, lorsque j’eus mon bac en 85, j’avais une houe. Malheureusement pour moi, les symboles n’existaient pas. Pas encore. Salut.

Sneïba El Kory