En conflit ouvert avec la FFRIM, via sa commission de recours, à nouveau épinglée pour sa décision « illégale », le FC Oasis Tevragh Zeïna passe à la vitesse supérieure. La direction du club adressera, ce lundi 28 Mai, des courriers au président de la République, au Premier ministre, au ministre de la Jeunesse et des Sports et au président de la FFRIM, pour leur faire part de « l’injustice dont elle est victime » et exigeant le rétablissement du droit.
« Nous préférons, dans un premier temps, privilégier la solution locale. Mais, en cas d’insatisfaction, nous allons saisir, avec notre avocat, le Tribunal arbitral du sport », a annoncé Sidi Dah Imijine, le président du club. Recalé aux play-offs pour la montée en première division, le FC Oasis ne décolère pas. Lors d’une conférence de presse tenue, ce dimanche, dans un réceptif hôtelier de Nouakchott, Sidi Dah Imijine s’est insurgé contre la décision, « inique et injuste », de la commission de recours à l’encontre de son club. « Cette commission dont nous ignorons la composition des membres s’est penchée sur notre dossier sans nous interroger, sans prendre la version du joueur impliqué et s’est basée sur une licence falsifiée, pour nous arracher trois points et les octroyer, de façon illégale, à l’Espérance Dar Naïm ! Tout cela dans le but de faire monter l’AS Armée. […] Aucune preuve accablante à notre endroit n’a été étalée », déplore-t-il. « Le joueur impliqué ne figure sur aucune feuille de match de l’ACS Ksar ! Il n’y aura donc eu aucune enquête approfondie ? », s’interroge, dubitatif, le président du FC Oasis Tevragh Zeïna.
Revenant à la charge, Sidi tient à démontrer les faiblesses de ladite commission : « Conformément au règlement, en cas de fraude sur l’identité du joueur ou de double licence, il est prévu que l’équipe fautive perd, sur tapis vert, toutes les rencontres auxquelles le joueur fautif a eu à prendre part et, éventuellement, une rétrogradation en division inférieure. Or Thewban a disputé tous nos matchs. On ne nous a amputés que de trois points », se désole-t-il. « C’est une entorse au règlement », renchérit Ndiaga Wade, l’entraîneur du club. « Nous ne comprenons plus où va notre football. Nous nous investissons, quotidiennement, à éduquer, encadrer des jeunes et à les rendre performants. Mais, dès que nous atteignons l’objectif, on nous l’enlève, d’un coup de baguette magique. Vaut mieux se reposer et faire autre chose ! Parce qu’on ne va nulle part, avec ça ! », se lamente Wade.
Au centre du contentieux, Thewban a révélé avoir passé des tests, non concluants, au Ksar où il n’a jamais eu à disputer le moindre match officiel. Je n’ai pas été retenu », informe-t-il. Ould Sghaïr se dit peiné par cette mesure qui compromet sérieusement sa carrière : « Je ne sais plus quoi faire. C’est une décision injuste à mon égard. Je n’ai rien fait. Et quelles suites ? Je ne connais que le foot, ma passion, ma vie. Maintenant, je n’ai plus d’avenir », peste-t-il.
Foudroyé par la CR
L’affaire défraie la chronique sur la scène sportive et alimente le débat dans les chaumières du pays. Ayant composté son billet pour les play-offs de la deuxième division, en compagnie d’El Mina Jahe, pour la zone de Nouakchott, le FC Oasis de Tevragh Zeïna n’aura finalement pas le privilège de disputer ce beau challenge et d’espérer monter en Super D1. Classée troisième, à la faveur du goal différence, c’est l’AS Armée qui, profitant de la décision disciplinaire, fort contestée par les Oasiens, jouera les play offs, en lieu et place du vice-champion de la capitale.
Statuant, en dernier ressort et en application des textes réglementaires de la FFRIM, sur le recours de l’Espérance de Dar Naïm, concernant la réserve portée sur les joueurs de FC Oasis Tevragh Zeïna, Sghaïr M’Bareck et Thewban Sghaïr, la commission de recours de la fédération a pris une décision « gravissime », lourde de conséquences, fortement condamnée par les dirigeants, supporters et joueurs de FC Oasis. En effet, par jugement n°002-2018, en date du 10 Mai 2018, signé par son président Mohamed Maatalla, ladite commission a procédé, pêle-mêle, à l’annulation de la licence du joueur Thewban Sghaïr, à sa suspension, pour 18 mois, et à l’interdiction, pour trois mois également, imposée, au secrétaire général du FC Oasis, d’exercer toute activité relative au football. L’instance de recours a attribué, à l’Espérance de Dar Naïm, le gain, par pénalité, du match contre le FC Oasis, par 3 buts à 0, comptant pour la sixième journée du championnat de Super D2. Et d’infliger, en prime, une amende de 10.000 ouguiyas (MRU) au FC Oasis Tevragh Zeïna.
