«Où fuir», se demandaient naguère les anciens, «quand le cri vient de la montagne?», constatant, par ailleurs, «que le plus grand, c’est l’éléphant et que celui-ci ne prie pas». Nous n’avons certainement pas, comme se sont empressés à le relever les gens de la TV «La Parlementaire», les députés les plus turbulents du Monde. Même si ceux-là ne peuvent être à la fois juge et partie, je suis complètement, entièrement et même très d’accord avec eux à affirmer que notre Parlement n’est pas comme les autres parlements du Monde. Et que nos parlementaires ne sont pas non plus comme les autres parlementaires du Monde. Qu’en ces autres instances, on fait parfois « plus pire », comme dirait l’autre. Moi, je connaissais le Parlement du rire. Mais de là à voir et apprendre qu’il existe un Parlement de l’injure – en direct, s’il vous plaît, sur vos petits écrans – alors, là, vraiment, âmes sensibles s’abstenir ! Depuis quand sont-ils là, nos fameux députés ? Je parle de ceux qui sont les effets et les catastrophes du non moins fameux Sommet de la Baule. De la première assemblée à la dernière de maintenant où nos députés en sont arrivés à faire n’importe quoi et à le dire. Je parle de leur profil. Qu’est-ce que notre auguste assemblée n’a pas eu comme député ? Quelles pratiques, quels comportements n’y a-t-on pas vus ? Des représentants du peuple directement tirés des fermes, des champs, des prisons, des garages, des chantiers navals, des lobbies de trafics de faux médicaments, des réseaux de distribution des produits alimentaires périmés, des asiles, des casernes fraîchement débarqués de l’armée pour fautes graves, des vendeurs de gasoil exonéré, des « toujours debout » en boutiques d’ici et de là-bas, des bouffons, des troubadours, des clowns, des prestidigitateurs, de vrais et de faux marabouts, des amuseurs publics, des tortionnaires, des bandits de grand chemin, des bluffeurs, des putschistes, de piètres instituteurs et autres profils encore plus kaléidoscopiques et renversants. Mais il est vrai qu’un parlement est généralement fait de tout. Partout. On a vu nos honorables dans toutes les positions. Debout. Assis. Aplatis. Somnolant. Ronflant. Nos députés inspirent même leurs homologues américains. Ce que Nancy Pelosi, la présidente démocrate de la Chambre des représentants, a fait, en déchirant le discours de Trump, l’ex-député Khalil ould Teyib l’a fait, en déchirant un projet de loi distribué en français ! Justement ce français que l’irracontable président de l’Assemblée nationale vient de décider, seul, d’interdire dans « son » hémicycle. Sa tour de Babel où « ses » députés ne doivent plus s’interpeller qu’en leurs langues nationales. Parler en arabe. Écouter en soninké. Réfléchir en pulaar. Demander en wolof. Insulter en hassanya. Vive la souveraineté nationale ! À bas la langue du colon ! Et nos députés sont aussi probablement les seuls à oublier leurs électeurs durant leur mandat. C'est-à-dire que juste après la proclamation définitive des résultats, ils changent de numéros de téléphone et reprennent les choses à zéro. Oui, bien sûr qu’ils ne sont pas tous comme ça ! Évidemment. Mais on est en démocratie et c’est la majorité qui compte. Nos députés sont particulièrement courtois. Surtout envers les ministres et autres hauts responsables de la république qu’ils vont régulièrement « saluer ». Plus facile de les trouver dans les salles d’attente de ceux-ci qu’en les couloirs ou bureaux de leur respectable Assemblée. Le peuple leur reproche – disons plutôt, pour être plus juste, un « certain » peuple leur reproche – de trop aimer l’argent et de se bagarrer parfois pour rien ! Mais qui n’aime pas l’argent en ce « mensonge » qu’est ce bas-monde ? Pour paraphraser Pascal, l’argent éloigne de nous trois grands maux : la dèche, l’ennui et le besoin. Quant à « Qu’Allah brûle ton père ! » ou « que tes voix sont incomplètes ! », ça, ce sont des sautes d’humeur passagères qui arrivent en tous les parlements du Monde. Députés de toute la Mauritanie, insultez-vous, augmentez vos salaires, votez tous les projets ! C’est comme ça dans le Monde. Salut.
Sneiba El Kory