La dernière fois que l'Australie a exécuté l’un de ses citoyens, c’était il y a 50 ans. En décembre 1965, Ronald Ryan s’évada de la prison où il purgeait sa peine après avoir été condamné pour vol. Au cours de sa fuite, un coup de feu provoqua la mort d'un gardien de prison. 17 jours plus tard, Ronald Ryan fut arrêté, accusé de meurtre, et condamné à mort. Il fut pendu le 3 février 1967.
L’exécution de Ronald Ryan a déclenché à l’époque des manifestations à travers toute l’Australie. Au cours des décennies suivantes, les Etats et Territoires australiens ont tous supprimé la peine de mort de leurs systèmes judiciaires. En 2010, le gouvernement fédéral a approuvé une loi qui empêche sa réintroduction en Australie.
En abolissant la peine de mort, l’Australie s’est inscrite dans une tendance mondiale. Aujourd’hui, près de deux tiers des pays l’ont abolie en droit et en pratique. Malheureusement, nombreux sont ceux qui continuent de recourir à des exécutions.
L’affaire Ronald Ryan illustre à plusieurs titres en quoi la peine capitale est injuste.
Tout d’abord, aucun système judiciaire n’est à l’abri de l’erreur : il reste toujours le risque inacceptable qu’un innocent soit exécuté. Dans le cas de Ronald Ryan, il n’est pas certain que ce soit lui qui ait tiré et causé le décès du gardien.
Depuis 1973, date à laquelle la Cour suprême américaine a réintroduit la peine de mort aux Etats-Unis, plus de 150 personnes ont pu quitter le couloir de la mort avant leur exécution. Si nombre d’entre elles ont été innocentées grâce à des analyses d’ADN, la plupart ont été victimes d’erreurs judiciaires, auxquelles même les pays les plus développés n’échappent pas.
Ensuite, la peine de mort est appliquée de manière disproportionnée aux personnes issues de milieux défavorisés ou de minorités. Ronald Ryan était issu de la classe ouvrière : son père était minier, sa mère employée de maison. Un grand nombre de ceux qui patientent dans les couloirs de la mort n’ont pas les moyens de s’offrir une défense adéquate.
Enfin, la peine de mort, et la vie de ceux qui attendent leur exécution sert trop souvent d’outil politique. Elle est utilisée par les gouvernements pour montrer aux populations qu’ils font régner l’ordre. Abolir la peine de mort demande du courage et de la volonté de la part d’un gouvernement, en particulier lorsque les sondages d’opinion soutiennent la peine capitale. Le chemin vers l’abolition est long et difficile, mais chaque pas est un progrès.
Il y a bien d’autres raisons pour lesquelles la peine de mort est abjecte : elle ne réduit pas le nombre de crimes, elle est cruelle et inhumaine, et interdit toute réinsertion.
L’Australie s’appuie sur tous ces arguments pour défendre l’abolition universelle de la peine de mort. Ce n’est pas un débat facile, mais il en vaut la peine.
*Philip Ruddock est l’Envoyé spécial de l’Australie pour les Droits de l’Homme. Le 10 octobre est la journée mondiale contre la peine de mort.