La commission fonde son argumentaire sur le fait que les « enquêtes ont révélé que le joueur [ndlr : Thewban Sghaïr) est détenteur de deux licences-clubs : FC Oasis et ASC Ksar ; pour la saison 2017-2018 ».
Consternation au FC Oasis ! Le président du club a du mal à digérer cette lourde sanction, « incompréhensible et anachronique. […] Après tant d’efforts, on nous prive, au moment de la récompense, des fruits de notre labeur, pour satisfaire d’autres. L’heure est grave », sonne en exclusivité Sidi, au micro de www.rimsport.net, « les joueurs sont totalement découragés. Ils ont bien raison. Ils ont l’impression qu’on leur a volé leur qualification aux play-offs. C’est aussi vrai que tragique ! », ajoute-t-il.
La décision de la commission de recours a dévasté une œuvre de longue haleine et bouleversera bien des carrières. « Nous ne sommes pas sûrs de continuer à jouer avec de telles pratiques. Des décisions de ce genre ne feront pas avancer le football mauritanien. Les joueurs sont plus que choqués de cette décision injuste », martèle le président de FC Oasis Tevragh Zeïna qui a du mal à se remettre de cette « mesure inique ». « Après s’être donné corps et âme, toute la saison, nous avons été éliminés d’un simple trait. Ça fait mal, très mal. Nous ne sommes pas sûrs de continuer », répète-t-il.
Le « syndrome » Thewban Sghaïr
Thewban Sghaïr a, bien malgré lui, cristallisé l’attention de bon nombre de clubs de Super D2. La commission a examiné, à deux reprises, les accusations formulées à son encontre. C’est le 14 Août 2017 que le FC Oasis TVZ entamait sa saison, avec la phase de préparation (reprise des entraînements, recrutements de nouveaux joueurs). Affilié à la ligue de Nouakchott-Ouest, Thewban manifeste alors son désir de jouer au FC Oasis TVZ. Une demande de licence (comprenant la lettre de libération du club précédent, avec entête, cachetée et signée par le président du club et une copie de l’ancienne licence) est formulée. La licence ne sera émise que tardivement, après la qualification du club en Super D2. Thewban n’avait pas disputé le tournoi éliminatoire et fait ses débuts contre l’Etoile d’Arafat. Cette dernière formule une réserve à l’encontre du FC Oasis, pour avoir aligné un joueur appartenant à l’Espérance Sportive de Dar Naïm auquel le président de ce club revendique l’appartenance de Thewban.
Saisi de l’affaire, la commission de discipline tranche en faveur de FC Oasis, dans une correspondance, en date du 28 Janvier 2018 : l’évocation ne peut être étudiée dans le fond, au profit de l’ASC Etoile d’Arafat, pour vice de forme (art 54 du règlement spécial de la Super D2). En effet, le montant de la caution à verser est de 20.000 ouguiyas (2.000 MRU) au lieu de 10.000 ouguiyas (1.000 MRU) : Art 57.alinéa b du règlement spécial de la Super D2. Par ailleurs, le dossier de demande de licence de FC Oasis est recevable, valable en bonne et due forme, au vu des règlements des compétitions de la FFRIM (Art 44) et du règlement spécial de la Super D2 (Art26).
Quatre autres points complètent ce jugement : en un, le dossier de demande de licence de l’Espérance Sportive de Dar Naïm n’est pas recevable. Il est incomplet et rejeté par le secrétaire général de la LNF, au vu des règlements des compétitions de la FFRIM (art 44) et du règlement Spécial de la Super D 2 (Art 26). En deux, la libération, délivrée par l’Espérance Sportive de Dar Naïm, est valable, conforme à tous les autres actes de libération du même club au profit d’autres joueurs. En trois, blâme est adressé au joueur Thewban Sghaïr, pour avoir touché 40.000 ouguiyas (4.000 MRU), de son ancien club, en vue de renouveler sa licence, avant de se rétracter. La somme doit être restituée à son ancien club. En quatre, l’homologation du match Etoile Arafat-FC Oasis : 0-2 en faveur de FC Oasis ; est confirmée.
