BCM-Gate : Faites vos jeux, rien ne va plus !

3 September, 2020 - 00:13

«À poil qui se cache derrière les jours» (el meddaraghebleyam 3aryane). Après avoir violé le corps institutionnel de l'Etat de droit, le régime militaire en dépèce les organes matriciels pour arbitrer ses vraies fausses querelles. Dans la ligne populiste de sa sortie médiatique au lendemain de son coup de maître-putschiste (2005), le père-fondateur de la décennie se fait fouettard de ses troupes rebelles. 

Le goudron au prix de l'or

Le naturel prime (Etab3ou emlekou). Quinze années plus tard, la verve ne souffre pas de réserve. En substances...: «je suis victime d'un règlement de comptes orchestré par les frères musulmans et mes sbires corrompus dont le chef a été promu ministre pour m'avoir criminalisé». Saints sacrements de l'argent-dieu obligeant, les vérités sonnantes et trébuchantes se limitent aux bribes et lapsus révélateurs. Au cours d'un inventaire revanchard des symboles de gabegie, le mot magique s'évade de la bouche présidentielle :«la banque centrale...Euh, euh...». Vite ravalé sous un déluge de «lingots d'or» : «la gabegie et la corruption sont les deux mamelles de l'Etat. Les banques et leurs millions. Les patrons et leurs patrons des patrons, leurs villas et leurs cylindrées...». Même si le code secret de la caverne d'Alibaba n'est pas divulgué, ses trésors sont éventés :«depuis les trente honteuses précédant ma décennie jusqu'à la piteuse année écoulée où le goudron sefacture au prix de l'or». À charge de revanche, l'héritier est rhabillé: «Ghanagate, c'est surtout l'affaire de l'actuel président. Je ne fis que voler à son secours. En ami fidèle et loyal, je l'ai tiré d'affaire».En clair :''monsieur propre est à l'origine d'une sale affaire internationale qui implique plusieurs Etats voisins».

Que le meilleur gagne 

À bon entendeur, les propos les plus alarmants ne sont pas toujours les plus tapageurs: «je n'ai pas touché un seul sou. Mes salaires sont virés sur le compte de mon épouse». Évoquant la fatalité qui menace toutes les parties des vendettas au sein d'une même communauté putschiste, : «j'ai remis mes deux passeports avec deux visas de cinq et dix ans et je ne fais pas de tentative de coup d'état». Un démenti menaçant pour l'héritier qui en vécut les réussites putschistes. Assorti d'un hommage à la marraine coloniale et l'action antiterroriste de son armée dans la région, un journaliste le conforte par un plébiscite de son bilan décennal à la tête de l'armée et son expulsion de l'ambassade d'Israël pour honnir le soutien de son héritier aux relations entre l'état hébreu et les Émirats arabes. Le message est vite reçu : les deux plus grands repris de sa justice fuitèrent leur diner familial avec deux ambassadeurs de tailleÉvoquant son ultime entrevue avec son successeur: «chacun a campé sur son camp». Autrement dit... Que le meilleur gagne! 

État juge et partie... 

Quant à la vraie traque des biens mal-acquis, elle s'incarne dans le scandale de la banque centrale dont les humbles témoins croupissent dans les geôles. Pour huiler le lavage des cerveaux, les villégiatures judiciaires des vedettes oligarchiques salivent les bouches et bouchent les oreilles. Le barreau se commet collectivement pour défendre un régime putschiste aux titres usurpés et sans moralité juridique : Etat de droit, ministère public, juge et partie civile...À l'arrivée, la pauvre justice peine à poser les bonnes questions pour espérer les bonnes réponses : pourquoi un directeur braquerait-il sa caissière avec la complicité d'un convoyeur de fonds? Pourquoi les caméras seraient-elle pannées pendant le vol? Quand, comment et pourquoi la banque centrale ouvrirait-elle son musée à un ex-contractuel pour scanner une monnaie étrangère? Et le vrai-faux magot de faux dollars : existe-t-il, où est-il et d'où vient-il? Pourquoi la patrie du dollar n'en est pas fâchée ? Déni et caricature d'une parole folle n'en limitent pas le taux de pénétration anthropologique. La curée a beau vaincre le lion (lehmiyataghleb esba3), toute maldonne conduirait au chaos déjà flagrant dans les filigranes du gouvernement. À trop mépriser les lampistes en misant sur le poker menteur de la société civile contre l'armée et l'occident contre la France, l'on oublie dangereusement que le Mali est d'abord et avant tout : l'autre Soudan de Mauritanie...Faites vos jeux : rien ne va plus!

Cheikh Touré