Pénurie d’eau à Kaédi: le laxisme de la SNDE en question

8 July, 2020 - 23:44

Du recul, Kaédi semble s’acheminer vers… Car, après avoir été l’une des villes-phares de la Mauritanie naissante, avec des infrastructures de base comme l’eau et l’électricité disponibles en toute période de l’année, pôle d’attraction, en son temps, des grands investissements, cette ville dont la croissance démographique est intrinsèquement liée à l’accès à l’eau potable vit depuis bientôt quatre mois une récurrente pénurie, quand ce n’est pas totale absence, du précieux liquide.

Depuis plus de deux ans, quelques quartiers ressentaient déjà l’irrégularité du système de distribution, surtout en période de grande chaleur où la capitale de la wilaya du Gorgol fait banalement grimper le mercure entre 40 et 45°C. Malgré ces alertes, rien ne fut entrepris au plan technique. Bien au contraire : la gestion commerciale a plombé celui-ci. Aujourd’hui, c’est dans tous les quartiers que le retour des bidons jaunes rythme tristement le quotidien des familles arpentant, dans un ballet incessant, les pistes et rues en quête d’eau. Situation impensable il y a quelques années, tant l’eau de Kaédi était vantée pour sa potabilité, sa saveur et son accès facilitée par un débit rapide.

Aucune information ne filtre sous les verrous des premiers responsables qui ont opté pour le silence. Un silence total, laissant la rue accuser tantôt l’inadéquation de la pompe au regard des paramètres désordonnés des tuyaux de raccordement ; tantôt et plus audacieusement, la faiblesse de la pompe elle-même, inadaptée à la forte demande. Bref, « si l’incompétence s’accompagne de mauvaise volonté, on prendra davantage notre mal en patience », semble dire ce père de famille brandissant son bidon jaune. Problème d’approvisionnement en l’état ou évolution de mal en pis, comme si nos ingénieurs et décideurs seraient constipés ou se complairaient en une situation de déni du plus élémentaire droit citoyen : accéder à l’eau potable ?

Sans possibilité de riposte si ce n’est, encore timide et dérisoire,-contre le Covid 19, les gens s’interrogent sur le délitement de la SNDE, une société de services publics qui ne se signale que dans les facturations et les coupures intempestives, comme si son existence ne relevait que de ces deux activités. Aucune étude prospective, aucune anticipation sur les enjeux de l’eau, la SNDE locale, dont le personnel d’appui et d’exploitation est composé à 80 % de contractuels sans avantages sociaux, semble étendre son jeu de non-droit à toute la population, en foulant au pied la première règle vitale de tout développement.

En attendant que les choses s’arrangent, de bonnes volontés, à l’image de Semega Mahamadou  et Mohamed Bakary Semega, tentent d’alléger les difficultés quotidiennes de bon nombre de ménages, en les ravitaillant gratuitement en eau par sondages privés. Mais à l’heure où nous écrivons ces lignes, un détour à la SNDE montre bien à quel point l’on s’y fait peu de souci à résoudre l’épineuse situation.

 

Ouf, enfin de l’eau dans les canaux du PPGI !

Situation à peine moins critique du côté des périmètres irrigués dont le mutisme des divers acteurs inquiétait à plus d’un titre. Avec une pluviométrie de plus en plus aléatoire réduisant l’étendue de la crue sur la Chemama, la culture irriguée sur les deux périmètres-phares de Kaédi (PPGI et PPGII) se voit chargée d’angoisse à la veille de chaque campagne, faute de préparation à tous les niveaux : administratif, financier, technique ; jusqu’à même la préparation du sol et l’acquisition d’intrants de qualité. Or le mois de Juin, dont la première quinzaine est le bon moment, selon le calendrier cultural du riz, du lâcher de l’eau et de la préparation des pépinières, pointait cette année déjà vers sa fin et seul le déficit des remboursements contractés auprès de la Caisse de Dépôt (CDD) alimentaient les conversations. Mais, fort heureusement, l’engagement du président du PPGI, Sow Amadou Moctar, soutenu et conseillé par Dbjiby N’Diaye de la SONADER, ont mis fin à toute rumeur, le 20 Juin, avec un lâcher d’eau substantiel. Une belle surprise qui sonne la fin du suspens et redore le blason d’un comité de gestion si souvent critiqué, à tort ou à raison.

Au-delà de la question structurelle du non-remboursement des créances traînées par des paysans peu soucieux du patrimoine que constitue la terre, le démarrage de la campagne coïncide avec la pandémie du coronavirus. Une situation susceptible de changer la vision des uns et des autres, enfin convaincus de s’inscrire dans un auto-développement durable ? En attendant que toutes les conditions en soient réunies, « l’espoir est en tout cas permis », dit un paysan en quête de semences…

Biry Diagana

Cp Gorgol