Lorsque, le 6 Août 2008, le général Mohamed ould Abdel Aziz réagit, par un coup d’Etat, au décret présidentiel de sa destitution, les amis et soutiens de ce qui fut appelée, alors, « Rectification » avancèrent moult « justifications » de ce qui n’était qu’une manière, pour le groupe de militaires un temps favorables à Sidi Mohamed ould Cheikh Abdallahi, de reprendre la main, après avoir appris, à leurs dépens, que le vieux marabout n’était pas aussi manipulable qu’ils l’avaient cru. Parmi les « arguments » avancés, ils « voyaient, sur Sidi », tantôt qu’il voyageait beaucoup trop, tantôt des failles de sécurité, comme l’attaque, en plein jour, d’AQMI à Nouakchott, ou, encore, les excès de Khatou et de sa Fondation, le retour de quelques symboles de l’ancien régime que la junte du Comité Militaire pour la Justice et la Démocratie avait chassés, en 2005… Il va sans dire que tous ces arguments étaient totalement fallacieux. Preuve par neuf : Mohamed ould Abdel Aziz a, incontestablement, voyagé cinq à six fois plus que Sidi Mohamed ould Cheikh Abdallahi. Pour des choses parfois aussi futiles que « couper » des milliers de kilomètres, afin d’assister à la commémoration de l’indépendance d’un quelconque pays d’Afrique centrale. Du temps de Sidi, des hommes armés ont effectivement tiré dans les rues de Nouakchott. Mais, voici juste une semaine, des bandits ont braqué, en plein jour, une banque à Nouakchott, embarquant quelques dizaines de millions de nos ouguiyettes. Les forces armées et de sécurité si pompeusement rectifiées n’ont encore rien vu ni compris. On se croirait à Cincinnati ou Manhattan. Et visiblement, le phénomène des fondations surdotées n’a pas cessé avec la Mauritanie nouvelle. Les financements de la Fondation de feu Ahmedou Ould Abdel Aziz ont fait couler beaucoup d’encre et de salive. Mais la pauvre Khatou mint El Boukhari, épouse de Sidi ould Cheikh Abdallahi, ne restera, certainement pas, la Première dame la plus indiscrète de notre feuilleton national. Celle de la Mauritanie rectifiée aura été de toutes les expéditions, à côté de son mari. Madame Marième mint Ahmed, alias Tekeiber, pour ne pas la nommer, est apparue dans toutes les « Rencontres avec le peuple », conférences de presse et autre cérémonie de clôture du dernier dialogue politique de Septembre/Octobre, entre la majorité et une partie de l’opposition. Les « boutiquettes » de Khatou sont une indication très célèbre des habitants du quartier populaire de Veloudja. Une allusion, à peine voilée, aux accusations proférées, à tort ou à raison, d’avoir squatté puis légalisé, à son profit, de vastes domaines publics. Ses prétendus nombreux terrains et sa Fondation furent, d’ailleurs, à l’origine de ses déboires judiciaires « commandés » par le Haut Conseil d’Etat. Quant au retour de personnalités symbolisant le régime déchu de Maouiya ould Sid ‘Ahmed Taya, au sein de l’administration de Sidi Mohamed ould Cheikh Abdallahi, un ancien ministre des Affaires étrangères d’avant 2005 a rappelé que tous ceux qui participèrent au dernier Conseil des ministres de l’ère Taya, deux à trois jours avant le coup d’Etat du 3 Août 2005, sont, aujourd’hui, tous aux « affaires » de la Mauritanie « nouvelle » de Mohamed ould Abdel Aziz. Inutile de citer des noms. Regardez, autour du Grand Rectificateur, les ministres, les conseillers, les chargés de mission, les directeurs généraux des grandes entreprises, les secrétaires généraux des ministères, les hauts fonctionnaires de la République. Les hommes, les femmes, les jeunes, les notables, les troubadours et les bouffons. Douze années ont passé, depuis la destitution de Maouiya. Les choses n’ont pas beaucoup évolué. Peut-être sur la forme, avec de nouvelles infrastructures urbaines qui ont changé le visage de la ville et quelques slogans qui ont suscité beaucoup d’espoir…avant d’accoucher d’autant plus cruelles déceptions. Mais certainement pas sur le fond, puisque les grandes problématiques nationales sont restées en l’état. Economiquement, les indicateurs ne sont pas aussi bleus qu’on s’acharne à nous le faire gober. Socialement, les communautés nationales se regardent en chiens de faïence. Politiquement, le blocage perdure et les acteurs sont à couteaux tirés.
El Kory Sneïba