Une promesse, c’est quoi, en fait ? Une dette, en tout cas. Mais il peut bien arriver qu’on ne paye pas ses dettes. Et quoi dire, alors, de quelqu’un qui ne paye pas ses dettes ? Qu’il soit des Halhassanya ou des Halpulaar – pour ne vexer ni Birame et consorts qui veulent une communauté Harratine, ni Boïdiel et compagnie qui veulent rester des maures noirs – l’imaginaire populaire est intéressant sur ce vice de ne pas avoir l’obligeance d’honorer ses dettes. Le cas échéant, tu n’es pas droit – droite, si c’est une femme qui fait la dure tête – ou, alors, tu as le dos très long. Promettre est un art. Pour le faire, il faut être excellent jongleur. Sans vergogne. Avoir le visage en tenguerda (une sorte de métal à forte teneur en fer) dont les fourneaux peuvent durer, des dizaines d’années, à souffrir les flammes, sans que cela ne les détériore. Parfois on parle de « plus tordu qu’un arc » pour dire de quelqu’un qu’il a le dos long. La promesse a ses jours de gloire, comme la danse, le tir à la cible ou le jeu du bâton. Par exemple, en ces jours, elle a pignon sur rue. Promesses à tout va. Continuer les chantiers, les grosses œuvres, vaincre la pauvreté, enrichir tout le monde, égaliser les chances, rendre la justice, asseoir le développement, fleurir le Sahara, redorer le blason de l’islam et des oulémas, renforcer la démocratie, faire tomber la pluie, adoucir l’air, se qualifier à la prochaine coupe d’Afrique, remporter la coupe du monde 2022, faire tomber tous les Mauritaniens au Paradis. Rideau. Juguler le chômage, mettre sur ma tête les fonctionnaires, embrasser chaque matin chaque Mauritanien, moderniser l’administration, cultiver la Chemama, « s’auto-suffire » en blé, en orge, en dattes, en riz, en viande, en poisson, en eau, en gasoil, en ciel, en terre, en pèlerinage pour tous. Rideau. Plus d’esclaves. Plus de déportés. Plus d’orphelins en pleurs ni de veuves en lamentations. Droits pour tous : esclaves et maîtres, employeurs et employés. Rideau. Dix fois les salaires. Grosses industries de transformation. Usines de pointe. Exportation de tonnes de viande vers toute la sous-région. Les Algériens ne croqueront plus de cette viande si lointaine made in Argentine. Ce sera le gigot, le foie, la bosse et les côtelettes en provenance de la Mauritanie. Assurance-maladie pour tous. Fonctionnaires. Employés informels : vendeurs, acheteurs, receleurs et mellahas de Noukhta Sakhina, courtiers des marchés du bétail du Sixième et de Tenweïch, grossistes et détaillants des légumes et des fruits de la Mosquée marocaines, écailleurs de la plage et du marché au poisson de Nouakchott, charretiers de Mellah, manœuvres, dockers, vendeuses de beignets, de Tiav, de boulettes au poisson et à la viande, jardiniers des environs du terrain pêcheur « gazré » depuis maintenant plus de vingt ans. Unité nationale. Sacrée unité. Rideau. Comme les Mauritaniens aiment le lait, quinze vaches, à chacun, avec de grosses cornes ou de petites. Selon les goûts et les traditions. La vache de l’AJD/MR, c’est une vache pour Kwar. La vache maure, c’est, généralement, avec de petites cornes et, de préférence, une couleur autre que le rouge et le noir. C’est clair que Stendhal n’est pas né dans les environs d’Amourj, en plein centre du Kouch. Qui dit lait, dit beurre et pain à profusion, pour y foutre une bonne dose de cette graisse bienfaitrice. Personne ne marchera plus, de Boghé à Nouakchott, au risque de se faire charger, à coups de grenades lacrymogènes, par une milice déchainée. Fini les camps délabrés. Plus de bâches au logo du HCR ou du HCE. Plus de cloisonnement linguistique. Plus d’écoles pour pauvres et d’écoles pour riches. Santé pour tous. Bonheur pour tous. Al Barka ! Al Barka ! Rideau. Les cinq candidats ont tout promis. Que de promesses. Que de dettes. Mais attention aux longs dos ! Même voûté, le dos peut s’allonger indéfiniment. Attention aux gens qui ne sont pas droits ! C’est connu : « kelem kelem mahou maa’loum ». Tout comme promettre. Promettre, « mahou maa’loum », surtout quand ça peut se « mettre debout sur toi ». Salut.
Depuis quelques jours, une affaire secoue la Toile. Tout a commencé lorsque, dans l’émission « Salon de la presse » sur la chaine TTV, Hanevy ould Dahah évoqua le marché de réhabilitation du principal quai du port de Nouadhibou, attribué à un groupement composé de deux sociétés ; l’une mauritanienne et l’autre turque.