La campagne régionale d’Oxfam et de ses partenaires en Mauritanie pour la promotion du lait local a été officiellement lancée, ce vendredi 1er juin, à la Chambre de Commerce, d’industrie et d’agriculture de Mauritanie. Cette campagne de promotion du lait local durera trois ans. Elle est placée sous le signe« Boire du lait local, c’est soutenir la production nationale » et vise à sensibiliser la population à une consommation informée et responsable, soutient Amadou Seydi Djigo, chargé de programme d’Oxfam-Mauritanie.
La filière lait local éprouve de nombreuses difficultés en Mauritanie. « Il y a véritablement un manque d’organisation et l’effet de concurrence, avec les nombreux et divers produits laitiers qui sont massivement importés dans notre pays. L’envahissement total et incontrôlé du marché national par le lait importé, dont on ignore souvent l’origine et la composition est un facteur nuisible à la promotion de la filière lait local», déplore Sarr Mamadou, coordinateur national de ROSA (Réseau des Organisations de Sécurité Alimentaire).
Valorisation des productions locales
C’est pourquoi, sollicite Sarr, « il est important que les autorités nationales se penchent sur des politiques de promotion des acteurs promus à la valorisation de nos productions locales. C’est à ce prix que nous assurerons la sécurité alimentaire ».
Pour Sarr, les attentes les plus pressantes, dans le cadre de la promotion de la filière lait local en Mauritanie se résument à un certain nombre de renforcement des capacités pour maîtriser le marché. Il s’agit de l’élévation de la production permettant d’assurer les besoins de la consommation nationale et d’affronter la concurrence sur le plan international ; l’amélioration de l’accès à l’alimentation du bétail, en lien avec les enjeux de la production ; l’augmentation du pourcentage de lait issu des exploitations familiales dans l’industrie laitière, en lien avec les enjeux de la collecte ; la mise en place d’une politique commerciale et fiscale favorable au lait local issu des exploitations familiales, afin d’assurer des prix de lait favorables au développement des filières locales.
Toutes ces attentes supposent, indiquent ElHadj Ba président de l’ONG AMAD et Sidi Ould Maouloud , président de l´Association des producteurs de lait et de la viande (APLV) que les acteurs de la filière lait local et les pouvoirs publics conjuguent leurs efforts, afin de mieux organiser le secteur en redynamisant les structures de production et de distribution.
« Il est souhaitable, formule Ba ElHadj, également que les consommateurs donnent la préférence au lait local dont ils peuvent s’assurer de l’origine réelle des produits qu’ils achètent à des prix
raisonnables. Ceci est possible, si les pouvoirs publics s’impliquent fortement dans la promotion de la filière lait local, comme objectif prioritaire de développement ».
Aussi, un dialogue franc entre acteurs de la filière, pouvoirs publics et consommateurs est-il indispensable pour aller à la promotion réelle de nos productions locales.
C’est à ce prix donc, c’est-à-dire avec la volonté politique et les stratégies efficientes qu’on pourrait conserver au lait local le rôle important qu’il peut et doit occuper dans notre alimentation et dans notre développement.
Taxer les importations
En effet, en plus de la mobilisation sociale autour du lait local et la démarche pour une consommation responsable, les différents acteurs veulent mener un plaidoyer fort auprès du gouvernement.
Appel a été lancé pour la promotion et la défense du lait local en Mauritanie. Pour autant, les industriels mauritaniens doivent consentir des efforts en matière de respect des normes internationales, de vaccination et de transformation pour aspirer à des exportations de lait. ElHaj Ba balaie les craintes sur l’hygiène et la qualité du lait évoquant les efforts déployés en la matière par les industriels durant deux décennies dans le domaine de la collecte et de la maîtrise.
«Progressivement, il va falloir imposer le lait importé pour décourager les importations et favoriser la production locale par le biais de l’accompagnement des industriels», suggère Ba ElHadj
Le lait local assure, évoque, Dedeou Yahya - Directeur pays d´Oxfam Mauritanie, une partie importante de la consommation des pays sahéliens, notamment en milieu rural et dans les villes secondaires. Il contribue sensiblement à la lutte contre les inégalités de genre en procurant aux femmes des revenus leur permettant de vivre plus dignement. Malgré son apport non négligeable à l’économie des pays de l’Afrique de l’Ouest et au Tchad, la filière lait local fait face à d’énormes défis (alimentation du bétail, collecte, transformation, concurrence du lait en poudre…). Moins de 15% du lait local est collecté alors que les importations de poudre de lait (avec une proportion importante et croissante de poudre de lait réengraissée en matière grasse végétale) sont estimées à plus de 31,5 millions MRU en 2015 avance le communiqué de presse délivré par Habsatou BAL, responsable du plaidoyer et de la Communication Oxfam.
A la faveur de la journée internationale du lait, célébrée, ce 1er juin,les producteurs et productrices de lait, du Burkina Faso, du Mali, de la Mauritanie, du Niger, du Sénégal et du Tchad, accompagnés d’une large coalition composée d’organisations paysannes, de consommateurs, de chercheurs, d’ONG, de mini-laiteries, d’industriels locaux, lancent une campagne de défense et de promotion du lait local. Pour la première fois, ces acteurs se réunissent pour affirmer ensemble : le rôle clef du lait local dans la sécurité alimentaire et nutritionnelle de la région du Sahel ; l’énorme potentiel économique des filières laitières basées sur la collecte de lait local ».
Les producteurs laitiers de cinq pays de l’Afrique de l’Ouest et du Tchad sont déterminés à promouvoir le lait local et réclament des politiques laitières durables. Ainsi, les Etats d’Afrique de l’ouest travaillent à une offensive lait dans le cadre du plan d’investissement agricole régional de la CEDEAO, que des négociations importantes autour d’accords commerciaux approchent (tarif extérieur commun, renégociation des accords de Cotonou APE) pour que les groupes laitiers multinationaux réalisent des investissements importants sur le continent africain.
Dedeou Yahya espère un ralliement aux demandes de nos agropasteurs et de nos industriels pour le développement de la filière lait local en Afrique de l’ouest et sa survie. Les actions de sensibilisation qui seront menées par les coalitions régionale et nationale au cours des prochains mois s’adresseront à tous les acteurs pour que le lait local soit notre lait: produit et transformé dans nos pays et consommé par toutes nos populations».
Synthèse THIAM