Enlèvement des marchandises
L’enlèvement des marchandises constitue la dernière étape des opérations douanières. Suivant l’article 151 du Code des douanes, il intervient après que les droits et taxes dus sur les marchandises ont été payés, à l’avance ou cautionnés, et obtenue l’autorisation d’enlèvement. Toutefois, l’article 152 du même code donne au chef du bureau de douanes concerné le droit d’enlever les marchandises immédiatement après l’inspection et avant le paiement des droits et taxes, à condition que celui-ci soit garanti, conformément aux dispositions des articles 141 et 142 dudit code. Le nombre de cas d’enlèvement direct enregistrés dans le système d’information au cours des trois années sous contrôle était de trois mille quatre cent neuf. La vérification de ces opérations a permis aux missionnaires d’établir les constats suivants.
Absence de textes réglementant l’opération d’enlèvement direct
L’absence de telles dispositions conduit à des enlèvements directs sans contrôle prédéterminé, ce qui ouvre la porte à la sortie de cette mesure exceptionnelle des limites prévues par le législateur. Parmi ces textes, la décision du directeur général des Douanes définissant la liste des marchandises pouvant faire l’objet d’un retrait direct (cette décision est visée à l’article 117, paragraphe 2, du Code des douanes) ; celle du même DG précisant le formulaire et les données de la déclaration simplifiée de l’enlèvement direct (cette décision est visée à l’article 117, paragraphe 3, du Code des douanes) et un arrêté du ministre des Finances précisant le délai accordé pour la présentation d’une déclaration simplifiée d’enlèvement direct (cette décision est visée à l’article 117, paragraphe 2, du Code des douanes).
Non-respect des exigences relatives aux retraits directs
L’examen d’un échantillon de dossiers de déclaration d’enlèvement direct a montré que les demandes de déclaration directes simplifiées dans les dossiers vérifiés ne satisfaisaient pas aux exigences formelles : « elles n’étaient ni numérotées », précise le rapport, « ni datées, ni signées ou portaient la totalité ou une partie de ces spécifications et toutes n’avaient pas l’approbation du chef du bureau dans la case désignée. Certains dossiers ne comportent pas de déclaration ».
Absence de garanties de paiement des droits
Toutes les déclarations d’enlèvement direct contenues dans les dossiers vérifiés n’ont aucune caution des droits en suspens, en violation des exigences des articles 141, 143 et 152 du Code des douanes.
Absence d’un mécanisme de suivi de la liquidation des enlèvements directs
La déclaration simplifiée, sur la base de laquelle l’autorisation d’enlèvement direct est délivrée, inclut l’obligation pour le propriétaire des marchandises de fournir une déclaration détaillée de ses marchandises et de payer les droits et taxes qui lui sont dus, dans un délai précisé dans la déclaration simplifiée (30 ou 90 jours). « Toutefois, le Bureau ne dispose d’aucun mécanisme pour assurer le suivi de ces engagements. Par conséquent, 24 % des enlèvements directs enregistrés au cours des années contrôlées ne sont toujours pas apurés (804 cas) et la plupart des cas apurés (72 %) dont 1878 cas sont réglés en retard par rapport aux délais impartis. Dans de nombreux cas, ce retard est plus de trois ans ».
Régimes suspensifs, régimes douaniers économiques
L’article 156 du Code prévoit un ensemble de régimes suspensifs sur les droits et taxes. Le régime le plus utilisé au niveau du Bureau des conteneurs douaniers au port de Nouakchott est l’admission temporaire exceptionnelle pour le perfectionnement actif et le régime de transit. Les régimes suspensifs permettent le stockage, le transfert ou la circulation des marchandises des bénéficiaires tout en suspendant les droits de douane pendant la période de suspension. L’article 158 du Code prévoit que les marchandises soumises à tout régime suspensif sont placées sous caution en échange d’une garantie et que les droits et taxes peuvent être exigés si le bénéficiaire de ces régimes ne respecte pas ses obligations à l’expiration du délai accordé. L’article 163 du Code stipule également que la procédure d’application des articles 158 à 162 relatifs à cette garantie sera déterminée par des arrêtés du ministre des Finances mais rien n’a été publié jusqu’ici.
Les paragraphes suivants présentent le résultat de la vérification de ces régimes. L’admission temporaire exceptionnelle est accordée aux marchandises importées visées exclusivement à l’article 226 du Code des douanes et les déclarations pour ce type d’admission provisoire se sont élevées à deux cent quatre-vingt-dix-sept au cours des années sous contrôle. À travers l’audit des dossiers d’admission exceptionnelle, la mission a formulé les observations suivantes.
Absence de mécanisme de suivi de la période d’admission provisoire exceptionnelle
Le document d’admission stipule que la durée de l’admission est d’un an renouvelable. Les enquêtes de la mission ont montré l’absence d’un mécanisme de suivi du respect de ce délai et n’ont donné aucune indication de renouvellement des licences octroyées. La mission attire l’attention que « le régime d’admission temporaire exceptionnel exige de réexporter les marchandises importées dès la fin de l’objet de leur entrée ou d’aviser les services de la douane en cas d’intention d’en écouler sur le marché local pour surveiller l’opération de dédouanement. Cela exige l’existence d’un mécanisme garantissant le suivi de la situation de ces marchandises.
