Face à l’imbroglio politico-militaire au Niger, suite à un coup d’État condamnable et que rien ne peut justifier, la communauté internationale semble, encore une fois, confrontée aux démons de la division et de la tentation du pire.
Les enseignements de l’histoire récente auraient dû être mis à contribution, pour épargner au fragile espace sahélo-saharien une nouvelle épreuve existentielle. Depuis l’équipée meurtrière en Libye, en 2011, les pays du Sahel sont confrontés, entre autres conséquences négatives, à un défi sécuritaire inextricable. Pour les populations de ces pays, les conséquences désastreuses de la crise libyenne sont venues se greffer sur le stress environnemental le plus redoutable sur terre, un stress accentué ces dernières décennies par le réchauffement climatique inexorable.
Un nécessaire ‘’Plan Marshall’’
En raison, parfois, de difficultés objectives sur le terrain, les pis-aller, proposés ici ou là en vue de remédier au calvaire des populations sahéliennes, ont plutôt eu tendance à aggraver ce calvaire. C’est, à mes yeux, ce calvaire qui est à la base de la crise sahélienne et il devrait, à ce titre, faire l’objet d’un véritable “plan Marshall”, pour en arriver à bout, autant que faire se peut. Les seules déclarations d’intention et stratégies de communication, même très sophistiquées, se heurtent, in fine, aux aspérités du terrain, finissent par s’enliser, spécialement dans ce grand espace de détresse humaine par excellence, qu’est devenu aujourd’hui le Sahel.
Les gouvernements de la région, pris entre l’enclume de l’urgence sécuritaire et humanitaire, et le marteau des injonctions paternalistes insistantes des “partenaires”, ne pouvaient, sauf exception, faire efficacement face à une situation d’une telle complexité, et ce, indépendamment de la qualité de leur gouvernance. À force de déclencher des cataclysmes militaires, pour des raisons souvent mondialement impopulaires, les va-t-en guerre font courir, cette fois-ci, de grands risques d’ingouvernabilité au Sahel. Du Sinus Arabicus, à l’Est, à l’océan Atlantique, à l’Ouest, les populations du Sahel, aspirent à entendre des narratifs d’espérance, après tant d’années d’affliction...
Si, comme d’aucuns y travaillent d’arrache-pied, la guerre se déclenchait au Niger, les premiers perdants seraient, certes, les populations du Niger, mais aussi celles de toute la bande sahélienne-saharienne. La crise humanitaire et migratoire qui résulterait d’une telle guerre, serait autrement plus dramatique, pour les pays de départ, de transit et de destination, que celle déclenchée par la destruction de la Libye ; les forteresses nationales les mieux gardées céderaient indubitablement. Avec une telle guerre, les extrémismes de tous bords, comme ce fut le cas dans la région, en 2011, se revigoreraient, car le terreau de la misère et de l’insécurité est notoirement favorable à la radicalisation violente, spécialement dans des pays où une jeunesse sous-éduquée, désœuvrée et exposée aux trafics illicites dont celui de la drogue, compose l’écrasante majorité de la population.
Une région fragilisée
Aujourd’hui, une guerre au Niger donnerait, au Sahel et ailleurs, l’impression du “déjà vu” en Iraq, en Libye, en Syrie..., et servirait “la démocratie et la prospérité” au Niger, sur le modèle unifié de toutes ces guerres aux motifs fallacieux ; le sentiment d’insécurité, de par le monde, s’en trouverait aggravé.
Tout doit être fait, pour éviter que le conflit de haute intensité, en cours en Europe de l’Est, ne s’invite au Sahel, sous peine d’embraser une région passablement fragilisée.
La volatilité sécuritaire et humanitaire d’un Niger enclavé, au cœur du Sahel, détenteur du taux de fécondité le plus élevé au monde et du troisième IDH le plus bas, cette volatilité exige d’user de tous les moyens de pression non violents et de négocier, ainsi, une sortie de crise pacifique, acceptable par le président légitime du Niger, SEM Mohamed Bazoum, épargnant, de la sorte, au Niger, au Sahel, à l’Afrique et partout ailleurs, une situation où tous les acteurs (ou presque) seraient perdants et où le calvaire des Nigériens, déjà insupportable, pourrait concrétiser la déshumanisation ultime du monde...
Je reste persuadé que la Mauritanie, sous l’autorité de SEM le Président Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani, adoptera, en définitive, la position la plus favorable à ses intérêts vitaux, aux intérêts du peuple frère du Niger et à la paix régionale et internationale.