Vous savez, il ya l’école qui arrive, dans une semaine. L’école nationale. Puisque les autres écoles ont commencé depuis longtemps. La malienne, la camerounaise, la française et la turque, nouvelle version opposée à Fethoulah Gulan. Décidément, tous les opposants sont les mêmes. Partout. C’est dans une semaine que le ministre de l’Education et ses proches collabos vont proclamer, à l’unisson : « sur instructions du président de la République, toutes les conditions ont été prises pour que la rentrée de cette année soit un grand succès ». (Allez, toi, là-bas, prends le micro !) « Heu, oui, c’est vrai, moi, je suis instituteur. Je témoigne que tout va bien, comme toujours ça allait avant moi. Heu, oui, les élèves sont là et ils vont apprendre ». (A toi, là-bas) « Je représente l’association des parents d’élèves. Je remercie Son Excellence Mohamed ould Abdel Aziz pour les routes, pour la lutte contre la gabegie, pour la pluie et pour le poisson qu’il nous donne. Les ennemis du peuple doivent nous donner la paix. Avant tout ça, ils étaient où, ceux-là ? Donc, merci au Grand Rectificateur ! ». Retour au bureau du ministre avec ses collabos et rideau, clap, clap. Puis refermeture des classes nationales, jusqu’à la fin de l’hivernage qui vient de commencer. Finalement, l’année scolaire nationale, c’est, comme disait un parent à moi, qui voulait consoler mon autre parent, « Octobre, les deux premières semaines, rien, puisque c’est encore la préparation des classes, des emplois du temps, la répartition des professeurs. Après, c’est la fin du mois. Vient Novembre. Ça va être rapide, puisqu’il y a la fête de l’Indépendance qui peut coïncider avec un jeudi. Comme ça, on aura au moins quatre jours, avec le vendredi en jour-pont. Décembre. Hé, ça, c’est le mois des Noël ! A partir du 20, histoire de bien préparer le 24, avant les fêtes de fin d’année. Janvier, bon, ça va vite aussi, puisqu’on rentre, doucement, des vacances. On ne va rien sentir. Février. Même pas trente jours. Vingt-huit ou vingt-neuf, tu vois comment c’est court. Mars. Ah, revoilà encore les vacances de Pâques ! Mai. Déjà, on a deux fêtes : celle du Travail et celle de l’UA. Avec leurs ponts éventuellement obligés. Juin, mois des compositions de passage. Et vivement les vacances ! C’est toute une histoire, l’école de chez nous. De « Moi, j’ai admis au l’ENI » à « C’est moi qui a dit aux élèves de sortir en récréation », en passant par « Ça dépend de celui qui l’allume », comme répondit un irracontable directeur à deux élèves qui lui demandaient son arbitrage entre « un ou une fourneau ». Ou encore des accents « complexes » de cette instructrice aux abois sous la complexité des circonflexes. Ou encore de ce maître prétendument titulaire d’une maîtrise –tenez-vous bien dans vos fauteuils ! – en lettres, qui enseignait doctement à ses élèves la conjugaison de bondir au futur simple : « Nous bondisserons, vous bondisserez, ils bondisseront »… Le ministère de l’école, c’est quoi ? Pratiquement le seul où l’on peut tout envoyer. Bon, soyons honnête, ce n’est pas une réalisation de Mohamed ould Abdel Aziz, il en est seulement un pur produit. Maouiya y avait détaché un certain vétérinaire. Les instituteurs s’en étaient d’ailleurs réjouis : un toubib, quand même, c’est pour soigner les maladies et Allah sait combien gravement l’école nationale est malade ! A la tête du ministère de l’école, on peut placer n’importe qui. N’importe quoi, même. Tout. Sauf quelqu’un de religion scolaire. Un ministre juriste. Un ministre soldat. Un ministre pharmacien. Un ministre boucher. Un ministre poissonnier. Un ministre armateur. Un ministre technicien. Un ministre charpentier. Un ministre artiste. Un ministre n’importe quoi. Juste pour remplir la chaise. Improviser des idioties. Surtout pas de ministre professeur, inspecteur ou instituteur ! Surtout pas ! Ces gens-là, il leur faut une tête. Ils sont juste bons à composer l’attelage. On n’est pas en Allemagne. Ni en Norvège. Ni en Suisse. Hé, un peu de cohérence, tout de même : il s’agit de l’école nationale des Nou’Zautres ! Salut. Sneiba El Kory
Il y a quelques semaines, un ancien fonctionnaire devenu conservateur de bibliothèque, Ahmed Mahmoud ould Mohamed, dit Gmal, publiait sur Facebook un post au titre évocateur : « La mémoire en décharge : quand les archives nationales finissent dans les ruelles de Nouakchott ».