Covid 19 : une révolution sanitaire lancée en Afrique ?

6 August, 2020 - 00:57

Aperçu de la situation

Ces chiffres (1) n’informent que très partiellement de la situation réelle. Il existe de très fortes disparités dans les méthodes de recensement à travers le Monde, quand ce n’est pas dans la sincérité des calculs (2). Mais des tendances sont tout de même lisibles. Déjà pressentie dès les premiers mois de propagation de la pandémie, la première situe le COVID à relative proximité de la grippe. La symptomatologie est similaire pour les deux infections virales mais la proportion de cas sévères ne semble pas être la même. Pour le COVID-19, les données disponibles à ce jour semblent indiquer que 80 % des infections sont bénignes ou asymptomatiques, 15 % sont graves et nécessitent une oxygénothérapie, tandis que 5 % sont critiques et exigent une assistance respiratoire. La proportion de cas sévères et critiques serait plus élevée que pour la grippe dont la version saisonnière inflige à l’ordinaire moins d’1% de décès.

D’autres tendances sont remarquables. Alors que leurs services de santé sont réputés des plus performants dans le Monde, les pays dits « développés » déplorent les plus élevés taux de mortalité (voir le rapport D/G du tableau). L’apparent paradoxe selon lequel l’excès systématique  d’hygiène provoquerait, à long terme, l’affaiblissement des défenses immunitaires se voit ici renforcé.  On constate également les performances sanitaires de plusieurs pays de l’Asie du Sud-est, notamment au Cambodge, Laos et Vietnam où de précises rigueurs de gouvernance (cf. le rapport P/C du tableau) se sont conjuguées à l’utilisation de thérapies indigènes éprouvées pour réduire la mortalité à zéro. Un exemple pour l’Afrique ?

La volonté de trouver des réponses typiquement africaines y est en tout cas évidente. Les chercheurs de l’université ougandaise Makerere et les ingénieurs de Kiira Motors se sont ainsi récemment associés pour produire un respirateur économique appelé Bulamu, conçu pour assurer la survie des patients atteints du Covid-19 et autres maladies. Les respirateurs seront installés dans des centres médicaux partout dans le pays. Et la ministre de la Santé Jane Ruth Acengde déclarer à Uganda Update News : « Je suis fière des innovations ougandaises qui offrent des solutions locales à nos problèmes quotidiens ». L’échec patent des pays « développés » dans la gestion de leur propre quotidien « covidé » a lancé un processus révolutionnaire sans précédent dans le Monde.

 

Collaboration entre les médecines traditionnelle et conventionnelle ?

Avec des questions émergentes : quel est le rôle et la place de la médecine traditionnelle africaine dans ce combat mondial contre le nouveau coronavirus et particulièrement dans la communauté scientifique ? Pourrait-elle être prise plus au sérieux ? Devrait-elle être prise plus au sérieux ?

« Avant d'être écouté et entendu dans le Monde, il faut que nous-mêmes africains croyons en nous-mêmes. Quand je dis nous-mêmes, je parle des décideurs, les scientifiques, les universités », se désole Eric Gbodossou, un tradithérapeute qui gère un centre de médecine traditionnelle à Malango, un village situé à l'Ouest du Sénégal. « Il est vrai que le secteur », souligne-t-il, « est souvent désorganisé, laissant la porte ouverte aux charlatans ». Ces derniers sont d'ailleurs le principal mal dont souffre ce milieu. Mais des efforts de meilleure gouvernance sont en cours, avec parfois des appuis publics fort remarqués.

Ainsi le coup d’éclatrisqué du président malgache promotionnant le « CovidOrganics »,une décoction à base d’Artemisia censée guérir le Covid-19 ; ou, moins spectaculaire mais certainement plus argumenté, celui du Premier ministre gabonais en faveur de la « FagaraHertzii » dont les vertus immuno-reconstituantes ont été établies dans la lutte contre le SIDA ; ou encore la plate-forme technique officielle mise en place au Cameroun autour de la phytothérapie concoctée par l’archevêque de Douala, monseigneur Kléda…

En Guinée, l'Institut de Recherche et de Développement des Plantes Médicinales et Alimentaires de Guinée regroupe scientifiques et tradipraticiens pour mettre au point des médicaments à base de plantes. L'institut a lancé des essais cliniques des médicaments pour traiter le Covid-19. « Nous avons sélectionné des plantes qui ont présenté des activités significatives dans les domaines des défenses immunitaires, des invasions microbiennes et des inflammations. […] Nous allons présenter les produits qui présentent un meilleur intérêt pour tester cliniquement ces médicaments », dit le professeur Mamadou Aliou Baldé, directeur de l'institut.

Contrecarrés en Mauritanie par une mal-gouvernance notoire des disparités sociales – ethniques, tribales et plus encore statutaires… – les efforts de construction d’au moins une filière cohérente de produits phytomédicinaux locaux doivent donc redoubler. Le Calame s’est fait souvent l’écho de ceux fournis par l’association « PRoduits d’Excellence d’une FIlière de plantes et produits MEDIcinaux en Mauritanie (PREFIMEDIM) » (3). Entendus par la Délégation de l’Union Européenne et le PNUD, ils attendent encore l’oreille attentive et le coup de main résolu des ressources nationales, tant publiques que privées. Lequel de nos hommes d’affaires saura-t-il prendre en premier le train de la révolution sanitaire africaine ?

 

NOTES

(1)  Sources : fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_pays_par_population et news.google.com/covid19/map?hl=fr&gl=FR&ceid=FR%3Afr

(2)  lepoint.fr/sante/coronavirus-pourquoi-la-mortalite-diverge-selon-les-pays-22-04-2020-2372548_40.php

(3)  Notamment in : lecalame.info/?q=search/node/le%20PSI%20de%20la%20PREFIMEDIM