Absence de listes des marchandises couvertes par le régime d’admission temporaire exceptionnelle
Ceci est contraire aux exigences du dernier alinéa de l’article 92 du Code des hydrocarbures et de l’article 105 du Code minier. Ces articles stipulent que l’utilisation des équipements utilisés par les sociétés de prospection et d’exploitation dans les secteurs des hydrocarbures et des mines bénéficiant du régime d’admission temporaire exceptionnel est conditionnée par l’existence de ces équipements dans une liste approuvée par le ministère de tutelle et visée par la direction générale des douanes.
La mission n’a pu obtenir ces listes au cours de ses enquêtes. La réponse du gestionnaire n'a pas indiqué l’existence de listes des marchandises incluses dans le régime d'admission temporaire au Bureau. La présence de ces listes est pourtant nécessaire pour garantir la capacité des marchandises présentées à être enregistrées dans le régime de l'admission temporaire.
Admission temporaire spéciale
Conformément aux dispositions du paragraphe 1 de l’article 227 du Code des douanes, le ministre des Finances peut accorder ce type d’admission provisoire pour une période d’un an renouvelable avec une suspension partielle des droits et taxes. Cette admission concerne les équipements importés par les entreprises de travaux. Les autorisations pour ce type d’admission provisoire se sont élevées à cinquante-huit au cours des années sous contrôle. Ces autorisations ont été accordées principalement à la société ARISE (76%) qui construit le quai à conteneurs au port Autonome de Nouakchott.
L’audit des dossiers de ce régime a permis de constater que les permis d’admission temporaire sont délivrés par le directeur général des douanes au lieu du ministre des Finances, contrairement aux exigences du paragraphe 1 de l’article 220 du Code des douanes. Dans sa réponse, le gestionnaire a déclaré que le directeur général des douanes signait des autorisations d’admission provisoire sur procuration du ministre des Finances. Le document de procuration a été perdu suite aux actes de vandalisme que la direction générale des douanes en connus en 2003. De l’avis de la mission, cette procuration peut toutefois être facilement reprise.
Absence de mécanisme de suivi des obligations découlant de l’admission temporaire spéciale
Ces obligations comprennent : le paiement des droits et taxes en suspens ; la réexportation des produits temporairement admis à la fin de la période de validité de l’autorisation ; la mise en entrepôt douanier ou conversion au système de consommation et leur dédouanement. Dans le cadre de ses enquêtes auprès de la direction chargée du régime suspensif des droits à la direction générale des douanes, la mission a constaté l’absence d’un mécanisme pour assurer un suivi rigoureux de ces obligations. Par conséquent, elle ne dispose pas de données documentées précisant le statut des autorisations accordées en ce qui concerne l’expiration de la période d’autorisation, les prolongations ou les réexportations et l’obligation de payer les acomptes dus. Il convient de noter que la mission n'a révélé aucune trace d'une quelconque forme de suivi.
Non-paiement des acomptes des droits en suspens
Conformément aux exigences de l’article 227, paragraphe 2, du Code des douanes, les fournisseurs sont tenus de payer les droits et taxes en suspens dans les conditions spécifiées dans les actes généraux et dans l’autorisation spéciale qui leur est accordée. Le montant de la créance est calculé sur la base de la relation entre la période d’utilisation de l’équipement sur le territoire douanier et la période totale de son amortissement, qui sera déterminée selon les conditions établies par le ministre chargé des finances.
Il a été noté que sur les cinquante-huit autorisations enregistrées, seules neuf ont été régularisées. Pour le reste, les droits en suspens dus sont impayés (trente-quatre déclarations) ou partiellement payées (quinze déclarations). La valeur totale des droits dus impayés jusqu’au 31/12/2021 s’élève à 2.666.490.20 MRU. Il convient de noter que les conditions de calcul des acomptes dus visés à l’article 227 du Code des douanes de 2017 n’ont pas encore été précisées. Par conséquent, ces acomptes sont encore calculés sur la base des dispositions de l’arrêté nº 193/MF/MET du 08/04/1968.
Régime de transit
Le transit est un régime qui permet de transporter des marchandises non-dédouanées vers un point désigné à l’intérieur du territoire douanier (transit ordinaire) ou à l’extérieur du pays (transit international) et en vertu duquel les marchandises expédiées bénéficient de la suspension des droits et taxes. Le type utilisé principalement de ce régime au niveau de bureau est le transit international vers le Mali. Les articles 166 à 178 du Code des douanes régissent ce transit. La vérification de ce régime a révélé les observations suivantes.
Non-publication des arrêtés d’applications des règles relatives au présent régime ; alors que l’article 170 du Code stipule que les conditions d’application du régime de transit seront déterminées par des arrêtés du ministre des Finances, la mission n’a pas pu obtenir de tels arrêtés auprès du bureau des douanes. On note également une absence de mécanisme permettant de s’assurer que les expéditions en transit sont cautionnées. Cette garantie est pourtant prévue par les dispositions de l’article 158 du Code des douanes.
Selon la direction du bureau des douanes, la méthode adoptée pour assurer le transit des expéditions consiste à recevoir un chèque certifié à titre de garantie et à inscrire son numéro sur le cautionnement ; puis, après confirmation par le bureau de sortie que les marchandises étaient hors du territoire douanier, le propriétaire ou son mandataire peuvent retirer le chèque de caution. La mission a cependant relevé qu’il n’y avait aucun mécanisme fiable pour s’assurer de l’exhaustivité de ce processus. La seule trace qui existe est le numéro de chèque enregistré sur un nombre limité de cautionnements. Bien que ce processus soit insuffisant pour vérifier la réalité de la garantie, la mission n’a pas vérifié son exhaustivité car les cautionnements de retrait fournis à la mission ne couvrent pas l’échantillon examiné.
Synthèse THIAM Mamadou