L’Espérance de Dar Naïm elle aussi déboutée
Rebondissement, lors de la dernière journée, suite à la rencontre entre l’Espérance Sportive de Dar Naïm FC Oasis (0-3). Avec l’arrivée tardive des joueurs de Dar Naïm, la présentation des équipes ne s’est effectuée qu’à la mi-temps. Néanmoins, à la fin de la rencontre, l’Espérance déposa une réserve contre son ancien sociétaire. Au final, la commission de discipline tranche à nouveau en faveur du FC Oasis. L’Espérance de Dar Naïm est elle aussi déboutée de sa réserve formulée contre Thewban Sghaïr. La commission (correspondance en date du 19 Mars 2018) constate que « la demande de licence du FC Oasis, au profit du joueur, auprès de la LNF, a été déposée, en bonne et due forme, conformément à l’article 44 des règlements des compétitions de la FFRIM et du règlement spécial du championnat de Super D2 édition 2017/2018, en son article 26. Le dossier de réserve de l’ASC Espérance n’apporte pas de justificatifs valables à l’objet de la réserve ». Et de conclure : « le joueur Thewban Sghaïr, licence 951231031, appartient au club de FC Oasis, pour la saison 2017/2018, conformément à la licence délivrée par la LNF ». La commission confirme donc le score acquis (3-0) du match FC Oasis-ASC Espérance, en faveur du FC Oasis (6ème journée de Super D2).
Evocation de l’AS Armée
L’enjeu étant de taille, les saisines se multiplient, à un rythme effréné. L’AS Armée saisit la commission de discipline concernant la qualification du joueur Mohamed El Mokhtar Taher, licence n° 1101097441, aligné, lors de la 9ème journée de Super D2, au stade de Mellah. Ce joueur a effectivement écopé de trois cartons jaunes : 1er carton, le 16 Janvier 2018, à la première journée contre Feu Mini ; 2ème carton, le 8 Mars 2018, à la 7ème journée contre l’Espérance Dar Naïm, et 3ème carton, le 14 Mars à la 8ème journée contre Jahe. La neuvième journée étant une journée reportée, le match suivant de FC Dar El Barka compte en 10ème journée, le joueur ne figure pas sur la feuille de match et n’y a donc pas participé. Le score de 3-0, en faveur de Dar El Barka, suite au forfait de FC Delta, le 28 Mars 2018, est maintenu », fait remarquer la commission, dans sa lettre du 5 Mai 2018.
En fait, « le carton écopé par Mohamed El Mokhtar Taher », clarifie la CD, « lors du match de la 13ème journée contre Toujounine, n’est que le premier carton jaune de la deuxième série de trois cartons jaunes pour ce joueur. Par conséquent, il pouvait bel et bien jouer contre l’AS Armée, lors de la neuvième journée retard dont le score acquis sur le terrain demeure maintenu : match nul, un but partout ».
Double licence ?
Sidi Dah Imijine balaie, d’un revers de main, toute fraude. « Après avoir cherché vainement et un peu partout des failles, ils n'ont trouvé mieux que cette histoire de deux licences. Malheureusement pour eux, ils n’ont pas su procéder correctement à la falsification, même en ayant pris tout le temps nécessaire pour produire des pièces fausses : une licence établie un jour férié, sans numéro de série, avec la même photo que celle que nous avons prise pour ce joueur, le 17 Novembre 2017, lorsque nous établissions sa demande de licence ». Poursuivant, il sonne la charge : « Ce n’est pas nous qui produisons des licences. Ce n’est pas notre faute si le joueur s’en retrouve avec deux. Du reste, Thewban Sghaïr est inconnu au Ksar où personne ne le connaît ».
Sans l’ombre d’un doute, Sidi se dit victime d’une « machination » et de supposées liaisons entre le FC Tevragh Zeïna et le FC Oasis : « Nous n’avons rien à voir avec le FC Tevragh Zeïna de Moussa ould Khaïri. Le FC Oasis Tevragh Zeïna est une équipe de jeunes de la BMD, mise sur pied en 2008 », précise-t-il. « La Ligue ne nous a jamais donné une ouguiya. C’est avec nos fonds propres que nous prenons en charge cette équipe. Des investissements importants. Mais, au lieu de nous encourager, on nous pousse vers la sortie », déplore-t-il.
Le malheur des uns fait le bonheur des autres. L’AS Armée jouera les play-offs 2018. Depuis la suppression de la commission d’appel, il n’y a en effet plus aucune autre possibilité de recours. « Comble de l’ironie », se souvient amèrement Sidi, « le président de l’AS Armée fut le premier à me féliciter de notre qualification ». Les deux rencontres décisives ayant opposé, d’une part, le FC Oasis à Delta (13-0) et, d’autre part, Dar El Barka à l’Armée (1-1) se jouèrent simultanément à Cheikha et Mellah. Mais, ça, c'était une autre histoire !
Synthèse THIAM Mamadou